La réplique du dimanche #7 - "It tastes like ashes" - Melancholia

La réplique du dimanche #7 - "It tastes like ashes" - Melancholia

      Où sont passées les répliques cultes prononcées par des femmes ? Je me suis intéressé à cette question lorsque j'ai remarqué que, sur mes 6 premiers épisodes de la "réplique du dimanche", je n'ai mis en valeur que des répliques d'hommes. Dans le but de savoir si c'était moi qui avais un souci, j'ai vérifié plusieurs sites, plusieurs "tops de répliques cultes du cinéma" et je vous le donne en mille : il existe assez peu de répliques cultes prononcées par des femmes dans ces classements. Prenons un top 100 au hasard : j'ai pioché sur Google et je suis tombé sur ce lien : 100 répliques cultes par le GQ Magazine. Sauf erreur de ma part, 94 répliques sur 100 sont issues de figures masculines. Je ne vais pas jeter la pierre à ce site (que je ne connais pas, par ailleurs), car j'ai conscience que le problème ne vient pas de ceux ou celles qui sélectionnent les répliques pour leurs tops, mais de tout un tas de problèmes de représentation de la femme au cinéma depuis la nuit des temps, qui font que les répliques cultes sont, de fait, majoritairement attribuées à des personnages cultes du cinéma et donc, malheureusement, à des hommes. Alors oui oui, je sais, on va me dire "Mais Sebmagic, tu débarques ! Ca fait des décennies que c'est comme ça et c'est seulement maintenant que tu t'en rends compte !". Arrêtez de m'embêter. 

 

    Toujours est-il que j'aimerais rectifier un peu le tir car, même si je ne suis pas nécessairement dans une volonté de tout calculer à 50/50, je pense qu'il est primordial de mettre à l'honneur sur ce blog quelques grandes actrices à travers plusieurs répliques qui m'auraient marqué dans ma cinéphilie. Les prochains épisodes de ces "répliques du dimanche" seront donc consacrés à des figures féminines, car les femmes ont également leur lot de répliques cultes ou frappantes, comme nous allons le voir ici.

 

     Nous commençons avec Kirsten Dunst qui, dans le film Melancholia de Lars von Trier, est totalement bluffante, hantée par la dépression de son personnage. La scène ci-dessous, que je vous invite à revoir dans une qualité honteusement dégueulasse (240p, j'en suis navré, je n'ai rien trouvé d'autre), m'avait marqué à l'époque pour le jeu sidérant de l'actrice qui donne au personnage de Justine une aura de négativité presque contagieuse. C'est d'autant plus saisissant que Lars von Trier se range clairement du côté de Justine, ce qui n'est pas surprenant lorsqu'on connait la filmographie du réalisateur ; filmographie guidée par le pessimisme le plus total.

 

It tastes like ashes.

      Dans Melancholia, Kirsten Dunst est clairement l'atout numéro 1 au niveau du casting. Même si Charlotte Gainsbourg vient créer une belle opposition dans la peau de Claire, c'est bien Kirsten Dunst qui vole chaque scène, incarnant une femme dont la noirceur n'a d'égale que la froideur. Justine est l'incarnation de la dépression et, bien qu'elle soit très sèche et injuste envers sa sœur, il est difficile de ne pas entrer en empathie avec elle lorsqu'elle montre à quel point son âme a touché le fond du pessimisme.

 

      Dans cette scène, c'est donc avec une allure presque fantomatique que le personnage vient ternir malgré elle un dîner qui semblait pourtant savoureux. L'actrice est parfaite pendant toute la scène : qu'il s'agisse de sa démarche malade, de sa posture recroquevillée et faible, puis de sa grimace de dégoût à peine dissimulée lorsqu'elle mâche le pain de viande. Vient alors la réplique qui me donne des frissons à chaque fois que je vois le film : "It tastes like ashes", soit "Ça a un goût de cendres". En une seule réplique, suivie des pleurs les plus plombants auxquels j'ai pu assister dans une salle de cinéma, Kirsten Dunst montre à quel point son personnage n'a plus goût à rien, pas même à la vie, tout en faisant un parallèle avec la fin du monde prophétisée tout au long du film. Ce n'est pas tant le plat qui a un goût de cendres. C'est l'humanité toute entière. Par ce biais, le cinéaste en profite (via Justine, qui est un peu porte-parole de Lars von Trier dans ce film) pour asséner encore au spectateur l'idée que l'humanité est profondément perdue. Ashes to ashes.

 

     Cette scène est peut-être l'une des moins spectaculaires de Melancholia car il ne s'agit que d'une situation de repas, filmée caméra à l'épaule, mais cette séquence est si sombre et si déprimante qu'elle m'est restée en tête, même 10 ans après avoir vu le film pour la dernière fois. Je conclus cet article en vous conseillant de voir ce chef d'œuvre si ça n'a jamais été fait, même si je pense qu'il est prévu pour un grand écran avec un son surpuissant.

 

 

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