Deux Jours à tuer est un petit film de seulement 1h20 d'une violence inouïe qui nous
calme, littéralement. Albert Dupontel (certainement l'un des meilleurs acteurs français) y joue Antoine, un publicitaire qui, à la
quarantaine, décide de tout envoyer valser en un week-end. Son boulot, sa femme, ses gosses, ses amis, il envoie chier tout le monde en leur balançant leurs 4 vérités et décide de se barrer.
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Rarement un film ne m'aura fait cet effet si particulier à la Festen ou Pardonnez-moi, un sentiment de gêne, de choc. Car il est très rare de voir un homme se comporter de la sorte avec les gens qu'il cotoie, et ça fait mal,
ça effraie, ça fout mal à l'aise. Mais d'un autre côté, c'est hyper jubilatoire. Pendant tout le début du film, j'ai pris un pied pas possible à suivre Dupontel dans son raisonnement, même si on
ne comprend pas bien pourquoi il agit de la sorte. On se demande toujours ce qui va se passer, quelles atrocités Antoine va bien pouvoir sortir à sa femme et ça va toujours en s'empirant jusqu'au
dîner "entre amis" qui est l'une des scènes les plus jouissives que j'ai pu voir dans le cinéma français. Vraiment dingue.
Albert Dupontel fait le film pratiquement tout seul, avec sa mine tantôt déconfite, tantôt hargneuse et
moqueuse. On sent bien que son personnage a un problème, qu'il est mal dans sa peau pour agir de la sorte, et ça le rend plus attachant qu'odieux. C'était d'ailleurs certainement un pari
difficile pour le réalisateur Jean Becker : rendre le personnage principal touchant malgré les horreurs qu'il peut balancer. Du côté des
autres acteurs, c'est d'un niveau un peu plus faible, d'autant plus qu'ils font pâle figure à côté du grand Dupontel. Ils interprètent
d'ailleurs des personnages passifs, relativement impuissants devant la colère de celui-ci. Marie-Josée Croze est la moins passive, car même si son personnage (Cécile) s'en prend plein la tronche,
et qu'elle souffre, elle tente de comprendre ce qui ne tourne pas rond dans la tête de son mari. La plupart des scènes sont ignobles mais c'est une des grandes qualités du cinéma : pouvoir nous
montrer des choses brutales avec une réalisme de dingue. Il est légèrement dommage que le film s'essouffle (juste un peu) au bout d'une heure, mais le final vaut plutôt le coup. Même si
j'attendais quelque chose de plus fin, et que c'était un dénouement qui me paraissait évident (c'est bien téléphoné), il n'empêche que c'est satisfaisant. La musique finale est également
bienvenue et nous permet de quitter le film avec douceur et un brin de déprime.
Je retiendrai surtout de ce film les diverses émotions qui nous submergent devant cet enchaînement de vérités, ces dialogues absolument superbes à base
d'anti-matérialisme qui nous font frissonner d'effroi et de stupeur, mais aussi la prestation hallucinante de Dupontel que j'affectionne de
plus en plus. Un acteur inclassable, à l'humour et la voix bien particuliers, qui illumine toujours les films par sa présence (quant il est bien exploité comme ici, dans Le Bruit des Glaçons ou
Irréversible). Merci à David de m'avoir conseillé ce film, je vous le conseille à mon tour car il est savoureux.