Quelques films en vrac #4

Quelques films en vrac #4

      Cinq nouveaux films découverts ces derniers jours. Parmi eux : un thriller complètement foireux. Une interprétation étonnante. Un film à suspense moyennement géré. Un film trop référencé. Et enfin, une idée géniale, mais bien mal exploitée.

 

     What keeps you alive   (Colin Minihan, 2018) 

Quelques films en vrac #4

      Je commence par celui-ci, comme ça c'est fait. What keeps you alive est présenté comme un thriller horrifique, et je vous le déconseille totalement. Je n'ai trouvé aucun point positif à ce film, et c'est assez rare pour être souligné. Dès les premières minutes, j'ai su que le visionnage de What keeps you alive allait être pour moi un calvaire car j'ai trouvé les deux actrices absolument pas naturelles. Tout sonne faux dès le départ, que ce soit chez Hannah Emily Anderson comme Brittany Allen, et c'est très gênant lorsque toute l'intrigue et le côté "horrifique" sont intégralement basés sur le jeu des deux actrices. Le film choisit de nous présenter les personnages et les lieux sans aucun contexte. Ca aurait pu être une bonne idée, à condition que les actrices aient été correctement dirigées, afin de nous faire ressentir la personnalité de leur personnage.

 

        La maison nous est introduite via un plan-séquence plutôt joli certes, mais totalement inutile. Outre le fait qu'il s'agisse encore et toujours de ce fameux plan lassant qu'on retrouve maintenant un peu partout au cinéma (la caméra se déplace dans toute la maison pour nous montrer les lieux de l'intrigue), tout ceci n'a presque aucun intérêt puisque le film s'attardera finalement très peu sur ce lieu. Cette idée de réalisation au cinéma peut parfois s'avérer brillante et servir la lisibilité d'une intrigue, je pense notamment à des films comme Panic Room, Conjuring ou encore Don't Breathe dont je parlerai plus bas. Ces films utilisent réellement le décor ainsi présenté, et ça fait sens. Mais lorsque c'est inutile comme ici, ça ressemble alors à un artifice complètement con, surtout quand les actrices surjouent de manière catastrophique.

 

       En dehors du jeu affreux des deux comédiennes qui ne transmettent absolument aucune émotion tant leurs personnages sont fades et vides d'intérêt, le film est à mon goût un désastre du début à la fin à cause de son histoire qui n'a ni queue ni tête. On ne comprend pas les choix du personnage "victime", qui passe son temps à lancer des regards effrayés et à faire absolument n'importe quoi. On sent de manière palpable que le scénariste ne savait pas du tout où il voulait aller, mais qu'il voulait y aller quand même. Comme s'il cherchait à tout prix à trouver tous les prétextes pour réunir ces deux personnages, quitte à leur faire faire des choses stupides. Comment croire une seconde à cette histoire lorsqu'aux deux tiers de l'intrigue, le personnage principal a une issue toute tracée vers la liberté et qu'elle choisit volontairement de revenir près du danger ? C'est véritablement crétin, et je spoile car on s'en fout royalement tant c'est débile : la victime parvient enfin à se débarrasser de son assaillante à l'aide d'un tranquillisant, et à s'enfuir en voiture. Rien ne la retient : elle vient d'échapper à une femme complètement folle et armée, dont elle sait AVEC CERTITUDE qu'elle a déjà tué au moins 5 ou 6 autres femmes par le passé. Elle a la moitié des membres certainement pétés après une chute de plusieurs mètres, elle est en sang, elle est en panique. Et que fait-elle, cette abrutie ? Elle retourne d'elle-même (personne ne sait pourquoi !) sur les lieux qu'elle a cherché à fuir pendant des heures, parce que quand même, hein, il faut qu'elle soit sûre que l'autre fille ne pourra plus faire de mal à personne ! Non mais c'est pas con, ça ?

 

      On rajoute à ça une fin complètement débile, des musiques sans aucun intérêt (autant ne rien mettre, au moins ça donne l'impression d'un parti pris original), et surtout une "méchante" pas effrayante pour deux sous ! Le film tourne en rond rapidement et les scènes s'enchaînent sans aucune logique, comme pour créer une atmosphère haletante et "sans répit", ce qui ne marche pas, mais PAS DU TOUT. Bref, ça fait longtemps que je n'ai pas descendu un film à ce point, mais croyez-moi What keeps you alive est à éviter tant il n'offre aucun suspense et prend le spectateur pour un con.

 

     Elle l'adore   (Jeanne Herry, 2014) 

Quelques films en vrac #4

       Je ne pensais pas dire ça un jour, mais Sandrine Kiberlain est épatante. Elle l'adore est un film français vraiment prenant, qu'il est difficile de lâcher avant la toute fin. A la manière d'un Match Point - en moins maîtrisé tout de même - on suit les déboires d'un chanteur au sommet de sa gloire (Laurent Lafitte) qui choisit de se débarrasser du corps de sa compagne tuée accidentellement. Pour ceci, il va impliquer malgré elle son admiratrice numéro 1, jouée par Sandrine Kiberlain.

