Après m'être remis de mes émotions suite au visionnage de La communauté de l'anneau, c'est les yeux remplis de magie que j'ai continué mon marathon - ou devrais-je dire mon aventure - à 15h avec Les deux tours. Cet article va être long car je vais évoquer ici tous les moments forts du film... qui dure 3h40 et qui est majoritairement composé de temps forts. Mais parler du Seigneur des Anneaux et de l'effet que cette trilogie a sur moi, c'est une passion.
Pour lire mon précédent article sur La communauté de l'anneau, c'est par ici :
Peter Jackson entame Les Deux Tours avec un flashback : celui de la chute de Gandalf sur le pont de Khazad-dûm.
J'aime particulièrement l'idée de faire surgir la caméra depuis l'extérieur de la montagne. Après un bref survol des somptueux paysages de la Nouvelle-Zélande, la caméra pénètre dans la roche par un petit trou, comme un papillon qui viendrait assister à la scène d'un autre point de vue. L'introduction de ce second volet, à première vue, ressemble à un rappel des événements du premier, mais on comprend assez vite que Peter Jackson veut nous emmener ailleurs en nous montrant la chute du magicien en entier. Le réalisateur nous remet directement dans le feu de l'action tout en nous révélant une information importante (Gandalf n'est pas mort, et il est même complètement badass face au Balrog), puis la séquence s'achève sur un plan désarmant de beauté. La musique Foundations of Stone apporte un souffle épique absolument dingue à la scène, avec cette lente descente que Peter Jackson a l'intelligence de filmer de loin. C'est magnifique.
Cette introduction dantesque est montrée comme un rêve de Frodon, qui se réveille brutalement et permet à l'intrigue de reprendre son cours là où on l'avait laissée. La transition est parfaite. Je vais tenter de ne pas me répéter au cours de cet article, mais le montage des Deux tours est exceptionnel. Peter Jackson alterne entre plusieurs temporalités différentes et tout est fait avec une grande fluidité alors que ça a dû être un casse-tête monstrueux à l'écriture. Presque chaque coupure est faite avec une transition logique et simple, généralement à travers un personnage qui évoque ce qui nous sera montré dans la scène suivante.
Gollum intervient très rapidement en début de film et l'incrustation du personnage est toujours aussi impressionnante 22 ans plus tard. Malgré sa texture numérique, Gollum est presque palpable et il s'intègre à la perfection dans l'aventure. Peter Jackson, de plus, prouve encore ses talents de mise en scène avec des prises de vue originales et cette caméra toujours en mouvement, comme lorsque la créature descend doucement vers les Hobbits endormis.
Quelques sublimes paysages plus tard (dont ce plan superbe sur la tour de Barad-dur face à la Montagne du Destin), le film nous mène vers un monde que nous ne connaissons pas encore : celui des Hommes. On découvre le Rohan et sa sombre situation : celle d'un roi malade et contrôlé par la noirceur d'un Grima répugnant, qui transpire le vice et la perfidie. Howard Shore nous régale d'un nouveau thème musical réservé au Rohan, avec The King of the Golden Hall, l'une des plus belles compositions de ce deuxième volet.
Un troisième personnage féminin très fort nous est également présenté : Eowyn, la nièce de ce roi sous emprise. Eowyn est un personnage important de la trilogie, une preuve de plus que Le Seigneur des Anneaux, s'il est majoritairement masculin à cause de son univers de guerres médiévales, prend tout de même soin de développer quelques héroïnes fascinantes. Son rôle sera même capital lors de la bataille de Minas Tirith dans le 3e volet en attribuant aux femmes une valeur supérieure face au Roi-Sorcier d'Angmar.
Suite à cette séquence, on s'intéresse au trio Aragorn-Legolas-Gimli qui apporte un peu d'humour, mais aussi beaucoup d'aventure dans leur chasse pour retrouver Merry et Pippin. Quelques plans sont somptueux en terme de lumière.
Lorsqu'Aragorn retrouve la piste des deux Hobbits après une séquence pleine d'émotion (et un orteil cassé pour Viggo Mortensen), une habile transition est faite pour rejoindre Merry et Pippin dans la forêt de Fangorn, afin de découvrir ce qui leur est arrivé. L'introduction de Sylvebarbe est impressionnante et, une fois de plus, les effets numériques n'ont pas pris une seule ride. L'Ent est imposant avec sa voix caverneuse. Par contre, et c'est probablement le seul souci des Deux tours, l'arc de Merry-Pippin-Sylvebarbe est un poil trop étiré sur la longueur. On sent que Peter Jackson a eu quelques difficultés pour insérer les diverses séquences, qui ressemblent parfois à des scènes pour combler les trous et pour ne pas oublier les deux Hobbits, surtout dans la version longue. Mais ça passe, car Merry et Pippin apportent un peu d'humour et de légèreté face au sérieux de cet opus.
