Contrairement à l'article précédent qui exposait mes grandes déceptions récentes, voici une liste de 5 films que j'ai adorés. Au programme : un film français sensible et sans cliché, la résolution d'une enquête entièrement montrée du point de vue d'un écran d'ordinateur, un Xavier Dolan que je craignais, une rencontre amoureuse plus touchante que prévue, et un superbe thriller à la Prisoners.
Otez-moi d'un doute (A.J. Edwards, 2014)
Je commence avec Otez-moi d'un doute qui est une véritable pépite. Depuis que j'ai vu La délicatesse il y a quelques années, je considère que François Damiens a un potentiel émotionnel démesuré. Dans Otez-moi d'un doute, l'acteur fait encore des merveilles. Il est par ailleurs très bien accompagné, car le casting est de haute volée. Cécile de France, même si elle nous ressort son éternel personnage de femme indépendante et rentre-dedans, est époustouflante. Guy Marchand est émouvant, mais pas autant qu'André Wilms que je ne connaissais pas et qui m'a littéralement scotché. Cet acteur nous offre une interprétation extraordinaire et amusante qu'il me sera difficile d'oublier. Par contre, et c'est pour moi l'unique défaut du film, je n'ai pas été emballé par l'histoire secondaire qui met en scène Alice de Lencquesaing et Estéban. Sous couvert d'humour, le personnage d'Estéban est, je trouve, extrêmement faux. Je n'ai jamais cru à ce personnage et ça m'a parfois sorti du film. Heureusement, Alice de Lencquesaing incarne son personnage avec une grande sensibilité et m'a ému à quelques reprises.
Mais surtout, outre ce casting presque parfait, j'ai trouvé le scénario très intelligent. Otez-moi d'un doute aurait pu 100 fois tomber dans les clichés, dans les mauvaises habitudes scénaristiques qu'on nous sert depuis des années dans le cinéma français. Et 100 fois, il ne le fait pas. Certaines situations, qui sont présentées au départ comme des possibles quiproquos, sont résolues de manière très habiles en prenant le spectateur à contre-pied. Par habitude, on a souvent la sensation que le film va emprunter telle ou telle voie un peu chiante et réchauffée. Et pourtant, il ne le fait jamais. C'est très malin, et mon plaisir a - petit à petit - augmenté tout au long du film, car j'ai été surpris à de multiples reprises. Bref, je vous encourage à voir Otez-moi d'un doute qui est, à plus d'une occasion, très brillant et très émouvant. Un drame sensible et drôle qui m'a déstabilisé.
Searching (Aneesh Chaganty, 2018)
Ce film est brillant. J'ai été bluffé par son parti pris (l'intégralité du film se passe sur un écran d'ordinateur) et happé dans une émotion qui m'est tombée dessus sans prévenir.
Searching, c'est l'histoire d'un père veuf qui, lorsque sa fille disparait suite à une soirée entre jeunes, tente par tous les moyens de retrouver sa trace en utilisant Internet et les réseaux sociaux. Un film qui aborde de multiples sujets tout en étant incroyablement ludique, car il touche notre génération ultra-connectée en plein coeur. J'ai adoré. Même si, je le sais, il y a quelques gros problèmes de scénario et que le film s'embarque, à la fin, dans un twist incohérent qui n'était pas du tout nécessaire, Searching m'a mis une claque. C'est une proposition de cinéma à la fois culottée, extrêmement bien réalisée et intelligente. Outre le côté quasiment ludique de la résolution de l'enquête, que j'ai suivie sans jamais m'ennuyer et qui est d'une fluidité incroyable, le film apporte des éléments d'émotion qui m'ont foutu à terre. En effet, le film a touché ma corde sensible : la nostalgie des moments passés.
Etant du genre à rester ancré dans les souvenirs, à m'attacher profondément aux vidéos et photos du passé, c'est avec grande difficulté que j'ai réussi à ne pas pleurer lors de certaines scènes d'une émotion folle. Pour ceux qui ont vu le film, je fais référence notamment à la scène des gumbos qui va me rester très longtemps en tête grâce à son fort impact émotionnel. J'ai été saisi, tout simplement, et il est évident que je vais prendre plaisir à voir et revoir ce film dans les années à venir, malgré ses défauts lors de sa conclusion.
Ma vie avec John F. Donovan (Xavier Dolan, 2018)
Etant donné que Mommy est très probablement mon film préféré toutes catégories confondues, c'est avec une grande crainte que j'ai longtemps repoussé mon visionnage de Ma vie avec John F. Donovan. Et puis, il y a quelques jours, j'ai eu la réflexion suivante. Je me suis dit qu'il fallait que j'accepte le fait que ce film avait très peu de chances d'être meilleur que Mommy, et que je me lance sans y penser.
