La nostalgie et la mémoire

La nostalgie et la mémoire

     Deux semaines de vacances m'ont éloigné un peu des visionnages de films, mais j'en ai profité pour réfléchir à la question suivante : qu'est-ce que j'aime vraiment dans le cinéma ? Je ne m'étais jamais posé autant la question que ces derniers temps et je pense que j'ai un début de réponse.

 

      Pour certains, le cinéma n'est qu'une affaire de divertissement ou de spectacle à l'état pur, pour d'autres il est davantage une source d'analyses, de réflexions, de technicité. Habituellement, les premiers sont associés vulgairement au "grand public" et les autres aux "cinéphiles puristes". Cependant je ne me suis jamais senti proche de l'un de ces deux camps. Pour ma part - et je le rappelle régulièrement depuis la création du blog - le cinéma me touche par son émotion, et c'est cette émotion que je recherche constamment. La plupart des films de mon top 50 sont (à de rares exceptions comme Retour vers le futur ou Pulp Fiction) des films qui m'ont bouleversé, ému. Une majorité d'entre eux m'ont tiré des larmes et c'est l'une des principales raisons pour lesquelles je ne parviens pas à y placer des films pourtant cultes et unanimement salués comme Apocalypse Now, 2001 l'odyssée de l'espace, etc. Je reconnais leur énorme valeur cinématographique, je les adule au plus haut point, mais je ne parviens pas à les qualifier de "chouchous".

 

     Et dernièrement (cette semaine, en fait), j'ai compris pour la première fois ce qui me motivait à voir un film, ce que je recherchais au cinéma...

La nostalgie.

La nostalgie et la mémoire

      Pour parler un peu de moi, j'ai toujours ressenti une immense proximité avec le sentiment de nostalgie. Je pense même pouvoir affirmer que ce sentiment régit ma vie de manière générale et qu'il surpasse tous les autres sentiments. Je ne cesse de vivre dans le passé, que ce soit dans mes goûts musicaux et cinématographiques comme dans mes relations amicales ou familiales. Cette émotion est encore plus importante maintenant que j'ai des enfants, et je pense qu'elle a été au moins décuplée depuis quelques années. Je sens venir la crise de la quarantaine et j'ai donc la certitude que mon amour pour la nostalgie ne va faire que s'amplifier jusqu'à ma mort. J'ai récemment numérisé 27 cassettes VHS de mon enfance et ça m'a bouleversé. Je considère ces images comme mes plus grands trésors. Je suis actuellement en train de faire une liste de l'ensemble des souvenirs que je possède depuis que je suis tout petit. Oui, je suis accro.

 

     C'est donc tout naturellement que j'ai compris ce qui m'anime au cinéma : cette recherche constante de séquences nostalgiques ou mélancoliques. Je réalise tout doucement à quel point mes films "chouchous" sont liés à cette nostalgie. De manière purement formelle, pour commencer ; je ne parviens pas à me détacher de ces films qui ont comblé mon enfance et je me réjouis toujours à l'idée de revoir des scènes qui m'ont marqué étant gosse, réveillant alors des émotions enfouies depuis des années ou décennies. Ce que certains appellent une madeleine de Proust, j'en ai presque fait une religion. Que ce soient le traumatisme des champignons hallucinogènes dans L'Ours ou celui de la mort de la mère de Petit Pied dans Le petit dinosaure et la vallée des merveilles, ou tout simplement mon incapacité à éjecter des films comme Point Break de mon top 50 parce qu'ils m'ont accompagné lors des débuts de ma cinéphilie.

La nostalgie et la mémoire

      Et puis, au-delà de cette nostalgie plutôt formelle, j'ai un attachement tout particulier aux films qui mettent en scène cette émotion et qui la racontent. Quand ça se produit, je peux devenir fou et visionner en boucle une même scène pendant des semaines, comme l'hypnotisante scène du rêve de Valse avec Bachir (ci-dessous) ou celle de Perfect Sense (plus bas à partir de 0:45). En général, les films à fort potentiel nostalgique sont ceux qui me feront pousser un "wouaw" et me laisseront sans voix. J'aime quand les personnages sont ramenés d'une manière ou d'une autre aux émotions de leur passé lointain, ça me fascine et ça me touche.

