Délivrance - de John Boorman - Critique

Délivrance - de John Boorman - Critique

      Si c'est pour continuer de découvrir des pépites de ce genre, je ne suis pas prêt de mettre un terme à ce petit jeu du samedi (à condition que le principe ne vous lasse pas) ! Délivrance m'a été proposé par Damien, que je remercie pour la découverte. Ce film de 1972 ne m'avait jamais particulièrement attiré même si je connaissais un peu sa réputation, et je suis ravi d'avoir comblé cette lacune. C'est un film brutal, presque bestial, qui a clairement inspiré de nombreuses œuvres cinématographiques telles que Voyage au bout de l'enfer, sorti six ans plus tard, ou même Mean Creek que j'ai revu récemment et dont j'ignorais les similitudes avec ce film de John Boorman.

 

Délivrance - de John Boorman - Critique

     L'histoire est assez simple : il s'agit d'une bande de 4 hommes qui décident de descendre une rivière pour la dernière fois avant que ce ne soit plus possible, puis que l'inondation de la ville et de la vallée est en projet. Malheureusement, cette virée en canoë au coeur des rapides vire au cauchemar suite à une mauvaise rencontre... Je ne donnerai pas beaucoup plus de détails sur la suite car Délivrance nous prend par surprise avec une violence inattendue ; je ne pensais pas que le film serait si éprouvant si rapidement.

 

     L'intrigue commence assez tranquillement avec la présentation des personnages : une bande d'amis plutôt insouciants, comme on pouvait l'être dans les années 70, qui partent à l'aventure ensemble malgré leurs personnalités toutes différentes. Menés par Lewis, un homme rustre dont la philosophie est basée sur un retour de l'Homme face à la nature, ils abandonnent leurs voitures à des types qu'ils ne connaissent pas, mais à qui ils font confiance pour ramener leurs véhicules dans une autre ville en contrebas, étape finale de leur descente. Avant ça, on a droit à une séduisante scène musicale au banjo qui m'a filé un grand sourire. Tout semblait démarrer dans le meilleur des mondes (enfin, avant que la séquence ne devienne plus sombre et qu'on comprenne qu'il y a des histoires de consanguinité).

 

Délivrance - de John Boorman - Critique
Délivrance - de John Boorman - Critique

       Délivrance offre plusieurs scènes que j'ai trouvé très intéressantes, comme la manière avec laquelle la rivière nous est dévoilée pour la première fois. Les personnages mettent un certain temps avant de la dénicher, comme un trésor caché au milieu de la forêt, et sa première apparition est lumineuse et scintillante. J'ai beaucoup aimé le fait qu'elle nous soit révélée à la façon d'un coffre rempli d'or, devant lequel Lewis et Ed s'émerveillent.

 

Délivrance - de John Boorman - Critique

       Passée cette scène, tout ce qui suivra ne laissera plus aucun répit aux personnages, dans une histoire de traque, de vengeance, de chasse à l'homme qui laissera des séquelles à chacun d'entre eux de manière différente. Le personnage de Lewis est antipathique malgré son efficacité, j'ai cependant adoré son côté instinctif et l'idée de lui avoir collé un arc et des flèches pour le rapprocher de l'homme primitif. Burt Reynolds est excellent dans le rôle. De plus, le thème de la chasse permet de rapprocher Délivrance de The Deer Hunter, dans l'idée qu'il est difficile de passer à l'acte, et que les personnages vont traverser des épreuves qui vont les traumatiser.

 

Délivrance - de John Boorman - Critique

      J'ai, ceci dit, davantage été sensible au personnage de Jon Voight, qui porte une grande partie du film sur ses épaules. C'est la première fois que je découvre l'un de ses rôles étant jeune, je suis davantage habitué à ses films récents. L'acteur est parfait du début à la fin, notamment lors de la séquence de l'agression, mais aussi lors d'une autre scène (ci-dessous) dont j'ai apprécié l'angle de vue.

 

Délivrance - de John Boorman - Critique
Délivrance - de John Boorman - Critique

      Pour conclure, je dirais que la force de Délivrance réside dans ses ambiances sonores qui résonnent de manière obsédante. Il y a un vrai travail du son, au-delà de la musique très sombre, qui permet de créer une atmosphère assez glaçante. Je pense par exemple au moment où Ed crie "Drew !" plusieurs fois et que son appel résonne dans la forêt de manière très étrange et angoissante. L'effet est saisissant.

 

Délivrance - de John Boorman - Critique

     Je remercie à nouveau El profe de español pour m'avoir poussé à voir Délivrance car, à part plusieurs exceptions comme justement The Deer Hunter, la décennie 1970 est celle qui me parle le moins au cinéma. J'ai retrouvé de nombreux aspects du film de Cimino dans celui-ci (le thème de la chasse à l'homme, des traumatismes face à la cruauté, de la bestialité de la nature humaine) et ça m'a beaucoup plu. Je réfléchis encore quelques jours avant de l'intégrer à mon top 500, mais je pense que ça se fera.