Emballé par le casting qui est complètement dingue, je me suis lancé et je n'ai pas regretté. Bien sûr, il n'est pas à la hauteur de Mommy, mais bon sang, qu'il est maîtrisé ! J'y ai retrouvé tout ce que j'aime chez Xavier Dolan, et ça m'a fait un bien fou. On pourrait croire que la réussite de ce film s'appuie principalement sur ses acteurs. Et pour cause : Kit Harington incarne ce John F. Donovan avec une sensibilité et une douceur débordantes, lui conférant une aura mystérieuse démentielle. Susan Sarandon, également, interprète la mère du personnage principal avec une incroyable justesse. Natalie Portman est... Natalie Portman ! Tout simplement la meilleure actrice de sa génération, et elle le prouve à nouveau. Je regrette simplement que Jessica Chastain, qui devait à l'origine tenir un rôle important dans le film, en ait finalement été totalement coupée afin qu'il dure deux heures au lieu de quatre... Bref, on pourrait croire que c'est le casting qui fait le film. Mais quand on parle de Xavier Dolan, il est impossible de parler uniquement du casting. Les plans, les mouvements de caméra, les couleurs, les ambiances, la musique : tout se mélange avec une précision millimétrée et j'ai été subjugué d'un bout à l'autre par la réalisation et le montage de ce film. Ces moments où le temps s'arrête, où la caméra se fige sur un personnage... ces moments où la musique prend toute la place... ces moments où les ralentis offrent des images de pure beauté. C'est hallucinant, vraiment. Il y a notamment une scène où la caméra se concentre sur le personnage de Natalie Portman et où le temps semble ne plus exister, qui m'a filé de sacrés frissons.
Bref, Ma vie avec John F. Donovan est un énième film virtuose de Xavier Dolan et, finalement, ne manque que d'un scénario un poil plus percutant pour bien rester en mémoire.
Room in Rome (Julio Medem, 2010)
Voilà un film qui ne paie pas de mine, mais qui se révèle incroyablement beau dans le développement de ses personnages. Room in Rome est vraiment bien plus intéressant qu'il n'en a l'air à première vue. Une sorte de Before Sunrise émouvant : un huis clos qui m'a captivé du début à la fin.
Passée la première partie du film qui semble s'engager dans une voie superficiellement érotique, Room in Rome apporte à ses personnages une dimension de plus en plus dramatique et profonde au fur et à mesure que l'histoire avance. J'ai bien failli arrêter mon visionnage au bout de 15 minutes lorsque j'ai cru que le film n'aurait aucun intérêt, et quelle erreur cela aurait été ! Le film m'a complètement pris à contre-pied en développant son histoire et ses personnages au compte-goutte, en ne sombrant jamais dans la vulgarité, et surtout en entraînant le spectateur dans un jeu assez malin, auquel il prend rapidement goût. Je ne vais pas révéler ici les ressorts scénaristiques importants du film, car j'estime que ce magnifique huis clos est à découvrir sans en savoir trop, mais je ne peux que vous conseiller de tenter l'expérience. Room in Rome est un film sensible, qui m'a impliqué émotionnellement de nombreuses fois, notamment lors de son dénouement déchirant à bien des égards. Et puis, il y a une ambiance, une sacrée ambiance même ! Elena Ayana et Natasha Yarovenko sont fascinantes, surtout lors du dernier acte sur le balcon, véritablement saisissant. Bref, malgré quelques détails parfois décevants (le comportement d'Alba ne me semble pas toujours 100% en accord avec l'histoire qu'elle raconte), j'ai été conquis.
Captives (Atom Egoyan, 2014)
C'est mon premier film d'Atom Egoyan et j'ai été agréablement surpris. Même si, à mon goût, un film comme Prisoners est bien plus intéressant (que ce soit au niveau de son casting, son scénario ou sa mise en scène), Captives n'est pas en reste. Ce qui m'a le plus marqué, c'est de voir enfin Ryan Reynolds impliqué dans un rôle. Habituellement peu friand de cet acteur que je trouve fade et généralement sans intérêt, j'ai trouvé ici son interprétation à la fois juste et émouvante. Globalement, d'ailleurs, le casting m'a beaucoup plu, et je suis surpris de trouver tant de critiques qui le descendent. Rosario Dawson est somptueuse et investie dans son personnage, comme toujours. J'ai également été conquis par le jeu de Kevin Durand qui, depuis Lost, a pour moi le visage parfait pour incarner les "grands méchants". Un choix à mon goût très judicieux.
Mis à part son casting, Captives est également parsemé d'idées superbes comme cette promesse de patinage artistique qui donne une réelle profondeur au personnage de Cassandra. J'ai pris beaucoup de plaisir à suivre l'évolution du personnage de Ryan Reynolds, toujours caché sous sa casquette, et de l'enquête en elle-même. L'ambiance glaciale et les décors enneigés sont également des atouts de taille, bien que Denis Villeneuve les ait déjà exploités en mieux dans Prisoners. J'ai toujours aimé les intrigues policières prenant place en hiver, où la tension et le désespoir semblent plus palpables que jamais. L'intrigue n'échappe pas à de nombreuses incohérences, ce qui fait de Captives un film clairement imparfait. Mais très honnêtement, j'en attendais bien pire et j'ai été emporté tout du long. A voir au moins une fois.