 

     Maintenant que j'ai réalisé cela, je me suis surpris à retrouver ce thème partout dans mes séries ou films préférés. Pas étonnant, en effet, que la scène m'ayant le plus marqué dans Adieu les cons soit celle de Mala Vida. Pas étonnant, non plus, que Perfect Sense résonne en moi de manière a priori inexplicable : dès qu'on m'explique que c'est l'absence d'odorat qui déclenche des larmes de nostalgie dans la population, je craque. Pas surprenant, non plus, que je savoure des scènes de souvenirs comme dans Spencer, Into the wild ou The Tree of Life. Et puisqu'on parle de The Tree of Life, il est clair que les films portés sur le deuil ont de fortes chances de se retrouver dans mon top 50, comme y figurent déjà Alabama Monroe, La route, Captain Fantastic, A ghost story ou encore Interstellar. Sans surprise, Eternal Sunshine of the Spotless Mind m'a fait chavirer depuis mon premier visionnage et c'est une évidence, tant la thématique des souvenirs et de l'enfance y sont omniprésents. Je pourrais en citer encore des dizaines, comme les conclusions déchirantes de séries comme Lost, Six Feet Under, Death Note, ou de films comme Le Retour du roi, Toy Story 3, Les parapluies de Cherbourg ou Once upon a time in Hollywood, en passant par Your Name, Il était une fois en Amérique ou, plus globalement, la filmographie de Richard Linklater (Boyhood et la trilogie ultra-nostalgique et romantique des Before).

 

      Bref, voilà ce qui me fait vibrer au cinéma, et c'est la première fois que je vois ça de manière aussi limpide. Et vous, qu'est-ce qui vous plait au cinéma ?

 

