The Killer Inside Me - L'histoire de Lou Ford

          Puisque j'en ai eu l'occasion, je suis donc allé voir The Killer Inside Me hier soir, car j'avoue que ce film m'intriguait. Cette adaptation du livre éponyme de Jim Thompson paru en 1952, réalisée par Michael Winterbottom, a été jugée trop violente par le public, visiblement choqué. Sorti le 11 août dernier, ce film raconte l'histoire (fictive) de Lou Ford (joué par Casey Affleck), un shérif texan des années 50 qui doit faire face à de nombreux problèmes, notamment avec les femmes et la loi. Dans sa petite ville paisible du Texas, de nombreux meurtres font leur apparition, chose qui ne l'étonne pas puisque c'est lui qui les commet. Tueur psychopathe et intelligent, il sait cependant qu'il ne lui reste plus beaucoup de temps avant d'être démasqué...
 

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the killer inside me

 

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          Ai-je été déçu par ce film dont j'attendais beaucoup ? Pas tellement, car malgré les quelques petites longueurs, je suis rentré dès le début dans cette intrigue vraiment passionnante. La première partie du film nous présente le personnage de Lou Ford. Le film est raconté à la première personne, celle de ce shérif aux allures de cow-boy. Tout est alors basé uniquement sous son point de vue. Casey Affleck est clairement l'atout du film, il parvient bien à nous plonger dans cette ambiance un peu western des années 50 avec un accent et une voix excellentes. Grosse révélation du film L'Assassinat de Jesse James par le Lâche Robert Ford où il avait presque volé la vedette à Brad Pitt, cet acteur n'a pas fini de faire parler de lui, car il excelle notamment dans ce genre de rôles ambigus et pas toujours très clairs. Il incarne donc ici un "Ford" pour la deuxième fois, et quel talent ! Derrière son visage juvénile et naïf, il joue son rôle avec justesse et génie. Son personnage est plus ou moins divisé en deux parties. En public, Lou Ford est un shérif très respecté, il connait tout le monde et la plupart des gens l'apprécient. Un homme sympathique et agréable. Mais en privé, notamment lorsqu'il est avec des femmes, on a affaire à une toute autre personne. Sans parler de double personnalité, car ce n'est pas du tout le cas ici, il devient alors un amant brutal et sociopathe, frappant avec violence et sans aucun remord.


the killer inside me 3          Le film démarre vraiment vite, Lou Ford rendant visite à une prostituée, jouée par Jessica Alba. Il lui demande de quitter la ville, ce qu'elle prend très mal en giflant le shérif à plusieurs reprises. Si Lou est sur la défensive au début, et que le spectateur éprouve même un peu de pitié pour cet homme qui fait uniquement son boulot, les choses prennent rapidement une autre tournure. Je ne vais pas raconter tout ça en détails, je vous laisse regarder le film par vous-mêmes mais je le déconseille si vous êtes trop sensibles à la violence extrême. C'est surtout une scène bien particulière qui choque, vraiment. A partir de cette scène, le film prend un autre chemin et l'intrigue commence vraiment. Une rumeur dit que Jessica Alba aurait quitté la salle lors de sa projection au festival Sundance, trop choquée par cette scène où son personnage se fait rudement cogner plusieurs fois de suite au visage pour finir dans un mauvais état. Mais je pense qu'il faudrait être bien crédule pour croire que l'actrice ne savait pas du tout de quoi il retournait. Car même si Jessica Alba a effectivement quitté la salle, il y a fort à parier que c'était pour des raisons professionnelles et pas à cause de la violence. Il me semble d'ailleurs qu'elle a démenti cette information et qu'elle avait tout simplement un avion à prendre (mais ce démenti est également à prendre avec des pincettes).

