Quelques films en vrac #30 - Rattrapage 2023

Quelques films en vrac #30 - Rattrapage 2023

     Voici quelques films sortis en 2023 et que je n'ai pas critiqués sur le blog. Parmi eux, un film fantastique français qui vaut le coup d'oeil, un drame psychologique qui ne m'a pas convaincu, un thriller Netflix globalement raté, et une excellente surprise.

 

Le règne animal (Thomas Cailley, 2023)

Quelques films en vrac #30 - Rattrapage 2023

      Je n'ai pas fait d'article sur Le règne animal parce que je ne savais pas trop quoi en penser à l'époque. Ce film de Thomas Cailley fait un peu penser à ces ambiances un peu froides ou viscérales du cinéma de Julia Ducournau ; je n'ai pas pu m'empêcher de penser à Grave ou Titane en le découvrant. Un côté cru, qui relève presque du body horror, ressort dans Le règne animal et peut clairement mettre certains spectateurs mal à l'aise. Je me suis senti mal pour cette mère de famille qui était assise avec ses 3 garçons (entre 8 et 12 ans) non loin de moi, et qui faisait son possible pour gérer les angoisses de ceux-ci sans oser quitter la salle. En effet, il n'est pas facile de prévoir à l'avance ce qu'on va réellement voir lorsqu'on entame ce film, certaines scènes de métamorphose pouvant sans doute s'avérer traumatisantes pour des enfants peu habitués.

 

     Au-delà de l'aspect végétal et viscéral du film, je ne parviens pas à garder un excellent souvenir du Règne animal parce que je n'ai pas saisi l'intérêt de raconter cette histoire. Bien sûr, je comprends le message sur la tolérance et l'acceptation des différences, sur la peur de l'autre, qu'il est particulièrement pertinent de déployer dans notre société actuelle. Cependant, le film m'a laissé sur ma faim, avec un arrière-goût désagréable que je ne saurais décrire précisément. Peut-être manque-t-il d'émotion ou de subtilité, peut-être n'ai-je pas assez ressenti la cruauté du monde et des relations entre les êtres humains. Peut-être aussi que cette histoire de famille déchirée ne m'a pas touché plus que ça parce qu'il y a une froideur qui ressort des personnages. Malgré tout, Le règne animal a de grandes qualités. Le parti pris visuel assez radical en fait partie, même s'il ne rend pas le visionnage très accessible. Le talent des acteurs est également à souligner. Et puis, surtout, je voudrais saluer tous les cinéastes qui choisissent de s'extirper de ce cinéma français routinier en proposant des oeuvres aussi fascinantes qu'inattendues. Ca fait du bien et, même si ce film (comme Titane par exemple) m'ont dérangé à différents niveaux, je pense qu'il faut cautionner toutes ces tentatives de cinéma différent dans un pays qui semble cantonné aux comédies et aux drames familiaux ou politiques.

 

Tár (Todd Field, 2023)

Quelques films en vrac #30 - Rattrapage 2023

     J'ai découvert ce film de 2h35 en pensant que j'allais voir une éclatante histoire féministe, que j'allais me révolter contre les mécanismes du pouvoir et toutes ses injustices, que les trois récompenses obtenues par Cate Blanchett pour ce rôle avaient été motivées par un personnage attachant qui m'aurait ouvert les yeux sur différentes choses. Et bien non, rien de tout ça n'a eu lieu, ou presque. Je dis "presque", parce que je ne peux pas enlever à Cate Blanchett son talent et son mérite. Oui, l'actrice est bluffante à chaque instant, c'est bien vrai. Elle est habitée par son personnage d'un bout à l'autre, parfois à la limite de l'extrême quand même (je repense à la scène de l'accordéon qui, si elle m'a bien fait rire, est relativement étrange dans le contexte du moment où elle apparait). 

 

     Hormis ceci, Tár ne m'a pas intéressé et j'y suis resté assez hermétique. Pour un film qui met en scène le parcours d'une cheffe d'orchestre, je trouve que Tár manque cruellement de rythme et de moments de puissance. C'est un comble. L'ensemble est relativement monotone d'un point de vue scénaristique, avec une introduction beaucoup trop longue et du blabla en veux-tu en voilà. On assiste à 2h30 de dialogues parfois soporifiques, et je dois dire que je n'ai pas vu l'intérêt de suivre cette histoire, tout comme je n'ai pas saisi les intentions de Todd Field derrière tout ça. Ca ne m'a rien apporté, ni émotionnellement, ni du point de vue de l'analyse. Je ne vois pas en quoi Tár peut se tárguer (oui je suis rigolo) de proposer un quelconque message positif, tant le personnage principal est détestable et difficile à cerner. Si le propos était de dénoncer une certaine cancel culture, alors je trouve ça confus et assez mal amené, d'autant que le personnage incarné par Cate Blanchett ne semble pas mériter d'être particulièrement respectée. C'est ça qui me chiffonne, car le film ne fait que nous montrer ses tares (oui je suis très rigolo deux fois) sans jamais nous permettre de la comprendre vraiment. J'ignore si la séquence lors de laquelle elle humilie (quasiment) un élève devant un auditoire est censée nous la rendre sympathique et forte, ou appuyer au contraire son côté détestable, mais ce passage m'a semblé très étrange. Au fond, j'ai presque trouvé le traitement du personnage de Cate Blanchett assez misogyne, puisqu'elle passe quasiment pour une folle à la fin du film lorsqu'elle pousse un autre chef d'orchestre (j'ai trouvé la scène bien trop poussive). Bref, je n'en ai rien retiré et je l'ai intégralement oublié quelques heures après mon visionnage.

