Si le film passe au cinéma en VO près de chez vous, courez le voir. Il est incroyable, émouvant, effrayant, passionnant. Clairement dans le top 3 des meilleurs films que j'ai vus cette année. La proie d'une ombre (The Night House) est un film d'une grande qualité, sorti mercredi dernier, et semble malheureusement passer à la trappe en France - ce soir, j'étais littéralement tout seul dans la salle de cinéma. Je vais décrire dans cet article pourquoi il faut le voir.
J'ai aimé La proie d'une ombre d'un bout à l'autre, grâce notamment au jeu de Rebecca Hall qui est époustouflante et m'a tenu en haleine sans jamais me lâcher, mais également grâce au scénario, aux ambiances, à la réalisation, au montage, au son, aux idées visuelles... Bref, je suis subjugué.
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L'histoire - qui parait complètement bidon en début de film - est a priori très simple. Une jeune femme doit faire le deuil de son mari qui vient de se suicider d'une balle dans la tête. Aussi triste que révoltée par cet événement, elle va commencer à ressentir une présence dans sa maison... Dit comme ça, le film ne donne pas particulièrement envie d'aller voir plus loin. J'ai moi-même hésité longuement avant de me déplacer au cinéma, craignant un énième film d'horreur à base de maison hantée. J'ai bien fait de me forcer, finalement, car The Night House est une pépite. Avec un scénario redoutable et imprévisible qui nous emmène constamment dans de fausses directions, le film m'a surpris à de nombreuses reprises et je n'ai pas souvenir qu'un film d'horreur m'ait déjà autant scotché par son histoire. Je ne vais pas en dire trop, mais je trouve le film audacieux notamment dans son dénouement qui aurait pu tourner au ridicule mais, pourtant, ne penche jamais de ce côté. Un final d'une parfaite cohérence, magnifique et poétique. Je suis sorti de la salle il y a deux heures et j'ai encore en tête ces images d'une beauté incroyable.
Le film possède une atmosphère folle, il y a notamment un soin tout particulier apporté au son et aux voix. Franchement, j'ai attendu 5 jours avant d'aller le voir au cinéma parce que, sur les 30 ou 40 séances proposées par mon cinéma au cours de la semaine, seule celle de ce soir était en VO. Et bon sang, je ne regrette absolument pas ce choix quand je vois tout ce que j'aurais raté si j'étais bêtement allé le voir en VF. Il y a une voix, notamment, dont je ne révèlerai pas la nature mais qui m'a vraiment scotché à mon siège d'un bout à l'autre. Une voix à la fois proche et lointaine, menaçante et accueillante. Certaines scènes sont complètement dingues grâce à ça. Et pour continuer à parler du sonore, les musiques sont également très pertinentes. Une chanson, notamment, évolue tout au long du film pour devenir de plus en plus effrayante et on ne peut que saluer tous ces choix musicaux.
C'est également le son qui permet d'offrir au spectateur des passages réellement angoissants voire terrifiants. La proie d'une ombre, clairement, m'a fait flipper. Ça ne m'était pas arrivé depuis longtemps, en tout cas de manière si intense, et que ça fait plaisir ! Le film propose notamment deux jumpscares à un moment donné, quasiment l'un à la suite de l'autre... brrr. J'étais tétanisé, y'a pas d'autre mot. L'un d'entre eux, basé exclusivement sur un son, est glaçant. Le siège sur lequel j'étais assis, je crois, se souvient de mes ongles. C'est simple, j'avais presque l'impression par moments d'être à la place du personnage et de vivre ce qu'elle vivait. Ses rêves, ses réveils, ses angoisses, ses colères, ses peines.
Tout ceci est d'ailleurs mis en valeur par la réalisation, la mise en scène prodigieuse, mais aussi le montage qui est purement brillant. Certaines transitions sont inoubliables, comme celle qui apparaît dans la scène ci-dessous, ou encore bien sûr le fameux jumpscare qui m'a paralysé. On ne sait pas toujours réellement quand le personnage se trouve dans un rêve ou dans la réalité, tout simplement car il n'y a jamais de coupure claire entre les deux. Les scènes s'enchainent avec une grande fluidité, il y a par ailleurs un vrai souci de s'attarder sur les décors. J'ai trouvé ça très appréciable car le film ne passe pas son temps à changer de lieux tout le temps, au contraire. Lorsque le personnage est dans la forêt, elle y reste longtemps. On a la sensation d'accompagner ce personnage jusqu'au bout, que rien ne nous est caché.
Et que dire de Rebecca Hall ? Je passe rapidement sur le casting qui est franchement parfait, en passant par une Sarah Goldberg impeccable dans son rôle d'amie et de soutien, ou encore une Stacy Martin qu'on voit pourtant très peu, mais qui brille lors de chacune de ses apparitions. Mais que dire de Rebecca Hall ? Cette actrice me bluffe d'année en année, et elle incarne ici son personnage avec une justesse épatante. D'autant que le personnage est admirablement écrit. On n'est absolument pas dans le stéréotype de la veuve éplorée qui passe son temps à se lamenter, non. Il y a une vraie rage dans ce personnage, du sarcasme parfois, une certaine acidité même dans ses relations avec les autres. Ce personnage est fascinant et j'ai été impliqué dans son histoire de la première à la dernière seconde.
En plus de proposer un incroyable renouveau du film de maison hantée / personnage hanté, de parvenir à nous faire frissonner, sans jamais prendre le spectateur pour un abruti (comme le font trop souvent les films d'horreur récents), puisque son scénario est particulièrement malin et recherché, le film se permet en plus d'être extrêmement poétique et touchant à de nombreuses reprises. Je ne vais pas citer à nouveau le dernier acte du film que j'ai trouvé très percutant dans cette poésie, car bien d'autres scènes sont également dotées d'une grande puissance émotionnelle. Il y a clairement des séquences que je n'oublierai pas et qui resteront gravées à jamais dans ma mémoire. La scène de la salle de bain, sans rien spoiler, est novatrice dans le genre, je n'avais jamais vu ça. C'était extrêmement beau, très bien réalisé, parfaitement mis en scène.
Outre ce genre de passages qui réinventent notamment le principe du fantôme, le film fourmille encore de tonnes d'idées fabuleuses qui marquent la rétine. Notamment, on assiste à plusieurs jeux d'ombres et de formes (il y en a plus d'une dizaine dans le film) d'une ingéniosité remarquable. Le réalisateur joue sur les perspectives pour faire apparaître des silhouettes ou des visages, et j'étais bouche bée. On est bien au-dessus de n'importe quelle production horrifique de ces 5 dernières années.
Bref, je n'ai pas été autant subjugué par un film d'horreur depuis très longtemps. Peut-être parce qu'en plus d'être un film d'horreur parfaitement bien mené et, pour le coup, vraiment flippant, La proie d'une ombre est également une leçon scénaristique destinée à tous les autres films du genre. On a affaire à un film très bien écrit, sans clichés, qui passe son temps à dérouter le spectateur. C'est également un très beau film plein de poésie sur la mort et le deuil, que Rebecca Hall incarne à merveille.
Allez le voir et dites-moi ce que vous en pensez, car j'ai l'impression d'être le seul à avoir été autant pris dans toute cette émotion, autant emballé par toute cette ingéniosité. En tout cas, pour ma part, ce film rejoint le Top 300, sans hésiter une seule seconde.