 

       J'ai beaucoup apprécié ce film policier pour l'originalité de son scénario, soutenu par un casting franchement très intéressant. Laurent Lafitte, dans un rôle assez sombre voire machiavélique, s'en sort plutôt bien même s'il lui arrive de forcer un peu trop certains traits (les sourcils froncés, le regard noir...). Voir Pascal Demolon incarner un flic coriace fut extrêmement agréable, même si son personnage s'avère décevant sur certains points (notamment son dénouement assez peu crédible). Quant à Sandrine Kiberlain, elle porte le film d'un bout à l'autre, illuminant chaque scène, toujours crédible et juste. Son interprétation, sans être la meilleure de la décennie, est remarquable. Certaines séquences notamment, comme l'interrogatoire final, sont époustouflantes, tant son personnage mythomane est pétillant et inattendu. Je ne vais rien dévoiler, mais le montage permet également de belles surprises avec une narration non-linéaire parfois très intelligente. Le spectateur a rarement de coup d'avance, ce qui rend ce thriller palpitant et intrigant. Une petite réussite.

 

     Don't breathe   (Fede Alverez, 2016) 

Quelques films en vrac #4

       Don't breathe est le genre de films qui démarre sur les chapeaux de roue, puis s'enlise doucement pour tenter de faire durer son suspense le plus longtemps possible. Heureusement, on est très loin d'un naufrage comme What keeps you alive et le film parvient à faire le job plutôt habilement. Cette fois, la technique du plan-séquence avec caméra flottante pour présenter la maison est efficace et utile. L'introduction de la maison regorge effectivement de belles idées, comme lorsque la caméra s'infiltre sous le lit pour nous montrer un élément important de l'intrigue, et il est clair que Don't breathe réussit à nous tenir en haleine pendant quelques minutes.

 

      Encore une fois, malheureusement, on a affaire à un thriller horrifique possédant une idée intéressante, mais absolument pas aidé par son casting. Lorsque j'ai vu Dylan Minnette, j'ai grimacé. J'ai du mal à supporter la fadeur de cet acteur et je ne comprends toujours pas pourquoi on continue de le voir apparaître dans des rôles principaux au cinéma. Stephen Lang, quant à lui, est plutôt un bon choix pour ce personnage de vétéran aveugle mais l'écriture du personnage est franchement moyenne. J'ai eu énormément de mal à me faire un avis sur ce film, finalement, car il ne raconte rien. Don't breathe ne sait pas toujours où il va avec son personnage, tantôt victime, tantôt tortionnaire, et j'ai trouvé ça parfois gênant. Le retournement de situation initial est pourtant jouissif, lorsque le vieux parvient finalement à renverser les choses à son avantage, mais il est tellement difficile de s'y attacher qu'on en viendrait presque à excuser les cambrioleurs de s'être introduits chez lui pour lui voler ses économies.

 

     A part ceci, le film fonctionne plutôt bien. Même si j'ai été très déçu que le vieux se dévoile aussi rapidement - j'aurais vraiment préféré que sa présence nous soit cachée beaucoup plus longtemps - ce jeu de chat et de souris est terriblement efficace malgré les multiples incohérences. Au bout d'un moment, on commence quand même à se demander comment une personne âgée et aveugle, aussi fragile, peut à ce point effrayer cette bande de jeunes cambrioleurs. Il paraît facile de le maîtriser, pourtant. Cependant, je me suis laissé prendre au jeu et, même si l'intrigue s'étire un peu trop sur la fin, il y a quelque chose de ludique dans Don't breathe. Qui plus est, je n'ai pas encore parlé de Jane Levy mais je l'ai trouvée extraordinaire dans ce rôle, toujours juste dans son interprétation. On a vraiment envie de la voir s'en sortir. En bref, c'est un petit thriller bien foutu, avec quand même son lot d'incohérences, qu'il est plaisant de voir au moins une fois.

 

     Run   (Aneesh Chaganty, 2020) 

Quelques films en vrac #4

      En quelques mots, Run aurait pu être intéressant s'il ne passait pas son temps à emprunter ses idées et ses plans à d'autres films bien mieux écrits. On ne sait pas trop, en fait, si Run a vocation à être un film à part entière, ou un simple hommage à l'univers de Stephen King. Ca m'a dérangé. Bien sûr, les différents twists sont très bien amenés et la majorité de l'intrigue est plaisante et palpitante à suivre. Mais je regrette : passer son temps à enchaîner les références à d'autres chefs d'oeuvre du cinéma à suspense ne consitute pas une démarche très intéressante. Le film pompe clairement beaucoup d'idées à Misery puisqu'il est basé un peu sur le même principe : une personne en fauteuil roulant séquestrée à l'étage d'une maison, qui essaie de s'en sortir. Même si les ressorts scénaristiques sont différents, tout est fait pour nous faire penser à Misery, que ce soient les plans parfois à la limite du copier-coller (contre-plongée du bas des escaliers...) ou carrément les éléments clés de l'intrigue (des pilules, un téléphone, un fauteuil roulant, un temps limité pour effectuer des actions avant le retour de la folle...). Comme si cela ne suffisait pas, il a fallu qu'ils donnent le nom de Kathy Bates (mémorable et brillante actrice de Misery) à la pharmacienne, et ça finit par gonfler sévèrement. Un peu comme s'il y avait un petit bonhomme qui commentait le film sur le coin de l'écran en répétant "hé ! regardez ! c'est comme dans Misery ! Et regardez, on fait référence à Kathy Bates de manière subtile ! Oh, vous avez vu, le cinéma s'appelle Carry ! Bon, ce n'est pas Carrie, sinon ce serait trop évident... mais vous avez vu, hein ?". Il y a même toute une scène où Sarah Paulson nous refait quasiment les dialogues de Jack Nicholson dans Shining à base de "chérie, ouvre la porte..." et je trouve que ça fait preuve de fainéantise et d'un manque cruel d'originalité. Run, en fait, n'a quasiment aucune identité et il m'a surtout donné envie de revoir Misery très vite.