 

Le monde après nous (Sam Esmail, 2023)

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      Moui. Malgré son casting impressionnant, malgré l'histoire de départ plutôt intrigante, Le monde après nous fait partie de ces films-concepts qui floppent très rapidement après 45 minutes. Je n'ai aucune idée de ce que le film est censé nous procurer comme sensations puisque je n'ai presque rien ressenti pendant toute la séance. Il ne peut pas s'agir d'angoisse puisque le scénario désamorce en permanence toutes les situations qui auraient pu apporter du suspense. Les personnages sont très rapidement identifiés et il n'y a jamais vraiment de doute sur leurs intentions, si bien que les scènes passent les unes après les autres sans qu'on se sente alarmés par quoi que ce soit. La narration est problématique (ou le montage, probablement), puisqu'à bien y réfléchir, on ne sent jamais vraiment planer de menace sur ces deux familles. Au fond, la seule chose dont ils ont à se préoccuper est l'absence de réseau... En effet, ils sont si bien isolés au cœur de la forêt que la menace terroriste présumée ne se fait jamais ressentir. Plusieurs plans montrent d'ailleurs à quel point ils se trouvent dans un endroit reculé, loin des attaques. Ils ne souffrent pas non plus de la guerre civile potentielle puisqu'aucun des personnages qu'ils rencontrent (ils sont rares !) ne sont réellement menaçants. Même le personnage de Kevin Bacon, qui aurait pu donner une séquence particulièrement flippante, change de comportement après 2 minutes de conversation.

 

      C'est d'ailleurs l'un des problèmes majeurs du film : le manque de cohérence dans les choix des personnages. Le personnage de Kevin Bacon craque facilement face aux arguments alors qu'il semblait parfaitement déterminé à ne pas lâcher prise pour défendre sa famille, quitte à utiliser les armes. Le personne d'Ethan Hawke est terriblement effacé et mou, il manque clairement d'ampleur et c'est regrettable lorsqu'on connait le potentiel démesuré de l'acteur. Julia Roberts cabotine beaucoup et se trouve presque toujours dans l'exagération. On ne comprendra jamais vraiment pourquoi elle est si dure avec son mari car leurs problèmes de couple ne sont jamais étalés. Quant au personnage de Mahershala Ali, il est efficace jusqu'au moment où il laisse sa fille seule pour sauver un gamin qu'il connait à peine, choix très étrange qui contredit son idée de rester soudé à celle-ci coûte que coûte. Le film fait intervenir des astuces de "suspense" qui ne marchent absolument pas, comme cette idée de mettre un compte à rebours sur le téléphone en guise de point de non-retour, chose qui passera totalement à la trappe comme pour s'en débarrasser rapidement.

 

     Bref, outre le scénario bancal et peu intrigant (qui a réellement été passionné par cette histoire dont on ne connaitra jamais les enjeux ?), outre les effets spéciaux franchement décevants pour le budget alloué au film (qui a dû passer majoritairement dans le cachet des comédiens), Le monde après nous s'offre une conclusion très bizarre, en rappelant l'importance du support physique pour le cinéma... tout ça au cœur d'un film Netflix ! On dirait une blague.

 

Je verrai toujours vos visages (Jeanne Herry, 2023)

Quelques films en vrac #30 - Rattrapage 2023

     Ce film français, qui n'est pas sans rappeler Polisse dans l'idée d'étudier et de confronter des témoignages de faits divers, est un petit coup de cœur, et ce sera donc le seul film de cet article à intégrer mon top 400. Il n'apparait pas dans mon top 2023 puisque je n'ai découvert le film qu'il y a deux jours, mais il est possible qu'il figure dans mon top 2024. 

 

     Je verrai toujours vos visages présente le modèle de la justice restaurative, qui consiste à organiser des rencontres entre victimes et criminels afin de trouver un certain apaisement des deux côtés. Que ce soit pour soulager les victimes ou éveiller une réflexion chez les délinquants, le film nous montre que le dialogue est profitable à chacun, à travers des histoires poignantes et magnifiquement interprétées. Les victimes sont incarnées par Adèle Exarchopoulos, Gilles Lellouche, Miou-Miou et Leïla Bekhti. Chacune d'entre elles offre des performances touchantes et criantes de vérité et j'ai été pendu aux lèvres de chacun des personnages. De même, les acteurs qui leur donnent la réplique sont tout aussi fabuleux, à commencer par Dali Benssalah, impassible mais touché peu à peu, ou encore Fred Testot en homme détruit par son addiction. J'ai trouvé Birane Ba un peu en-dessous, car il semble trop "gentillet", mais il fait quand même le job avec efficacité. C'est globalement le seul reproche que je pourrais faire au film, d'ailleurs : celui d'être trop gentillet et de ne pas chercher à être plus percutant. Je m'attendais à davantage de coups d'éclats, de conflits verbaux. L'ensemble est malgré tout très maîtrisé et parvient à émouvoir sans difficulté. Et c'est sans parler d'Elodie Bouchez, qui est absolument exceptionnelle dans son rôle, tout en douceur et subtilité.

 

     Bref, je vous conseille ce film qui me semble être passé assez inaperçu (je n'en avais pas entendu parler avant la semaine dernière...). 

 

 

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