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W
Je ne sais pas si tu as eu l'occasion de voir Dear Zachary : a letter to a son about his father, qui à mon sens rentre bien dans cette catégorie de film. Je ne suis pas sortie indemne de ce film, je pense que je ne le reverrai jamais ou dans très très longtemps, alors que certains films qui sont aussi beaux que déchirants (comme Alabama Monroe parmi ceux que tu as cités), j'ai pu les revoir avec plaisir. <br /> <br /> Love crazy m'a énormement touchée pour une raison que je n'explique pas trop, et je regarde de temps à autre la bande annonce avec grand plaisir. La narration + la chanson de cette bande annonce me procurent un espèce de mélange de nostalgie et de réconfort.
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S
Non, je n'ai jamais entendu parler de ce film donc merci pour le conseil. Il y a des films qui sont difficiles à revoir c'est sûr, pas toujours pour les mêmes raisons d'ailleurs. <br /> <br /> Like Crazy par exemple, qui m'avait obsédé à l'époque ; j'ai peur de ne plus l'apprécier des années plus tard (différent mood, etc).
T
Je vois ce que tu veux dire, surtout que tu t'y attends pas vraiment, tu penses que ca va se finir sur un genre de Happy End avec le couronnement et tout ca, mais je pense qu'on s'est tellement attaché aux personnages que tu peux que être émue par leur séparation.<br /> <br /> Dans la veine du souvenir, il y'a une scène aussi dans Les Deux Tours, je sais pas si tu vois, franchement une des plus belle du film selon moi, quand Aragorn à un Flashback avec Arwen à Fondcombe, une des rares scènes romantique qui donne des frissons, la musique, l'Elfique tout est beau la dedans.
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S
Bien sûr, je vois très bien cette scène. Je pense que je connais cette trilogie à peu près par coeur puisque j'avais pour habitude de la regarder tous les ans, disons de 2006 à 2013. Ça fait déjà quelques années que je veux me la refaire mais je n'ai jamais le temps... Ça me manque un peu.
M
Merci pour ce très belle article !<br /> <br /> Si tu aime tant la nostalgie et ce genre de film, Je ne peux que te recommander cette mini-série (très courte, avec un début et une fin) espagnole "Foodie Love" : l'histoire de deux célibataire trentenaire qui se rencontrent à Barcelone au gré de repas. <br /> <br /> C'est simple, si tu a adoré la Trilogie de film "Before" de Richard Linklater, et que tu souhaite retrouver cette même alchimie des personnages, la puissance des dialogues et la beauté d'une relation naissante, napper par de doux moment de mélancholie (parfois très très poignant), fonce !!<br /> <br /> On se laisse enivré par ce duo au combien touchant et attachant à travers leurs rencontre en temps réel. Le parallèle entre la nourriture et l'amour offre des vrai moment poétique. Une ambiance chaleureuse s'en dégage et qui fait tout simplement du bien.<br /> Personnellement, il y'a deux scène qui m'ont fais ressentir des frissons et émotions extrêmement fortes, que j'ai rarement ressentis ailleurs<br /> <br /> En bref, une mini-série de seulement 8 épisodes, 30 min chacun, avec en prime une apparition d'Agnès Jaoui, et cerise sur le gâteau : C'est sur Arte et c'est GRATUIT !!
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S
Oh là, tu m'intéresses ! J'irai voir ça dès que j'aurai un moment, si c'est dans la vibe des Before ça ne peut que le plaire. Enfin faut voir comment c'est fait, mais ça m'intrigue, je n'en ai pas entendu parler ! <br /> <br /> Pour rester dans ces thèmes-là, je pensais commencer la série Cobra Kai bientôt, en mémoire du karaté que j'ai longtemps pratiqué, et de la nostalgie Karaté Kid bien sûr, films de mon enfance.
T
Ah bah on est ensemble, c'est clairement ce genre de scène que j'apprécie le plus et qui dégage chez moi quelque chose de particulier, j'ai une sensibilité spéciale aussi et c'est pour ca que au delà de la scène en elle-même la musique joue un rôle hyper important dans un film.<br /> <br /> Pour Spielberg je pense qu'il est arrivé à un stade de sa vie où il regarde plus en arrière et en disant ca je pense aussi à Clint Eastwood avec Cry Macho, je crois arrivé à un moment certains cinéaste reviennent à leurs fondamentaux, on peut même cité Scorsese avec The Irishman.<br /> <br /> Pour citer les films de ton article, les souvenirs que j'ai de Il était une fois en Amérique c'est la musique déjà et puis l'explication à la fin entre De Niro et James Woods.<br /> Retour du Roi, la charge des Rohirrims, des frissons à chaque fois que je vois la scène.<br /> Pour l'Ours moi c'est plus les chiens tués par l'ours qui m'avais traumatisé un peu.<br /> <br /> Mais c'est pour ca que ton article est hyper intéressant parce que c'est la que tu vois que tout ce qui te fait vibrer maintenant à lien de près ou de loin avec l'enfance ou des émotions lointaines. Que t'es goûts de maintenant sont liés à ce que t'as pu voir il y'a plusieurs années, même si c'est pas le cas pour tout.
