Enormément de points positifs pour ce film que je ne qualifierais pas de parfait car y'a quand même quelques longueurs, mais presque. Néanmoins, les 3h07
passent à une rapidité affolante, tout simplement parce qu'à partir de presque rien,
Stanley Kubrick parvient à nous tenir passionnés d'un
bout à l'autre de son film, on ne sait par quel miracle. Les personnages sont captivants, et l'histoire bien que pas palpitante pour deux sous est suffisamment bien contée pour m'avoir intéressé
avec force. Il y a maintenant un an je me suis mis aux films d'époque avec Marie-Antoinette et je me suis rendu compte avec stupeur que j'adore ça. Forcément, un film comme
Barry Lyndon ne pouvait pas me déplaire car en plus de nous faire entrer dans l'ambiance "films à costumes", il le fait avec une classe et une virtuosité
assez dingues.

Visuellement tout d'abord,
Barry Lyndon est une merveille. Les décors irlandais sont
vraiment magnifiques, avec une photographie époustouflante et rien que pour ça, le film mérite les honneurs. La reconstitution des décors, des costumes, est absolument époustouflante. On s'y
croirait vraiment, et on a réellement l'impression de voir des aristocrates évoluer à la fin du 18e. C'est vraiment très soigné, avec des plans et des mouvements de caméra magiques, une lumière
parfaite (presque pas de lumière artificielle il me semble, le seul éclairage résidant dans les bougies et la lumière naturelle, captée par un objectif de caméra bien précis), bref : du grand
art. Les plans sont accompagnés (comme souvent avec Kubrick) d'une BO de toute beauté, à base de musique classique et de musique très 18e siècle.
Sarabande, de
Haendel, est bien sûr la musique culte de ce film et apparaît toujours au bon moment
(notamment les scènes de duels) sans jamais nous agacer. Il est peut-être légèrement dommage que cette musique n'explose jamais vraiment et reste un peu trop en sourdine. Ca aurait été vraiment
un pur délire de frissons, mais ce n'est pas bien grave. Autre musique mémorable : le
Trio Piano N°2 de
Schubert, que j'adorais déjà avant de voir le film et qui colle à la perfection aux scènes concernées. Du pur génie auditif collé sur du pur génie
visuel. Que du bonheur, que des frissons.

On ajoute aux qualités du film une complexité des personnages impressionnante.
Aucun manichéisme dans ce film où les personnages (y compris Barry Lyndon lui-même) sont assez difficile à cerner. On ne sait pas trop que penser du personnage principal jusqu'à la toute fin, car
finalement on ne s'y attache pas vraiment. Le personnage auquel je me suis le plus attaché est incontestablement Lady Lyndon. Alors là, l'actrice
Marisa
Berenson a été pour moi une sacrée révélation. Que de grâce, de beauté, cette femme est vraiment sublime et m'a captivé d'un bout à l'autre, avec très peu de répliques mais un
sacré regard. Les jeux de regard sont d'ailleurs très présents dans ce film et magnifiques. L'une des scènes qui m'a le plus marqué est la première rencontre entre Lady Lyndon et Redmond Barry,
qui s'échangent des regards pendant un bon moment. Et le pire, c'est que ça n'ennuie pas le spectateur qui reste là, subjugué devant la beauté de la scène qui n'a pourtant en soi rien
d'exceptionnel. Mais on sent passer les émotions des personnages, leurs pensées même, et c'est très fort. Kubrick semble avoir un don pour ça, car ça me fait penser à une scène de
Eyes Wide Shut, lorsque
Nicole Kidman balance son monologue à
Tom Cruise et que j'étais supendu à ses lèvres. Bref, ici le duo
Marisa Berenson / Ryan O'Neal est
génial, et cette scène va faire partie des mes scènes cultes.

De même, on a beaucoup d'émotion dans ce film lorsque le petit Brian meurt lentement sur son lit, entouré de ses
parents. Là encore le travail des acteurs est incroyable (ils sont vraiment très touchants, émouvants, que ce soit l'un comme l'une). Un moment intense qui est certainement l'un des plus
marquants. Autre scène culte et absolument sublime : le dernier duel entre Barry Lyndon et son beau-fils Lord Bullingdon, incontestablement un énorme moment de cinéma sur fond de
Haendel. La scène dure longtemps,
Kubrick prend tout son temps pour la filmer, pour notre plus
grand plaisir. Il est rare de voir ainsi les réalisateurs prendre leur temps (souvent, les plans sont coupés rapidement comme s'ils avaient peur de nous ennuyer), et ils devraient faire ça plus
souvent car c'est du pur bonheur pour moi (je repense à
Sergio Leone et
M.Night
Shyamalan que j'adule). Bref, cette scène de duel est assurément géniale et j'aurais même aimé qu'elle dure deux fois plus longtemps.
Quand au dénouement du film, il est juste splendide, triste. On ne peut qu'éprouver de la compassion pour la pauvre Lady Lyndon qui est tout au long du film
un personnage très triste qui ne cesse de souffrir, et on ne sait pas trop quoi penser du sort de Barry Lyndon. L'a-t-il bien mérité ? Sûrement... Ca rappelle juste que malgré une ascension très
lente vers le sommet de la hiérarchie, un homme peut très bien redescendre d'un seul coup. Bref, je suis terriblement enchanté d'avoir découvert ce film, il faut aimer les films d'époque mais ça
vaut le coup. Les deux petits bémols restent quelques longueurs (minimes) et une voix off bien trop présente (ça gâche les plans parfois). Mais chef d'oeuvre.
En vidéo cette sublime scène, ce véritable "dialogue des yeux", filmé entièrement à la lumière de la bougie, avec la sublime musique de
Schubert... Du grand art, vraiment.
Et deux images qui donnent une idée de la beauté du film.