L'intrigue revient ensuite sur Frodon-Sam-Gollum, et j'adore ressentir à quel point ce trio est totalement à part dans l'histoire. Leur parcours semé d'embûches et de dangers est le plus passionnant d'entre tous, même si j'ai souvent entendu des spectateurs critiquer les séquences centrées autour d'eux. Certains trouvent que l'arc de Frodon est chiant, alors que je le considère profondément palpitant. La relation entre Frodon et Sam se détruit à mesure que l'anneau s'empare de Frodon, chose que Gollum parvient à merveille à tirer à son avantage. Les paysages, la lumière, les couleurs, les atmosphères : tout ça est si beau à l'écran !
Alors qu'une grande bataille se prépare pour le Rohan, le retour de Gandalf, passé de Gris à Blanc, est un soulagement pour les personnages comme pour le spectateur. La séquence lors de laquelle il libère le Roi Théoden de l'emprise de Saroumane montre l'immense force de Gandalf.
D'un point de vue scénaristique, les stratégies mises en place par Tolkien pour écarter le magicien le plus possible des différentes intrigues sont plutôt astucieuses. En effet, il aurait été trop simple de se servir de la puissance de Gandalf pour aider nos héros trop souvent, c'est pourquoi le personnage est régulièrement mis à l'écart pour diverses missions individuelles. Après le Balrog, Gandalf se mettra donc en quête d'aller chercher l'armée des cavaliers Rohirrim. "Attendez ma venue aux premières lueurs du 5e jour. À l'aube, regardez à l'est."
Je passe rapidement sur la séquence de la Porte Noire qui, à chaque visionnage, me gêne toujours un peu plus. Si le plan sur la Porte Noire est magnifique visuellement (encore un sens affûté des perspectives de la part de Jackson), j'ai un peu de mal avec les incohérences de ce passage. Je ne sais pas s'il s'agit d'un problème de montage ou simplement de positionnement de la caméra, mais quelque chose cloche lorsque Frodon et Sam se cachent sous la cape : il est absolument impossible que l'ennemi qui vient vers eux n'ait rien vu, car il se tient littéralement à quelques pas des deux Hobbits.
La suite du film nous montre les différentes stratégies mises en place par Théoden et Aragorn pour affronter les deux armées qui les menacent. Théoden est rongé par la rancœur et on comprend que la race des Hommes est divisée en deux camps : Rohan et Gondor. La confrontation entre Aragorn et Théoden (ce dernier semble croire qu'Aragorn veut gouverner à sa place) montre l'ego de ce Roi qui, en plus de devoir faire face à l'attaque la plus menaçante de son règne, doit gérer le deuil de son fils.
Les Hommes seront attaqués par les Deux Tours : l'armée de Saroumane (la Tour d'Orthanc) et celle de Sauron (la Tour de Barad-dur), ce qui rend leur position délicate car ils sont pris en étau entre les deux armées. Dans le même temps, Peter Jackson nous octroie quelques moments de rêverie et de poésie avec le retour d'Arwen à l'écran.
On a alors droit à l'une de mes musiques préférées de ce volet : Evenstar, composée par Howard Shore avec la voix sublime d'Isabel Bayrakdarian. A chaque fois que j'écoute cette musique, une intense vague d'émotion et de frissons me submerge. C'est comme le calme avant la tempête : un moment de répit avant cette bataille au Gouffre de Helm qui sera éprouvante.
A partir de là, Les deux tours cherche à nous faire croire qu'Aragorn va se retrouver au centre d'un triangle amoureux, coincé entre Arwen dont l'image semble s'évaporer, amour impossible qu'Aragorn vit de façon tragique, et Eowyn qui incarne le courage et la détermination.
Heureusement, cette idée de triangle amoureux ne sera jamais développée car Aragorn restera éternellement fidèle à sa dulcinée, sans jamais donner de faux espoirs à Eowyn. Tout ceci permet à Aragorn de se montrer encore plus honnête et droit que jamais aux yeux du spectateur. C'est un homme solide, un homme de valeur.