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S
Oui, après pour Le Retour du roi je pensais plutôt à la fin en elle-même, on oublie souvent de remarquer à quel point l'émotion est intense pendant les 20 dernières minutes alors qu'absolument aucun personnage principal n'est mort... C'est rare. <br /> <br /> Mais la charge des Rohirrims est sûrement la scène la plus épique du cinéma.
T
Justement j'allais te parler de Ready Player One, qui aborde bien ca avec toutes les références qu'il y'a dans le film sans jamais en faire trop.<br /> <br /> Vu que tu as dit que t'aimais bien quand les personnages sont ramenés aux émotions de leurs passés t'as du apprécié Garden State, c'est clairement le thème que tu définis la, le mec un peu pommé qui doit faire face à son enfance et à son père en retournant chez lui pour l'enterrement de sa mère. Et au delà de ca la scène qui m'avais marqué chez moi, je ne sais pas si tu vois laquelle, c'est quand ils regardent la cassette de patinage chez Natalie Portman, avec la mélodie derrière je sais pas comment définir ca mais c'est touchant mais en même c'est pas une scène super importante.<br /> <br /> Après moi j'ai jamais étais trop fan des reboots et tout ca, Ghostbusters ca à marché à l'époque parce que justement c'était cette époque là avec ces acteurs là, t'avais tout qui allait dedans Bill Murray en premier et c'est un peu moins le cas aujourd'hui et Jumanji j'en parle même pas, le film à tué l'âme du premier juste pour faire des entrées.<br /> <br /> C'est un peu pour ca aussi que j'ai pas été voir Matrix Resurrections, je suis tellement attachés à la Trilogie que j'ai pas trop envie de que ca change pour moi à cause d'un dernier film pour lequel je doute un peu.
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S
Pareil, je n'aime pas du tout les reboots, je ne suis allé en voir aucun. J'ai juste adoré aller voir Matrix 4 parce que je savais que ce serait e l'anti fan-service et que ça fait du bien, justement, de ne pas jouer sur cette nostalgie pourtant évidente.<br /> <br /> Garden State évidemment, j'ai adoré ce film et j'ai un souvenir très précis de cette séquence du patinage alors que je n'ai vu le film qu'une seule fois il y a 10 ans. Effectivement il y a une vraie magie mélancolique, j'y suis sensible.<br /> <br /> Et puisqu'on parle de Ready Player One, je pense que globalement Spielberg prend un tournant de nostalgie depuis quelques années, notamment sur son propre travail passé. Et puis c'est évident avec West Side Story même si je ne l'ai pas vu. Il y a par ailleurs une "nostalgie Spielberg" assez répandue au cinéma / TV, avec Strangers Things ou Super 8 de J.J. Abrams il y a quelques années.
T
Salut, alors je pense que tu viens de poser des mots sur quelque chose qui doit animer vraiment beaucoup de monde, en tout cas j'en fait partie.<br /> <br /> Le fait que tu cites la nostalgie comme un socle ou une sorte d'addiction liée à ta cinéphilie me parait maintenant si évident et je ne m'étais jamais vraiment posé la question. Car pour moi je continue à regarder des films pour essayer de retrouver des émotions que j'ai connu lors de premiers visionnages ou au tout début de ma cinéphilie.<br /> <br /> La première réaction que je me suis faite à la fin de Eternal Sunshine Of the Spotless Mind a été de me dire que de retirer ce film de ma mémoire pour pouvoir ressentir ce que j'ai ressenti lors du premier visionnage serait mon vœux le plus cher, par la suite je me suis dit que ca pourrait être le cas pour tout les films qui m'ont littéralement retourné.<br /> Et d'ailleurs je remarque que ce n'est pas étonnant que mes films préférés sont ceux que j'ai vu pendant mon enfance ou mon adolescence car ils résonnent d'une façon particulières, le fait que ca marque une partie d'une vie ou que ca réveil des souvenirs je sais pas.<br /> Mais je pense que rien que le fait de se souvenir de l'émotion ressentie lors d'un film des années après le rend encore meilleur et renforce son attachement.<br /> <br /> J'ai un peu le même reflexe de timbré de me mater une scène encore et encore pendant des semaines, je me rappelle que la scène de la rafle dans La liste de Schindler m'avais hantée pendant 1 mois, et c'est la que tu te rend compte que la musique aussi joue un très grand rôle la dedans.<br /> <br /> Fin bref encore un super article en tout cas.
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S
Merci ! Oui je pense que tout le monde ressent ça à un moment ou un autre mais je ne suis pas sûr que tant de gens soient si attachés à cette sensation. <br /> <br /> On le ressent aussi à travers les scénarios récents et les mouvements de foule pour des reboots etc. Il y a globalement une mouvance nostalgique rien qu'à voir le nombre de suites d'anciens films qui débarquent sur les écrans depuis quelques années (Jumanji, Ghostbusters etc). Et puis on a aussi des films comme Ready Player One qui sont marqueurs de génération.