La réplique du dimanche #6 - "Please !" - Manchester by the sea

La réplique du dimanche #6 - "Please !" - Manchester by the sea

     J'avais entamé cette idée en 2022 puis, après seulement 5 articles, j'ignore pourquoi je me suis subitement arrêté de sortir ma "réplique du dimanche". Plus d'un an après, je décide de reprendre cette habitude qui me semble intéressante : le principe est de venir parler d'une réplique de film qui m'aurait marqué pendant ma vie de cinéphile, afin d'évoquer la puissance d'un dialogue, le génie d'un acteur ou d'une actrice, la beauté d'une narration, etc.

 

     Ce dimanche, j'avais envie de parler d'une réplique constituée d'un unique mot : celui de Casey Affleck dans Manchester by the sea. Attention, cet article va spoiler un élément important.

 

     A la 63e minute de Manchester by the sea, après son interrogatoire, le personnage joué par Casey Affleck (Lee Chandler) s'empare de l'arme d'un policier et tente de mettre fin à ses jours en collant le pistolet contre sa tempe. Heureusement, le revolver n'est pas chargé (ou la sécurité est enclenchée) et il rate son coup. Alors que les forces de l'ordre ainsi que sa famille tentent de le maîtriser pour lui faire lâcher l'arme, Lee se débat et lâche un "Please" qui me déchire à chaque fois. Je vous propose de revoir cette scène :

 

Please !

      Cette scène est probablement l'une des plus marquantes du film et, si le blog avait été actif l'année où j'ai découvert Manchester by the sea au cinéma, il est certain qu'elle aurait figuré dans mon "top 20 des scènes qui m'ont marqué en 2016". Etant moi-même père depuis quelques années, je ne peux qu'oser imaginer la douleur, la détresse et la culpabilité qui rongent Lee Chandler à ce moment précis. Le personnage est plus bas que terre, il n'entrevoit aucune autre possibilité que celle-ci : en finir avec sa vie pour ne plus souffrir. Lorsque cette occasion lui est donnée en croisant l'agent de police, il n'hésite pas une seule seconde et succombe à son impulsion. Un quart de seconde, le spectateur se demande pourquoi il saisit cette arme, mais il ne faut pas longtemps avant de comprendre l'objectif déprimant de ce geste. 

 

     J'ai vu Manchester by the sea il y a 8 ans et, il y a 8 ans, je devenais père. Aujourd'hui, je n'ai toujours pas revu ce film car j'ai peur de trop ressentir, d'être encore plus dévasté par les émotions de ce personnage qu'il y a 8 ans. Il y a quelques films comme ça, comme First Man ou Alabama Monroe, que je n'ose pas revoir car j'ai peur de ne pas supporter émotionnellement certaines choses. Ce "Please" de Lee, qui veut donc dire "S'il vous plait, laissez-moi en finir", je me le repasse souvent sur Youtube parce qu'il me hante, parce qu'un frisson me parcourt le corps lorsque Casey Affleck déclame ce mot avec toute la puissance de la scène. Je n'ai même pas besoin de revoir le film ni de me remettre dans le contexte pour que ces quelques secondes d'imploration fassent monter mes larmes. La scène est rapide, efficace, elle ne force pas l'émotion et n'en montre pas trop puisqu'elle se coupe brutalement après ce "Please" pour montrer une mer agitée. Tout ceci rend d'autant plus forte la (tentative de) reconstruction de Lee pendant la deuxième moitié du film, c'est absolument magnifique.

 

     Encore hier, je lisais des critiques de Manchester by the sea qui décrivaient Casey Affleck comme un acteur fade et inexpressif, et je ne comprends pas ces remarques à son encontre, particulièrement dans ce film. Lee est détruit, il est vide. L'acteur traduit la psychologie de son personnage à merveille à l'écran, avec une incroyable finesse. Un grand film sur le deuil.

 

 

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