"
Les films : outil de culture" : je crois que pour l'instant, à part
Marie-Antoinette qui m'a vraiment fait naître un certain intérêt pour l'Histoire de France, aucun film présent sur ce blog ne mérite autant de figurer
dans cette communauté.

Encore une fois, le cinéma m'aura permis de m'intéresser à un sujet qui me
tire la tronche depuis longtemps : la peinture. Le pari du film était de montrer à quel point ce célèbre tableau est intrigant et pour ma part, ça a fait effet, complètement. Avant de voir le
film, je n'étais pas motivé plus que ça, car je n'étais pas vraiment attiré par le synopsis. Mais je me suis dit qu'avec toutes les éloges faites autour de ce film, avec l'intérêt historique
qu'il devait susciter et avec
Scarlett Johansson, tous les éléments étaient réunis pour me caler sagement au fond du mon fauteuil devant Arte
mardi soir.
Eh bien je peux vous dire qu'immédiatement après l'avoir vu, j'ai passé une heure sur Wikipédia à lire la biographie de
Vermeer et sur divers sites proposant des interprétations de ce tableau. Je ne connaissais rien sur ce peintre, si ce n'est son nom. Je ne connaissais
rien sur ce tableau, si ce n'est le visuel en lui-même. Je ne m'étais jamais retrouvé face à cette image plus de 20 secondes, ni demandé ce qu'elle pouvait éventuellement cacher. Puis j'ai
regardé le film et j'ai ressenti tout de suite ce frisson lorsque le générique de fin est apparu. Le film se termine en effet sur l'image de la toile originale,
La Jeune Fille à la Perle, avec cette jeune fille (femme ?) qui nous fixe de son regard étrange. Franchement, j'ai été sur le cul car mon regard sur
cette oeuvre a totalement changé. Avant de voir le film, vraiment, je ne voyais dans ce tableau qu'un simple portrait et je ne me rendais pas compte de toute l'histoire qui a pu y avoir derrière.
Oui, je sais, peut-être suis-je complètement débile (sacrebleu), mais je n'ai remarqué ça qu'hier (vaut mieux ça que jamais, peut-être). Depuis, je suis vraiment intrigué par cette jeune femme,
cette perle, ce regard qui nous fixe et qui nous pousse à nous demander "
Mais qui était-elle ? A quoi pensait-elle ? Que signifie ce regard ?".
Presque aussi puissant que la
Mona Lisa (et ce n'est pas pour rien que le tableau est surnommé
La Joconde du Nord), si ce
n'est plus.

Bref, pour en revenir au film en lui-même, je dirais que même s'il n'est pas toujours des plus passionnants (on a droit à plusieurs longueurs
notamment au début), il se démarque par son incroyable photographie, travaillée et soignée sur chacune des scènes. Cette ambiance qui nous donne presque l'impression d'être vértiablement dans
l'atelier du peintre. Une atmosphère qui ressemble trait pour trait à l'univers présent dans ses tableaux et qui donne une idée claire de l'endroit où
Vermeer travaillait, avec cette fenêtre sur la gauche qui revient régulièrement dans ses peintures. L'image est tellement incroyable, avec notamment ce
superbe travail sur la lumière, qu'on se croirait presque au coeur de ses tableaux.

Ensuite, la trame, bien que molle (mais ce n'est pas un défaut), est pertinente et
intéressante.
Tracy Chevalier, l'auteure du roman, a visiblement fait énormément de recherches pour nous offrir cette version des faits,
apparemment extrêmement fidèle au mode de vie de
Vermeer, sa famille, sa maison et ses problèmes d'argent. L'histoire de la chaise que
Griet déplace et que
Vermeer finit par supprimer de sa toile (pour
La Femme à la Cruche
d'eau) n'est pas anodine : il est vrai que des experts ont passé ce tableau aux rayons X et ont découvert que
Vermeer y avait
initialement peint une chaise avant de la supprimer. Ce fait historique est donc adapté dans le roman/film de façon crédible et intéressante. De nombreux détails sont à noter dans le film, on
voit notamment quelques portraits se dresser sous nos yeux, en temps réel, et c'est assez dingue de réalisme. Après une brève allusion à
La Dame au
collier de perles, le réalisateur nous offre la reconstitution de
La Jeune Femme à l'aiguilière et, bien sûr,
de
La Jeune Fille à la Perle. Voir ce saisissant tableau se mettre en place sous nos yeux est incroyable. Ca va du turban bleu au
tissu jaune, en passant par les lèvres humectées, la bouche légèrement ouverte mais pas trop, et bien évidemment la perle à l'oreille gauche. Une fois la position entièrement reconstituée,
lorsque la jeune femme prend ainsi la pose et que le maître la peint, on a droit à une scène figée, où
Scarlett Johansson se tient totalement
immobile dans cette fameuse position, regardant la caméra, se transformant presque en tableau sous nos yeux. Le spectateur est ébloui. En tout cas pour ma part, j'étais stupéfait.

Bref, même si l'histoire est assez nian-nian par moments (les mains qui
s'effleurent, les regards qui se croisent), la trame assez romantique entre
Vermeer et sa soudaine muse
Griet se laisse
regarder sans trop d'ennui. Une chose est dommage : on a l'impression que le film se passe sur 2-3 mois alors qu'il se déroule normalement sur 3 ans, ce qui n'est pas du tout ressenti. Du coup,
ça donne l'impression que cette aventure est rapidement bouclée. Néanmoins, les deux acteurs principaux sont d'une grande justesse.
Scarlett
Johansson et
Colin Firth sont parfaits, la première assez froide et distante tandis que le second traduit parfaitement l'idée
du peintre aux éclairs de génie. Leur complicité est visible à l'écran, notamment lors des scènes où
Vermeer apprend à
Griet à fabriquer de la peinture, lui demande de juger ses toiles ou lui fait découvrir le mécanisme de la chambre noire. On a également le plaisir de voir
Cillian Murphy, très bon comme à son habitude.
Enfin, c'est
Alexandre Desplat qui a composé les musiques de ce film et c'est réussi. Que ce soit
"
Griet remembers" comme "
The Master is Painting" ou encore le somptueux "
Griet's Theme", on a ici des thèmes musicaux qu'on n'oublie pas, ce qui est surprenant de la part d'un tel film (pas extraordinairement touchant ni
émouvant).
Pour conclure, je dirais que tout ceci m'a donné envie de lire le livre, ce qui justifie encore plus la présence de cet article dans cette communauté.
Un bon film, qui souffre d'une trame parfois pas palpitante mais qui a le mérite de nous faire découvrir l'hypothétique histoire de ce tableau.