 

     En bref, le film est à peu près réussi sur le plan scénaristique (le déroulement de l'intrigue, la façon dont le personnage principal découvre ses indices, le dénouement plutôt pas mal), mais complètement raté sur le plan créatif. Sans parler d'une scène grotesque que je n'ai absolument pas comprise... Attention, je spoile : il y a tout un passage où Chloé passe par le toit afin de rentrer dans une autre pièce de la maison et ainsi s'échapper de sa chambre. Seul obstacle : une vitre à casser. Dans sa chambre : de nombreux outils (dont des marteaux) pour concevoir des engins robotisés. Question : que va-t-on utiliser pour casser ladite vitre ? Réponse : bien sûr, l'idée la plus évidente lorsqu'on n'a pas le temps de réfléchir, c'est de brancher un fer à souder à l'aide de plein de rallonges électriques mises bout à bout, de prendre de l'eau dans sa bouche, puis de ramper sur le toit sans s'empêtrer dans les câbles, de poser ensuite le fer sur la vitre pour la fendre, et cracher l'eau dessus pour la faire éclater... Euh... Oui... Mais... PARDON !?

 

       Enfin bon, pour conclure, Run est plutôt plaisant à voir - paradoxalement, malgré tous ces défauts, je le verrai volontiers une deuxième fois - mais il frise parfois le ridicule et échoue à se montrer original. Et puis, Sarah Paulson en femme un peu tordue et pseudo-inquiétante, j'en ai ras le bol.

 

     Drone   (Jason Bourque, 2017) 

Quelques films en vrac #4

      Drone, c'est l'histoire de Neil, un agent des Services Secrets de la CIA (joué par le génial Sean Bean) qui balance des bombes à l'aide de drones, sans se préoccuper des dommages collatéraux liés à ces largages (meurtres de civils). Un jour, un pakistanais se présente chez lui en prétendant vouloir acheter son bateau. Neil l'invite donc à manger dans sa maison.

 

      Vous avez déjà compris où va le film ? Oui, et c'est bien le problème ! Drone aurait pu être un huis clos palpitant et bougrement intelligent, mais il choisit malheureusement de donner dès le départ toutes les clés au spectateur. Premièrement, le film met une éternité à démarrer, s'attardant sur des scènes et dialogues parfaitement inutiles au lieu de rentrer directement dans le coeur de l'action. C'est terriblement frustrant de se dire qu'à cause d'un choix narratif foireux, Drone aurait pu être un chef d'oeuvre de tension et de réflexion, mais qu'il passe complètement à côté de cette brillante idée. Toute la première partie du film est une perte de temps considérable alors que la deuxième moitié est franchement réussie, ou en tout cas, aurait pu l'être totalement. Mais trop de choses clochent avec ce film, et c'est sacrément dommage.

 

     Plutôt que de présenter la situation de cette manière, voici ce qu'ils auraient dû faire. Premièrement, ne pas nous révéler l'activité professionnelle de Neil dès le début ! C'est complètement contre-productif. Personne, pas même sa femme et son fils, ne sont au courant de son métier. Il aurait été intéressant de nous mettre dans le même flou. Deuxièmement : le film aurait dû attaquer directement par Imir se présentant chez Neil. Il y aurait eu un réel intérêt à découvrir la suite : l'histoire personnelle d'Imir, ses intentions, la tension créée par les mensonges de Neil, le combat mental entre deux hommes qui cherchent à savoir qui est réellement l'autre, la pression liée à la famille, qui ignore tout de la vie de Neil, et à qui ce dernier ne veut surtout rien révéler. En bref, des révélations données au compte-goutte au spectateur jusqu'à la révélation finale. Tout ça aurait été tellement plus percutant, tellement excitant ! Alors que là, finalement, on retient du film une idée plutôt intéressante et très peu vue au cinéma, mais complètement foutue en l'air par l'angle choisi pour la raconter. Dommage, donc, car Drone aurait pu être un film beaucoup plus malin (et je ne compte pas les quelques scènes complètement stupides, comme lorsqu'Imir se fait insulter par un connard de raciste, puis que le film semble quasiment vouloir donner raison à ce connard de raciste). Un film sympathique, donc, mais à mon goût un grand gâchis lorsqu'on pense à ce qu'il aurait pu être.

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