Wow. Il y a des films comme ça qui nous bouleversent et nous éclatent la gueule alors qu'on l'avait pas prévu. Attention, cet article très subjectif va décrire avec précision toutes les émotions qui m'ont submergé pendant le visionnage de ce film. Il n'engage que moi. Annette est un sérieux concurrent pour occuper la première place de mon futur top 2022. Ça faisait longtemps que je n'avais pas été autant déstabilisé et subjugué par un film dont je n'avais aucune attente particulière. J'ai eu tellement de frissons, de sourires, de pleurs, de palpitations cardiaques... Les scènes, les personnages, les musiques vont rester gravées. Putain, ça fait du bien !
J'ai vu le film hier soir et j'ai toujours du mal à me remettre de mes émotions. Annette, c'est l'histoire de Ann et Henry. Elle, brillante cantatrice dans un opéra. Lui, comédien de stand-up forcené. Ensemble, ils gèrent à merveille leur popularité et leur vie amoureuse, jusqu'à l'arrivée de leur premier enfant : Annette.
Je ne sais pas si je trouverai les mots pour décrire ce film tant il est fou, hallucinant, endiablé. Voyez-le avant de lire cette critique.
Dès les premières minutes, un énorme sourire s'est affiché sur mon visage et j'ai ressenti une jubilation intense. La scène d'ouverture d'Annette donne directement le ton de la comédie musicale avec une chanson incroyable du groupe Sparks. L'ambiance sonore du film, d'ailleurs, est complètement folle et j'ai adoré le côté à la fois décalé et rock de l'ensemble des chansons du film.
"So may we start" fut pour moi une révélation, je n'avais jamais entendu cette chanson et elle m'a mis une grande claque. Comment expliquer ce que j'ai ressenti pendant ces cinq premières minutes ? Comment décrire la sensation de joie, d'euphorie - d'extase presque - que j'ai éprouvée lorsque j'ai vu Adam Driver et Marion Cotillard entrer en scène en chantant ? Le côté méta de cette introduction m'a comblé, puis les idées géniales s'enchaînent. Au bout de 15 minutes, je n'en pouvais déjà plus et je me demandais si le film allait pouvoir réaliser l'exploit de tenir ce rythme effréné sur la durée (2h20, quand même !). Les yeux écarquillés devant les décors incroyables, j'assiste à la présentation des personnages, poétique pour Ann et féroce pour Henry.
Les décors me font halluciner. Je bois chaque parole, je savoure chaque image, chaque idée de réalisation sortie du cerveau de Leos Carax. Je ris beaucoup lorsque le public réagit au stand-up d'Henry. Adam Driver est imposant, effrayant, monstrueux. Puis je crois, sans aucun mal, à cette histoire d'amour alors que le côté comédie musicale aurait dû la rendre factice. La musique "We love each other so much" est une merveille. L'accompagnement musical est somptueux et je n'avais pas ressenti un tel amour pour une chanson de comédie musicale depuis La La Land.
Je ne comprends pas ce à quoi j'assiste. Je n'ai jamais vu un seul film de Leos Carax. Je suis perdu, je suis ébloui par tant d'idées, de virtuosité. Les musiques traversent mon corps de frissons. Je me demande où ça va, si je vais être déçu par les 90 minutes restantes. Je sais qu'à ce moment précis, le soufflé peut retomber et me faire sombrer dans l'ennui. Et heureusement, ce n'est pas du tout ce qu'il se passe. Annette vient au monde.
La scène de l'accouchement, complètement lunaire, m'a achevé. La musique me charme, les paroles me font rire, les comédiens m'emportent dans une drôle de poésie hallucinante. Je ne comprends pas tant de génie, ça me dépasse totalement. Puis vient la naissance d'Annette et l'une des idées les plus folles du film : le bébé est une marionnette, mais les personnages n'y font pas attention. She's out of this world.
A partir de là, je me demande comment Leos Carax va pouvoir donner une âme à cette poupée, mais je comprends rapidement que ce personnage de carton va m'émouvoir comme s'il était fait de chair. Annette semble vivante, ses expressions sont incroyables. Etant moi-même père depuis quelques années, je projette mes filles sur cette poupée et je craque. Cette enfant n'est qu'un pantin, une perturbation dans la vie de ce couple qui va commencer doucement à dépérir. Et qui va trinquer ? C'est inévitable, Annette va sombrer. Vient alors l'une des séquences les plus dingues du film.
La petite famille se retrouve en pleine tempête, au beau milieu de l'océan. Encore une fois, je suis saisi par les décors et par la beauté des couleurs. La couleur verte qui semble si chère à Leos Carax est sublimée pendant 2h20 et il me vient en tête l'affiche du film, que je trouvais déjà magnifique avant même de découvrir le film. Puis vient le drame, et le film prend une tournure encore plus folle. Je suis déjà à terre, conquis par tout ce que j'ai vu, mais Annette continue de me faire chavirer avec une scène d'une beauté époustouflante...
C'est ma scène préférée. Le décor est si beau que j'ai du mal à en croire mes yeux. La lumière est exquise, le silence est merveilleux. Cette simple poupée, les yeux levés vers la Lune, me tord les entrailles. La voix de l'enfant me percute en plein coeur, puis Marion Cotillard revient. Fantomatique, terrifiante, obsédante, l'actrice est épatante. J'ai envie que le film ne s'arrête jamais, alors je regarde l'heure. Il ne reste plus qu'une heure. Quoi ? Déjà ?
Je poursuis mon visionnage, plus concentré que jamais. Annette me fait de la peine, je me sens vaguement débile d'éprouver tant de compassion pour une marionnette, mais je m'en fous. Puis, une fois de plus, Leos Carax montre ses talents de réalisateur dans une scène que je n'oublierai jamais. Si j'avais déjà été sidéré par tous les plans-séquences utilisés pendant la première partie, je reste sans voix face à ce travelling circulaire autour du personnage de Simon Helberg, plus émouvant que jamais. Ce "Excuse me one more time" me déchire. Le rythme de la scène est fou, le jeu de Simon Helberg est passionnant. Il y a tellement de force là-dedans !
Annette continue ensuite son incroyable déchaînement de cinéma et d'émotions, en réintroduisant de manière sublime et inattendue ce We love each other so much dans un décor des plus merveilleux. Mes yeux s'embuent.
Les chansons défilent, la tension augmente. Annette prend vie de plus en plus, elle s'affirme, elle prend une ampleur démentielle. Puis vient ce final et la dernière chanson. Annette nous apparaît enfin comme un être humain avec des émotions, une sensibilité. Elle crie son désespoir ; elle est détruite. Et là, je pleure. Now, you have nothing to love. Goodbye, Annette.
A l'apparition du générique final, je respire enfin. C'est comme si mon souffle avait été coupé pendant 2 heures. L'équipe du film revient pour clôturer la séance, dans une atmosphère théâtrale exquise. Une voix m'indique que si j'ai apprécié le film, je dois en parler à un ami ou un inconnu le soir-même. Alors voilà, je n'ai pas d'amis qui lisent ce blog, mais si je peux toucher quelques inconnus avec mes mots et mon émotion : voyez ce film. Il est incroyable.