Wow. Magnifique, puissant, émouvant, beau. La bande-annonce était déjà très prenante et ce film s'annonce comme l'un des meilleurs de cette
année, sans aucun doute. Si y'a un film à voir, c'est celui-là. Jeff Nichols n'en est qu'à son deuxième essai et pourtant il nous sort un
mélange somptueux entre The Tree of Life et du Shyamalan, c'est tout simplement du rêve
et c'est ça que j'appelle du cinéma. Le synopsis rapidement (merci Wikipedia) : Curtis LaForche, un jeune marié et père de famille assailli de visions de fin du
monde, se questionne s'il doit abriter sa famille d'une tempête ou de lui-même… De la lenteur, des plans sublimes, de l'angoisse, de la puissance, de l'émotion, de la finesse et de la
psychologie, y'a de tout sauf de l'action, donc fans de Twister s'abstenir.
Le film tient en 4 mots :
Scénario, Réalisation, Emotion, Casting. Tout d'abord, le
scénario. Ca faisait bien longtemps que je n'avais pas vu un film si bien raconté, si bien fait dans sa manière de présenter les personnages, de les traiter. Les personnages, c'est l'une des
choses les plus importantes d'un film. Si les protagonistes ne sont pas attachants, pas profonds, sans âme, alors le film va avoir du mal à être bon (c'est le reproche que je faisais à
A Dangerous Method : un postulat de base ma foi convaincant, mais des personnages franchement à chier). Ici, je n'ai absolument rien à dire
quant à ce point, c'est juste la perfection. Le personnage principal, Curtis, est un être perturbé, torturé, à la limite entre la skyzophrénie et la paranoïa. Il fait des cauchemars très
perturbants, de sortes de visions qui influencent ces choix et sa vie. Au fil du film, Curtis va devenir de plus en plus attachant, de plus en plus poignant à mesure qu'il sombre dans la folie,
une folie que lui seul peut comprendre. Je ne dévoilerai pas la fin du film (même pas un seul indice) car c'est un film à voir sans savoir à quoi s'attendre. Mais ce personnage est complexe et va
finir incompris de tous, y compris de sa femme qui est à la limite de le prendre pour un dingue. Lui-même va constamment douter de sa santé mentale, effrayé d'avoir hérité de la maladie de sa
mère.
Mais encore une fois, cette femme, Samantha, est l'un des personnages les plus magnifiques que j'ai jamais pu
voir. Elle a une âme tellement aimante et généreuse, douce et respectueuse, que je n'ai même pas de mots pour la qualifier. Face à la folie de son mari, la jeune femme va pourtant tout faire pour
le comprendre, va tout lui pardonner, va même l'aider jusqu'au bout. Le traitement des personnages est fait avec tellement de finesse et de poésie, c'est beau à voir. Cette petite famille est
magique et pourtant on sent qu'ils ne sont pas heureux (encore un détail très fin du scénario : lorsque Curtis s'adresse à sa petite fille sourde, il ne sait même pas comment dire "heureux" dans
la langue des signes ce qui laisse supposer qu'il n'a jamais utilisé ce mot envers Hannah). Dans
Take Shelter, pas besoin de sexe pour faire
passer tout l'amour qui unit ce couple merveilleux. Non,
Jeff Nichols ne tombe pas dans cette connerie que nous sert le cinéma régulièrement
et crée en à peine 1h un amour palpable, extrêmement ressenti par le spectateur : c'est étonnant et fort. Ce mec est parvenu à me faire frissonner (et presque faire pleurer) juste en faisant
poser la tête de
Jessica Chastain sur l'épaule de
Michael Shannon. Cette simple
réaction, pourtant toute conne, arrive à point nommé dans le film, pile au moment adéquat où il fallait la mettre car elle montre en une seconde et demie l'amour démesuré que porte Sam pour
Curtis. Vous comprendrez quand vous l'aurez vu.
Et c'est là que j'en viens au casting et à l'émotion. Parce que là, c'est pour moi du haut niveau. Entre
Jessica Chastain et
Michael Shannon, il y a vraiment une complicité incroyable pour
parvenir à transmettre autant d'émotion. Les deux acteurs, qu'ils soient ensemble ou séparés dans les scènes, arrivent à créer une émotion absolument monstrueuse (j'avais déjà adoré Jessica
Chastain dans The Tree of Life mais alors là ça ne fait que confirmer son immense talent). Leurs regards, leurs mimiques, leurs larmes sont d'une sacrée puissance, je ne sais pas si je suis le
seul à avoir tant ressenti de choses mais ça m'a vraiment ému. Rien que les regards des dernières secondes du film sont hallucinants, surtout
Michael
Shannon qui fait un boulot magnifique pendant 2h. Etonnante performance d'acteur, je ne le connaissais pas mais là il m'a bluffé. Je retiendrai notamment la scène où Curtis décide
de tout dévoiler à sa femme, ses angoisses, les raisons de ses actes. C'est une scène qui, encore une fois, apparaît dans le film à un timing parfait, exactement au moment qu'il faut (le
réalisateur n'a vraiment fait aucune erreur de ce côté, tout est juste parfait pour atteindre un enchaînement idéal de l'évolution du personnage), et elle est elle aussi d'une puissance rare. De
même, toute la séquence dans l'abri anti-tempête est d'une force... Notamment l'ouverture de la trappe qui est, à ce moment précis du film, un déferlement d'émotions grâce à la musique
sublime.
Puisque je parle de musique (et autant dire que la BO est un pur bijou), parlons aussi réalisation, là encore un énorme
chapeau à
Jeff Nichols. La photographie est tout bonnement prodigieuse, la caméra bouge comme celle de
Shyamalan, les choses sont montrées avec subtilité, finesse, psychologie. C'est très intelligent et remarquable en plus de l'extrême profondeur des
personnages. Le montage du film est à mon goût irréprochable, alternant les scènes de "rêve" terriblement angoissantes et les autres scènes plus douces. Car oui, on flippe aussi pendant ce film,
il fout un peu les jetons. On ressent avec Curtis toute l'angoisse de la tempête et dès que ça gronde, on prend peur sur notre siège. Tout est fait pour nous faire douter, jusqu'à la toute fin
j'ai vécu des ascenseurs émotifs, de la frustration, des surprises. Le doute ne nous lâche pas avant le final, et quel dénouement ! Le seul petit bémol que j'ai eu aura été une énorme frustration
à l'apparition du générique. Bordel, je ne voulais pas que ça finisse !
PS : Merci à mdcame pour sa remarque très juste sur le fait que je n'ai pas mentionné de comparaison avec le film
Melancholia alors que les deux films ont une construction similaire. Bien évidemment les films se ressemblent un peu mais pas tant que ça je trouve, et puis tout le monde et toute la presse sort
cette comparaison à tour de bras alors ça m'agace.
Je n'en dis pas plus pour ne pas spoiler, mais ce film est vraiment une merveille psychologique. J'attends le deuxième
visionnage pour savoir si je lui mets
le point rouge. Ce soir c'était
limite mais je sais que je m'emporte souvent beaucoup à la sortie du cinéma.
Voir aussi : ma critique au deuxième visionnage.
Voici la bande-annonce pour ceux et celles qui l'auraient ratée :