 

 

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T
Je trouve au contraire que la narration épouse assez bien le ressenti du personnage, le côté pénible de la Foi, ses questionnements et comment faire face aux tourments en se repliant sur soi, Une vie cachée utilise ce procédé, la seule différence c'est le réalisateur qui est derrière et la c'est une question de sensibilité.<br /> D'ailleurs on a une possible date de sortie pour The way of the wind, il serait présenté à Cannes l'année prochaine, on voit enfin la lumière après 3000 heures de rush et 6 années de montage.
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S
Sérieux ? C'est une excellente nouvelle ça !<br /> J'ai aussi hâte d'en savoir plus sur le Resurrection de Mel Gibson.
T
Et là où je sais que ce n’est pas propre au réalisateur c’est que j’ai eu le même rejet avec Silence de Scorsese, même si là ça se passe à Macao ça reste la meme culture, la même architecture. <br /> J’avais apprécié l’autre facette du cinéaste avec une réalisation beaucoup moins frénétique qui colle au propos du film mais je ne suis jamais véritablement rentré dedans.
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S
Je n'ai pas aimé non plus Silence, mais je rejetterai la faute sur la narration. Le pire Scorsese que j'ai vu je crois, c'était chiant et répétitif !
T
Moi c’est pas tant une décennie en particulier mais plus un type de cinéma, je vais peut-être en choquer plus d’un en disant ça mais Kurosawa période médiévale du Japon j’accroche pas, j’ai aucun reproche à faire sur la réalisation ou sur l’aspect plastique des films mais c’est juste que la période ne m’intéresse pas, la localisation non plus et du coup c’est dur de se plonger dans les histoires. <br /> C’est trop exotique pour moi du coup je fais un rejet, c’est un peu con.
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S
Chacun ses goûts ! C'est pas forcément con, d'ailleurs j'ai été déçu récemment par Les Sept Samouraïs donc je comprends tout à fait ! Pourtant ce pays et cette époque me passionnent contrairement à toi.
T
On a tous des périodes ou des cinémas qui nous rebute un peu, je trouve ça normal. <br /> <br /> Cimino était un génie qui s’est brûlé les ailes en s’approchant trop près du soleil, le mec t’as fait Voyage au bout de l’enfer alors que c’était que son 2e film, je me suis refais La porte du paradis il y’a pas longtemps et j’ai été pris d’une très forte mélancolie en réalisant que non seulement c’était la fin d’une époque mais que jamais on retrouvera des films comme ca. <br /> <br /> Altman je mentirais si je disais que j’ai tous aimé surtout que je n’ai pas tout vu mais mon préférer c’est The Player où il tacle tout le système Hollywoodien avec plaisir, pour le reste Mash c’est assez marrant sans plus, Nashville j’avais pas accroché, Short Cuts le concept est cool et Le privé j’étais passé à côté. <br /> <br /> Après si c’est le son ou la qualité de l’image qui te fait peur y’a toujours le support 4K mais c’est un budget c’est toujours le même problème.
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S
Je ne suis pas sûr que ce soit la qualité mais plutôt le côté brut et terne qui me gêne. J'ai du mal à identifier d'où vient la réticence en fait, mais dès que je vois des tons gris, ou des voix mal mixées, ça me donne envie d'arrêter. <br /> <br /> Je n'ai jamais vu M*A*S*H par exemple mais c'est volontaire, dès que j'en vois des images je sens que ce n'est pas pour moi. Un jour peut-être, je trouverai la motivation... Pourtant j'ai de nombreux films des années 70 qui sont des chefs d'oeuvre à mes yeux (suffit de voir le titre du blog...). <br /> <br /> Et toi, quelle est la décennie qui t'inspire le moins ?
T
Ohlala, je t'invite à regarder aussi Le point de non-retour où Boorman fait basculer le cinéma américain dans l'ère du Nouvel Hollywood (la meilleure période du cinéma US) mais surtout son chef d'œuvre Excalibur avec un imaginaire du conte assez fou, peut-être kitsch ou baroque par moments mais tellement beau.<br /> <br /> Et creuser la filmo de tous les réalisateurs qui ont peuplés cette période Altman, Friedkin, Lumet, Hopper, Hashby et son fossoyeur Cimino, impossible de tous les cités mais la liberté artistique des réalisateurs de cette période nous a donné une décennie incroyable qui manque beaucoup.
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S
Et puis merde, je suis tellement ignare que j'ai confondu Altman et Aldrich, c'est pitoyable.
S
Oui, je sais que c'est une grosse lacune de ma part mais ça me fait un peu peur... Cimino me tente (La porte du Paradis me fait de l'œil depuis plusieurs années) mais je redoute la déception. J'ai tenté un Altman cette année (L'ultimatum des trois mercenaires) et je l'ai adoré, donc pourquoi pas.<br /> <br /> En fait je ne sais pas d'où me vient cette idée que le côté kitsch des années 70 ne me plait pas, alors que de nombreuses œuvres m'ont prouvé le contraire. J'ai toujours à l'esprit ce visuel gris et terne du type "Le prisonnier" (alors que j'ai pourtant savouré cette série à l'époque ! Tout ça est très paradoxal).<br /> <br /> Bref, tout ça pour dire que je ne vais pas de moi-même vers les années 70, heureusement que certains d'entre vous m'y contraignez ;)
E
Content de voir que tu aies apprécié ce film. Le choix de la décennie était quelque peu volontaire car de mon côté c'est une décennie que j'apprécie beaucoup (et qui correspond à ce que l'on appelle communément "le nouvel Hollywood") et j'avais remarqué qu'elle n'était pas tant représenté dans ton top 500.
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S
Exact, je ne sais pas ce qui me pose problème avec cette décennie, généralement c'est le côté un peu cheap du son (notamment les voix), mais ça peut aussi être les couleurs que je trouve souvent dégueulasses. Ceci dit je ne connais pas suffisamment pour me permettre de généraliser... Merci encore en tout cas !