En guise de transition pour revenir vers Frodon et Sam, une discussion nocturne entre Aragorn et Gandalf permet de faire le lien entre tous les personnages. On ne perd jamais de vue le fait que Frodon est leur unique chance de détruire Sauron, et que toutes les batailles menées par les armées ne sont que des moyens de gagner du temps. Cette conversation permet de justifier qu'Aragorn et Gandalf ne perdent jamais espoir, là où le reste des soldats, ainsi que le Roi lui-même, semblent abandonner toute idée de victoire. C'est Aragorn qui redonne espoir en ses troupes, et c'est le seul capable de le faire. En se raccrochant à l'idée folle selon laquelle Frodon avance dans sa quête et se rapproche de son but, il incarne l'espoir et prend de plus en plus une posture de Roi.
J'adore le fait que tout repose sur ces deux Hobbits de manière secrète, et que l'intrigue de Frodon et Sam soit toujours indépendante du reste. A part leur rencontre avec Faramir, qui servira de preuve pour affirmer que les deux Hobbits sont toujours en vie afin d'engager le sacrifice final du 3e volet, Frodon et Sam sont livrés à eux-mêmes et n'ont jamais de contact avec les autres. Leur progression, lente et sûre, est montrée en parallèle des sacrifices et des combats menés de l'autre côté. Tout cela rend leur évolution et leur avancée encore plus poignantes, encore plus décisives. Des milliers de vies reposent sur leurs petites épaules.
Pour rester dans le thème de la dualité (Les deux tours / Le triangle amoureux / Le conflit Rohan-Gondor), le film se penche également sur la psychologie de Sméagol et sur sa double personnalité. Peter Jackson enchaîne les plans astucieux afin de montrer à l'écran la séparation Sméagol / Gollum, avec des reflets dans l'eau ou des angles de caméra opposés. Le tiraillement psychologique de Gollum rend le personnage très instable et inquiétant.
De même, le thème de la dualité se confirme avec l'introduction du personnage de Denethor et de ses deux fils. Grâce à un flashback, on comprend que les choix de Boromir et Faramir sont à imputer à la folie d'un seul homme : un intendant fou et assoiffé de pouvoir.
Puis, on entame la seconde partie de ce volet, et l'attente vaut le coup, car Les deux tours s'engage alors dans une heure d'action permanente qui ne laisse quasiment jamais respirer le spectateur. On assiste en simultané à deux grandes batailles : celles du Gouffre de Helm et d'Isengard. Il s'agit de pur spectacle, de pure émotion, de pure action. Une maestria de cinéma qui explose à l'écran.
Juste avant d'entamer les hostilités, Peter Jackson prend le temps d'imposer cette attente interminable pour les personnages. On a droit à de longs moments de silence lorsque les soldats se tiennent prêts pour un affrontement sans merci. Sans aucune musique, on entend l'armée ennemie approcher au pas, on la voit arriver doucement de loin, et c'est extrêmement efficace en terme de tension et de suspense.
La bataille du Gouffre de Helm est indiscutablement le temps fort de cet épisode, Peter Jackson a mis en œuvre des moyens phénoménaux pour arriver à un tel résultat, avec des séquences réunissant parfois plus de 700 figurants, mais aussi des costumes, des accessoires par dizaines de milliers, qui permettent à cette bataille d'être aussi crédible que possible. Tout semble authentique, d'autant qu'on a l'impression d'être immergés au cœur de l'action en permanence.
De l'autre côté, Merry et Pippin parviennent à remonter les Ents contre Saroumane et on assiste à l'une des scènes les plus épiques des Deux Tours : la Dernière Marche des Ents. Grâce à la musique d'Howard Shore Isengard Unleashed, je me retrouve à chaque fois submergé par l'émotion et l'intensité de cette armée d'Ents en quête de vengeance.
L'action est alors permanente dans les trois temporalités, empêchant au spectateur de souffler. D'un côté, la bataille du Gouffre de Helm est un déferlement de luttes et de combats, tout comme l'attaque des Ents devant la tour de Saroumane. Et du côté de Frodon et Sam, la tension est également au premier plan puisqu'ils se sont fait capturer par Faramir et se retrouvent, à leur tour, pris dans une attaque de Nazguls.
