Le film est sorti mercredi et j'étais assez pressé d'aller le voir même si je ne savais pas bien à quoi m'attendre. Le synopsis promettait
un film mêlant histoire vraie, émotion et une pointe d'humour, et j'ai eu exactement tout ce que j'attendais de cette magnifique fresque historique méconnue. C'est clairement un film à voir en
VO. Je n'imagine pas ce que doit donner le doublage mais l'interprétation de Colin Firth est tellement extraordinaire qu'il ne faut pas la
louper. Le film raconte l'arrivée sur le trône de George VI, le père de l'actuelle Reine Elizabeth d'Angleterre. Peu
après la mort de son père George V, le prince Albert doit prendre le relais contre son gré et malgré son bégaiement qui
l'handicape.
Le Discours d'un Roi a été nominé et récompensé un très grand nombre de fois et
pour moi c'est amplement mérité. En allant voir le film au cinéma, je ne m'attendais pas à apprécier autant cette histoire des plus poignantes. Historiquement parlant, c'est vraiment intéressant
car on nous présente un pan de l'Histoire que peu de monde connait.
Colin Firth incarne le roi
George VI
qui, suite à l'abdication de son frère aîné
Edward VIII (
Guy Pearce), fut forcé de prendre le trône.
Déjà, la courte prise de pouvoir du roi
Edward III à été marquante dans l'Histoire, puisque c'était la première fois qu'un monarque d'Angleterre a abdiqué de
son plein gré, par amour. Effectivement, il était amoureux d'une américaine deux fois divorcée,
Wallis Simpson. Or, l'Eglise empêchait le remariage après un
divorce, donc
Edward III ne pouvait pas se marier avec elle et a choisi de passer le pouvoir à son frère cadet.
Mais celui-ci, le
Duc d'York
Albert, dit "
Bertie", souffre d'un grave bégaiement qui l'empêche de s'exprimer correctement en public. Même si on pourrait éventuellement croire que
ce problème porterait à rire pendant le film, ce n'est pas du tout le cas (heureusement). La personnalité de cet homme est touchante, car il est fragile, il n'a pas confiance en lui et ne
souhaitait absolument pas prendre la tête du pays. Face à la montée du nazisme en Europe, il doit prononcer un discours à la fois fort et rassurant, destiné au monde entier, afin de s'opposer au
régime d'
Hitler. Et son atroce bégaiement le rend vraiment très humain et bouleversant. Le film débute avec une scène perturbante, qui met tout de suite dans
l'ambiance en nous montrant à quel point son handicap peut être gênant et malheureux. Sa hantise du micro le poursuit jusqu'à la fin du film qui constitue l'une des scènes les plus stressantes,
puissantes et émouvantes que j'ai pu voir. Le dénouement est vraiment un sommet de tension, comme si le spectateur était lui-même entrain d'aider mentalement le pauvre homme à s'exprimer
correctement. Il est difficile de ne pas frissonner tant c'est puissant et efficace.
Le film est porté par un casting merveilleux, et j'admets que je ne
pensais pas trouver
Colin Firth aussi bon (même si j'adore ce comédien, notamment dans
La Jeune FIlle à
la Perle ou
Love Actually), disons qu'il ne fait pas partie de mes préférés. Cet acteur est grandiose, il mérite son
Golden Globe et je ne serais absolument pas surpris de le voir prendre l'
Oscar du meilleur acteur. La prestation qu'il
nous offre ici est magistrale, bouleversante, criante de réalisme et d'authenticité. Tout passe par le regard, les mimiques et la sensibilité, l'acteur incarnant à la perfection la fragilité et
la souffrance de ce Roi qui perd facilement ses moyens mais jamais sa volonté. Au niveau des acteurs, comment ne pas citer
Geoffrey Rush ? Je
ne le connaissais que de
Pirates des Caraïbes et il est parfait d'un bout à l'autre. Il campe le thérapeute
Lionel Logue, l'orthophoniste aux méthodes peu banales qui va tenter de guérir le bégaiement du Roi. Parfait, monumental, l'acteur est juste génial d'un bout à l'autre et
très surprenant. Le personnage en lui-même est intrigant, n'hésitant pas à appeler le Roi par son petit surnom afin d'instaurer une situation d'égal à égal dans son cabinet. Ce personnage donne
lieu à de nombreuses pointes d'humour british très bienvenues, on ne s'ennuie jamais pendant les deux heures, ce qui est un exploit car le sujet de départ aurait pu rapidement devenir lassant. On
rit assez souvent, notamment devant l'audace et le culot dont fait preuve
Logue à l'égard de son patient. L'humour passe également beaucoup par
Colin Firth, car son personnage n'hésite jamais à faire de l'autodérision vis-à-vis de son handicap de langage.
