Dès le début je me suis senti embarqué dans cette histoire, ou plutôt ces histoires dont est témoin le personnage principal, interprété par la
chanteuse
Norah Jones. Certains ont reproché au film d'être trop mièvre, mais c'est pourtant toute cette douceur qui m'a touché, avec des
scènes lentes, belles (esthétiquement comme émotionnellement) qui nous font parfois virer dans une légère déprime. Dans ce film, la possible mièvrerie est amenée avec tellement de subtilité et de
sensibilité qu'elle passe très bien. Wong Kar Wai ne force pas les choses et c'est un excellent point. La réalisation est d'ailleurs originale (des ralentis saccadés qui imposent une atmosphère
propre au cinéaste) et franchement réussie. Les personnages présents dans ce film sont tous (ou presque) des êtres malheureux, perdus. A commencer par Lizzie (Norah Jones) qui après une déception
amoureuse va arpenter l'Amérique et rencontrer de nombreuses personnes. Le film a de nombreuses qualités mais la première qui me vient en tête est la profondeur des personnages. Chacun d'entre
eux est intéressant dans son malheur, émouvant.
Jude Law, dont le talent n'est plus à refaire, nous touche en "gardien des clés" esseulé.
Plusieures scènes magnifiques sont à noter entre les deux personnages principaux, notamment lorsque Jeremy montre à Lizzie des extraits de sa caméra de surveillance.
Wong Kar Wai traite ici le
malheur de plusieurs individus de façon douce, juste. C'est émotionnellement assez intense par moments, grâce aux acteurs. Je pense que l'histoire qui m'a le plus touché est celle d'Arnie, le
flic complètement déprimé qui passe son temps au bar. Non seulement le talent de l'acteur
David Strathaim permet de nous faire passer de
nombreux sentiments rien qu'avec le regard, mais en plus le personnage est bien traité, sans clichés (comme tout le film d'ailleurs qui malgré sa lenteur n'a cessé de me surprendre). C'est un
film qui donne pratiquement envie d'aller bosser dans un bar au milieu d'un trou paumé aux USA afin de faire des rencontres marquantes. Le personnage de
Rachel Weisz est également touchant, même si j'ai trouvé qu'elle en faisant un poil trop sur la fin de son histoire. De manière générale, d'ailleurs,
j'ai préféré le jeu d'actrice de
Norah Jones qui est une sacrée révélation dans le monde du cinéma à mon goût. Certes, son personnage reste
un peu fade comparé aux rôles secondaires, mais elle m'a touché à de nombreuses reprises. Quant à la dernière partie du film, centrée sur
Natalie
Portman, elle m'a également fait ressentir de nombreuses choses. La traversée du pays en binôme jusqu'à Las Vegas a des airs de road movie mais ce n'est pas vraiment l'objet du
film qui fait plutôt dans le dramatique et la douceur. Ces deux genres se rejoignent à la perfection vers la fin, avec une Natalie Portman poignante (comme toujours) mais surtout une musique à
faire tomber. La BO de My Blueberry Nights est juste une merveille et m'a souvent fait frissonner, notamment à la fin de la partie sur Natalie Portman avec une scène de regards vraiment très
belle. Certaines musiques de Norah Jones donnent vraiment à My Blueberry Nights une ambiance incroyable, mais le meilleur morceau de ce soundtrack reste pour moi "The Greatest" de
Cat Power (chanteuse qui a également une petite apparition dans le film). Une chanson qui m'a fait frissonner.
Pour conclure, si vous vous attendez à de l'action ou que vous n'êtes pas sensibles à la poésie et à la douceur, je vous conseille de zapper
ce film qui vous ennuiera peut-être. Pour les autres, ça sera (j'espère) un festival d'émotions et de sensibilité à ne pas louper.