Après 30 minutes d'action et de tension permanente (quand même, il faut insister : UNE DEMI-HEURE de batailles d'une intensité dingue filmées avec la plus grande virtuosité), on arrive enfin à la lumière d'espoir : le retour de Gandalf. Peter Jackson nous livre alors, sans exagération, la scène la plus épique du cinéma. Jamais égalée en terme de puissance.
Je ne sais même pas comment décrire les frissons et les tremblements que mon corps est capable de produire lorsque Gandalf, suivi par une armée de Rohirrim, s'élance et charge dans une lumière éclatante. Tout est parfait dans cette scène, elle est l'aboutissement de 30 minutes de combats durs et féroces, elle vient libérer le spectateur d'un désespoir naissant face à cette armée d'Hommes et d'Elfes qui périssent, et à cette défaite qui s'annonçait.
La réalisation de Peter Jackson est une pépite, du cinéma à l'état brut, les mouvements de la caméra viennent intensifier l'attaque des Rohirrim avec des plans larges qui donnent beaucoup d'ampleur à l'ensemble, et une lisibilité de l'action éblouissante. En plus de cette mise en scène magnifique, la scène nous emporte grâce à l'immense musique Forth Eorlingas de Howard Shore qui est d'une puissance hallucinante. Rien que d'en parler, je vibre à nouveau.
Dans le même temps, comme si ça ne suffisait pas, les Ents rasent Isengard en débloquant le barrage et, là aussi, la mise en scène de Peter Jackson est juste somptueuse, comme en témoigne l'image ci-dessus qui montre Saroumane affolé en haut de sa tour au premier plan, et le barrage qui s'effondre en arrière-plan. C'est brillant.
Et dans le même temps, comme si ça ne suffisait toujours pas, l'arc de Frodon-Sam-Gollum a également droit à sa scène épique, avec une séquence au ralenti montrant Frodon qui baisse les bras face à l'ennemi. Au moment même où le monde entier utilise ses dernières forces pour vaincre le Mal, leur seul espoir est prêt à abandonner et à livrer l'anneau sur un plateau. La scène est... pfiouf. D'une beauté monstrueuse.
C'est alors que Sam vient sauver Frodon pour empêcher le drame, et là...
Là, on comprend que l'anneau s'est emparé de Frodon, car il commence à devenir fou. On assiste alors à ce qui est, à mon goût, de loin la meilleure scène de ce 2e volet : le discours de Samwise Gamegie. Que cette scène est belle, bon sang ! Sam tente de convaincre Frodon qu'il reste de l'espoir, en lui rappelant les contes de leur enfance, faits de héros qui n'abandonnent jamais face à la misère du monde, et toute la séquence est une merveille d'émotion. Impossible, à ce moment, de ne pas lâcher toutes mes larmes, d'autant que Peter Jackson agrémente le discours de Sam d'images provenant des autres camps. A mesure que Sam raconte avec émotion son histoire, on aperçoit les victoires au Gouffre de Helm et à Isengard, rendant la scène encore plus forte, plus poignante, mais surtout universelle. La musique, Samwise the Brave, est une putain de merveille. Que c'est beau, bordel.
Cette scène vient achever, après 3 heures de tension et d'action, un film épique et maîtrisé de A à Z. C'est de l'émotion à l'état brut. Peter Jackson vient de nous mettre une claque avec 45 minutes d'action pure et dure, puis il nous termine avec une puissance émotionnelle qui dépasse tout ce qu'il est possible d'imaginer. Oui, j'utilise beaucoup de superlatifs, mais je m'en fous : la conclusion des Deux Tours est brillante, c'est du génie dans la narration, dans la mise en scène, dans l'utilisation de la musique. Et puis l'image, les couleurs, les décors, tout est somptueux.
L'émotion retombe ensuite lorsque les personnages reprennent leur esprits et se souviennent du long périple qu'il leur reste à parcourir. Les deux tours se conclut dans une grande inquiétude à propos de Gollum : que prépare ce personnage ? De quoi est-il capable ? Et surtout, comment Sam va-t-il pouvoir gérer la folie de Frodon qui n'est plus capable de distinguer le vrai du faux ? La dernière image du film donne une idée du chemin qui reste à parcourir.
La musique Gollum's Song vient accompagner l'apparition du générique, laissant le spectateur dans un état d'ébahissement total. Encore une fois, j'ai dû prendre une bonne heure de pause avant d'enchaîner sur Le retour du Roi, afin de laisser mes émotions retomber tout doucement. Un pur chef d'œuvre.
Pour la suite (et fin) de ce marathon, c'est par ici :