          Certes, la scène est choquante, car il est difficile de voir une femme se faire battre ainsi à l'écran, d'autant que Jessica Alba est, dans ce film, la fragilité incarnée. Cette violence est d'un réalisme incroyable, et il faut avouer qu'à un moment j'ai croisé le regard de l'ami qui m'accompagnait et qui semblait aussi gêné que moi. La question est : cette violence était-elle utile ? Difficile d'y répondre, car même si effectivement la scène aurait pu être moins explicite, il ne faut pas oublier que tout ceci est propre au film et que ça le caractérise. Même si on sent qu'aucun parti n'a été pris de la part du réalisateur, il est évident que ceci n'est pas du tout cautionné, et que le fait de montrer autant d'horreur est volontairement provocateur. Et c'est l'un des critères qui peut entrer en compte pour définir une scène culte. D'ailleurs, il est évident que le film n'aurait pas eu la même profondeur ni le même effet sans cette abomination embarrassante.


the killer inside me 2         A partir de tout ceci, le personnage de Lou Ford devient alors fort passionnant. Même si on ne peut désormais que le détester, il nous intrigue et on a envie de savoir comment il va s'en sortir pour ne pas être soupçonné. L'intelligence et le machiavélisme de cet homme filent des frissons, notamment dans une scène vers la fin du film, où il se laisse encore tenter par le diable, frappe sa femme (interprétée par Kate Hudson) et accuse à sa place un pauvre homme qui trainait là. Des frissons procurés par le petit sourire juvénile de Casey Affleck, une réaction à la fois terrible et innocente qui donne à son personnage des allures de monstre, qui ne regrette pas ses actes et n'est pas affecté par le mal qu'il fait à des personnes qu'il a chéri. Ce machiavélisme est donc confronté à une candeur démoniaque qui scotche le spectateur, bien sûr impuissant. C'est avec un sentiment d'horreur mêlée à de l'admiration (un peu gênante) qu'on assiste au calme diabolique que Lou Ford continue de garder lorsqu'il est interrogé, ainsi qu'à l'habileté qu'il montre à trouver des alibis, et des excuses toutes plus crédibles les unes que les autres, parfois accompagnées d'une voix off intéressante.


The-Killer-Inside-Me-Trailer         La fin du film est, elle, sublime. On comprend alors à quel point ce personnage est malin, parvenant à deviner, après 8 jours de réflexion, la seule erreur qu'il a pu commettre. Je n'en dis pas plus pour ne pas révéler la fin, mais elle est vraiment dingue. De plus, le film est servi par une très bonne BO, qui nous plonge parfaitement dans l'atmosphère western du Texas des années 50, ce qui est agréable et donne un effet très "cool". C'est par exemple le cas avec la musique "Shame on You", de Eddy Arnold, une très bonne chanson qui conclut le film avec brio et qu'on peut écouter ici sur Youtube.



         En définitive, je ne suis pas ressorti de ce film déçu, absolument pas. Par contre, j'ai effectivement repensé à certaines images pendant un bon moment. Et même si le film contient des scènes très difficiles, elles ne desservent pas l'intrigue et permettent de donner au personnage une dimension unique, caractérisé par sa voix fluette et assez inhabituelle, son attitude, son visage tantôt candide, tantôt malfaisant, et ses actes horribles à la fois physiquement et mentalement. Je le déconseille aux âmes sensibles car plusieurs scènes sont dures moralement, ce n'est pas un film créé pour se détendre. Pour les autres, réfléchissez-y à deux fois avant de snober cette oeuvre, elle vaut le détour.




        Voir aussi : The Killer Inside Me (bande-annonce), L'assassinat de Jesse James par le Lâche Robert Ford.