L'évolution de la relation entre les deux hommes est touchante,
le docteur devenant peu à peu le confident du Roi, son seul véritable ami.
Logue est quasiment un psycho-logue, cherchant à connaître les moindres détails qui
ont pu pousser
Bertie à développer ses difficultés. Ce lien puissant entre les deux personnages est vraiment intense et donne lieu à des scènes sublimes, très
fortes en émotion. Le thème de l'enfance malheureuse est parfaitement traité et on a du mal à retenir l'émotion qui nous submerge lorsque le Roi
George VI
craque littéralement,
Colin Firth étant vraiment très charismatique et poignant. Le film nous montre d'ailleurs un côté de la thérapie
intéressant : le fait de s'intéresser aux causes d'un problème plutôt qu'au problème lui-même. C'est même la grande différence entre les orthophonistes inefficaces du début du film et
Lionel Logue qui lui, va chercher loin dans le passé. Il est dingue de voir à quel point le film peut être passionnant alors que l'idée de base (le bégaiement
d'un roi) est relativement peu captivante, car on a là un film qui ne parle pratiquement pas de politique (elle est reléguée au second plan, ce que certains ont trouvé dommage mais qui ne m'a
personnellement pas dérangé) mais nous montre un homme qui souffre, devant gérer deux énormes problèmes en même temps. Le film est beaucoup axé sur l'importance des mots et de l'élocution des
orateurs, comme en témoigne cette scène où
George VI regarde un discours d'
Hitler, que sa fille (la future
Elizabeth II) lui demande "
Qu'est-ce qu'il dit papa ?", ce à quoi il lui répond "
Je n'en sais rien, mais il le dit bien". Ca montre à la perfection que la forme d'un discours a autant d'impact que son fond, ce qui
fait d'ailleurs assez peur.
De même, les décors et les costumes sont magnifiques et très bien
réussis.
Helena Bonham Carter (qui a été un argument non négligeable dans mon envie de voir le film) est bien différente de ses rôles
habituels. Elle n'est plus du tout dans le registre déjanté d'un
Fight Club, d'un
Harry
Potter ou des films de
Tim Burton. Elle campe la femme de
George VI avec délicatesse et
angoisse, toujours présente auprès de son mari pour le soutenir et lui redonner confiance en lui. Cette actrice montre clairement qu'elle est l'une des meilleures du moment, bien loin des strass
et paillettes. Une femme simple avec beaucoup d'humour que j'admire beaucoup. Pour continuer avec les seconds rôles, il faut citer
Timothy
Spall (le
Peter Pettigrow de
Harry Potter) dans le rôle de
Winston Churchill. Drôle et original. De même, j'ai étonné de voir un
Michael Gambon relativement correct dans le
role de
George V (j'ai tendance et ne pas supporter cet acteur qui a quand même détruit le personnage de
Dumbledore au
cinéma, et oui ça fait beaucoup de monde de Poudlard en même temps !). En terme de réalisation, on a encore du haut niveau avec des plans et des cadrages d'une extrême beauté, soignés, qui
mettent en exergue le talent incroyable des acteurs et notamment de
Colin Firth. Bref, tout est brillant dans ce drame sublime que j'ai adoré
d'un bout à l'autre, sans parler des musiques sublimes (notamment à la fin du film, mon dieu mais quelle scène !). Le compositeur
Alexandre
Desplat a fait un boulot excellent, comme souvent.
Bref, 12 nominations pour les Oscars qui ne sont, à mon goût, pas exagérées. Un biopic grandiose et magistralement interprété dont je
retiendrai surtout le dernier face-à-face entre
"Bertie" et
Logue pour le discours final, un grand moment de cinéma. Un
pur bijou dont je suis sorti subjugué.