Voilà un excellent et sublime film d'
Alfonso Cuaron qui nous en met plein la vue en terme de réalisation,
d'ambiance et d'émotion. Après
Harry Potter et le Prisonnier d'Azkaban où il avait déjà imposé un univers assez sombre par rapport aux
précédents volets, il nous offre ici un film dur et noir sur un sujet passionnant. Ce n'est peut-être pas un film d'anticipation à proprement parler puisque le pitch de départ est, bien que
surprenant, certainement pas prêt de se produire, mais il est clair que c'est original. Le monde dans lequel progresse le héros donne des frissons tant il est réaliste à propos de l'être humain.
Ici, l'espoir est encore symbolisé par un bébé, qui constitue carrément un miracle. Le seul problème, à mon goût, c'est que le réalisateur ne développe pas assez son scénario. L'idée est super
intéressante mais à part nous montrer le sauvetage d'un miraculeux nouveau-né,
Cuaron ne laisse pas de place à la question "
et ensuite ?". A nous de deviner certes, mais visiblement le final n'est pas très optimiste. Même si l'espoir est bien présent et que ce bébé annonce un
renouveau pour l'humanité, on est en droit de se demander si ce miracle va effectivement se reproduire (sans mauvais jeu de mot). Cependant, le sujet est quand même bien traité et le film ne
s'essouffle jamais car reste toujours intéressant.
Les Fils de
l'Homme est composé d'un certain nombre de longs plans-séquences tous aussi maîtrisés les uns que les autres, et c'est à mon goût ça qui constitue sa grande force. La réalisation
est époustouflante grâce à plusieurs scènes quasiment anthologiques, de pures maîtrises de la caméra qui m'ont cloué sur mon siège. Le plan-séquence de l'embuscade dans la voiture est absolument
superbe, mais c'est celui de la fin du film qui reste le plus mémorable. Ce plan de 6min10 est terriblement immersif, on est à fond au coeur de l'action et le conflit entre soldats est montré de
façon réaliste et effroyable. La caméra devient presque un personnage à part entière, tellement qu'on a presque l'impression d'avoir affaire à un reportage de journalistes. Elle suit
Théo pendant tout le film et nous montre son évolution jusqu'à la fin, à travers les balles et la misère. C'est magnifiquement filmé et on est vraiment plongés dans une
ambiance presque glauque. La fin du film est également émouvante, grâce à cette paix qui s'installe subitement à mesure que
Théo avance avec
Kee et son bébé au milieu des soldats. En plus d'être un symbole d'espoir, cet enfant représente la cessation de la guerre et l'idée véhiculée est très forte. Dans un
monde sans espoir, sans aucune raison de vivre depuis 18 ans, voilà qu'un bébé apparaît et fait taire les fusillades rien que par sa présence. C'est puissant et on en aurait presque les larmes
aux yeux. D'autant que la musique est une pure merveille.
Les acteurs sont également géniaux, à commencer par
Clive Owen bien évidemment qui
garde toujours son air sérieux (comme si on lui interdisait de sourire sur le plateau), mais reste crédible d'un bout à l'autre dans un rôle plus ou moins déprimé. De même,
Michael Caine (avec qui j'ai habituellement du mal) est très surprenant en vieux bonhomme cool et hippie. On aperçoit
Julianne Moore pendant un court moment (heureusement ?) et la disparition rapide du personnage donne lieu à un plan-séquence génial et inattendu.
Claire-Hope Ashitey est elle aussi impeccable dans son rôle.
Cuaron signe donc l'un des meilleurs films de 2005 avec un scénario intéressant bien que
peut-être pas assez poussé, mais surtout une réalisation de génie. Récompensé plusieurs fois pour sa sublime photographie et sa maîtrise technique, c'est un excellent film qu'il est difficile de
ne pas apprécier.