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R
<br /> Excellente critique, j'ai vu TKIM il y a peu bien que j'ai acheté le DVD dès sa sortie, et je n'en suis pas sortie indemne (enfin plus que Jessica Alba quand même). Affleck est glaçant de<br /> cynisme, bien que ses ardeurs sexuelles réchauffent un peu le personnage... Ce qui fait un mélange détonnant et surtout très dérangeant. J'ai lu pas mal de critiques crétines où on hurle à la<br /> mysoginie. Toute cette violence m'apparaît plutôt comme l'expression d'une révolte vomie contre les codes trop hypocritement réglés de la société<br /> américaine, ce qui malheureusement arrive assez souvent aux USA. Et après la dernière tuerie en date dans le Colorado, je trouve assez amusant d'être encore outré par les coups de Lou<br /> Ford... La vérité est que le public américain (qui a beaucoup moins bien accueilli le film que nous) s'est pris lui aussi une bonne pêche en prenant conscience des monstres que sa société<br /> engendre, dissimulés ça et là sous les visages de la confiance...<br />
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S
<br /> <br /> Content que certains aient compris le film de cette manière et ne l'ont pas pris pour de la violence gratuite !<br /> <br /> <br /> <br />
Z
<br /> <br /> Tu m'as donné envie de le choper... Il est sorti en DVD?<br /> <br /> <br /> <br />
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S
<br /> <br /> Apparemment il sortira le 27 décembre (d'après Amazon), mais tu peux l'avoir sur Amazon.co.uk je pense.<br /> <br /> <br /> <br />
C
<br /> <br /> Le livre a été réédité chez Folio Policier à l'occasion de la sortie du film. C'est donc assez facile de le trouver<br /> <br /> <br /> <br />
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S
<br /> <br /> D'accord, merci ! <br /> <br /> <br /> <br />
C
<br /> <br /> Bonjour. Je partage assez les avis exprimés dans cette critique. C'est un très bon film noir à mon avis. Et, effectivement, le réalisateur a été très fidèle au roman (excellent au demeurant) tout<br /> en en livrant une lecture personnelle. Le jeu des acteurs (Affleck surtout mais aussi Alba) est assez en accord avec l'univers thompsonien.<br /> <br /> <br /> <br />
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S
<br /> <br /> Merci pour cette remarque, si j'en ai l'occasion j'essaierai donc de me procurer le livre. Ravi que le film t'ait plu aussi.<br /> <br /> <br /> <br />
F
<br /> <br /> Je n'en avais jamais entendu parler, il a l'air intéressant et le casting me plaît (Casey Affleck, Jess Alba et surtout Simon Baker).<br /> <br /> <br /> <br />
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S
<br /> <br /> En effet, j'ai oublié de parler de Simon Baker ! Il est vraiment très bon dans ce film. Je l'ai découvert dans ce film (The Mentalist ne m'intéresse vraiment pas), et c'est une bonne découverte.<br /> <br /> <br /> <br />
M
<br /> <br /> Fidèle tout du long, aucune digression.<br /> <br /> <br /> Si, la maison en feu à la fin, et je n'ai pas compris pourquoi d'ailleurs! Plus les scènes dites  " sulfureuses "  qui ont été quelque peu développées (J.Alba oblige peut-être).<br /> <br /> <br /> Dur à adapter ce roman : environ 200 pages seulement, peu d'explications profondes, ou tout du moins tout est à peine suggéré.<br /> <br /> <br /> La clé du bouquin se situe dans l'ambiance.<br /> <br /> <br /> Les scènes de violence restent paradoxalement les plus réussies et Sir Affleck porte le film de Winterbottom. Il a parfaitement capté son personnage (yep, comme d'hab.).    <br /> <br /> <br /> <br />
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S
<br /> <br /> Ouais, je suis pressé de revoir cet acteur dans de prochains rôles, il devrait normalement enchaîner les propositions !<br /> <br /> <br /> <br />
M
<br /> <br /> Ah ben ça y est, tu l'as donc vu ce killer !<br /> <br /> <br /> C'est bien ce que je disais, mieux vaut ne pas lire le roman avant, ou bien suis-je une trop vilaine " critiqueuse " après tout.<br /> <br /> <br /> Je me demandais ce qu'aurait donné une mise en scène avec un M.Haneke par exemple ... tout en gardant la pièce maîtresse bien sûr : ce Casey Affleck qui déroute tout le monde. Rare, brillant<br /> et complexe.<br /> <br /> <br /> ( il m'a époustouflé dans les 2 scènes de violence, son jeu est unique, c'est difficile à exprimer comme sensation ...) <br /> <br /> <br /> <br />
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S
<br /> <br /> Oui en effet, il est excellent dans ces deux scènes. J'ai également adoré quand il rend visite au fils du barman en prison, et qu'il en ressort avec un gros plan sur son visage et son petit<br /> sourire mesquin. Bref, j'ai beaucoup aimé le film, parfois un peu long mais je suis vraiment rentré à fond dedans. Peut-être que le fait que je n'ai pas lu le livre avant a aidé, c'est bien<br /> possible ! Par contre je ne sais pas si ça m'a donné envie de le lire, l'adaptation est fidèle ?<br /> <br /> <br /> <br />