Agnès vient d'avoir 16 ans et sa vie à l'école n'est pas simple. Peu populaire, elle passe son temps à tenter d'éviter le contact avec les autres, tout en devant gérer ses parents qui s'inquiètent légitimement de la situation. Un jour, elle va se lier avec Elin, une fille d'une autre classe dont elle est secrètement amoureuse. Fucking Åmål est un très joli drame marqueur d'une époque, sensible et passionnant.
J'ai adoré découvrir ce petit bijou de sensibilité dont j'entends parler depuis si longtemps. Sorti il y a 25 ans, ce film dano-suédois est témoin d'une époque (malheureusement pas totalement révolue...) à laquelle les stéréotypes sur l'homosexualité sont exacerbés (avec notamment de mauvaises blagues sur le sida, des insultes, du rejet, des grimaces de dégoût). Les élèves sont ici constamment jugés avec immaturité, principalement sur leur sexualité mais pas seulement : on suit également une jeune fille handicapée qui souffre de n'avoir aucune vie sociale. Le film se concentre sur la rencontre entre une jeune fille mal-aimée et une autre, plus populaire. La première vit dans un mal-être permanent car elle est sujette aux rumeurs et aux humiliations, et la deuxième peine à laisser exprimer ses sentiments parce qu'elle a peur de basculer du côté des opprimées.
Fucking Åmål a clairement inspiré des œuvres plus récentes comme Heartbreaker en traitant des thèmes importants de l'adolescence : la rébellion contre les parents, la quête d'identité (sexuelle mais pas seulement), le harcèlement, la cruauté de certains jeunes qui peuvent pousser au suicide, le passage à l'âge adulte, les premiers émois amoureux et sexuels. Fucking Åmål parvient à aborder tous ces thèmes sans aucune fausse note, avec deux personnages féminins parfaitement écrits : cette relation naissante est nuancée et fascinante, tout comme la psychologie de chaque personnage (même les plus cruels).
Les deux actrices Alexandra Dahlstrom et Rebecca Liljeberg sont exceptionnelles, il est extrêmement facile d'entrer en empathie avec Elin et Agnès, auxquelles on a envie de crier notre désir de les voir assumer leur personnalité et leurs sentiments au grand jour. Plus facile à dire qu'à faire, surtout lorsque sa propre sœur se range du côté des bourreaux (Erica Carlson, d'ailleurs, est également stupéfiante dans son rôle)... Cependant, se confronter à leur réalité sera leur seule manière de s'épanouir et de vivre réellement heureuses.
Si vous ne l'avez jamais vu, je vous conseille donc la découverte de Fucking Åmål qui, en plus d'être magnifique sur le fond et la forme, dure seulement 1h20. Pour ne rien gâcher, l'atmosphère 90's ajoute un plus : entre veste Fila ou pull Puma, des téléphones portables rudimentaires, des sorties nocturnes qui n'inquiètent pas vraiment les parents. Tout est concentré, aucune scène n'est inutile et le film prend le temps de développer ses personnages. C'est brillant.