Maintenant que ma fille est en âge de voir des longs-métrages (en dehors du cinéma d'animation), ça fait quelques mois que je commence à lui faire découvrir quelques jolis films de mon enfance. J'ai déjà prévu pour elle une liste de quinze films qui ont marqué ma jeunesse, et je pensais en profiter pour en parler ici au fur et à mesure de nos visionnages. Je n'ai pas revu la plupart d'entre eux depuis plus de 20 ans et il me paraissait intéressant de voir si mes souvenirs d'enfant émerveillé ont évolué.
Cet après-midi, j'ai donc revu Casper pour la première fois depuis de nombreuses années et je suis ravi de voir qu'il n'a pas baissé dans mon estime. Le film peut à la fois amuser les enfants avec ses gags efficaces comme émouvoir les adultes avec le thème du deuil, assez osé ici puisqu'il s'agit surtout d'évoquer la mort d'un enfant, en plus de celle d'une mère. En effet, même si Casper était explicitement défini comme un enfant décédé lors de sa création en 1940, l'idée avait été abandonnée par Harvey Comics lorsqu'ils en ont acheté les droits en 1952. Ils jugeaient en effet que ça rendait le personnage trop triste. Ce n'est donc que 40 ans plus tard que cette idée d'attribuer un passé d'être humain à Casper fut réintégrée avec ce film de Brad Silberling, et c'est précisément l'un des points forts du Casper de 1995.
Mais ce n'est pas tout car, en plus de donner une certaine profondeur au personnage de Casper, ce film ne manque pas de qualités. Il est assez troublant de voir à quel point les CGI sont nets et propres concernant le design des différents fantômes, qui s'intègrent à la perfection aux images réelles. Le film va fêter ses 28 ans et, pourtant, il ne semble pas avoir pris une ride en terme de rendu visuel. Contrairement à ce que je craignais, la plupart des scènes qui avaient marqué mon enfance ne m'ont pas parues désuètes. Mieux encore : j'ai évidemment saisi davantage de choses que lorsque j'étais gosse, qui ont clairement échappé à ma fille tout à l'heure. Les caméos, par exemple, sont assez tordants. Celui de Dan Aykroyd comme ghostbuster permet d'attaquer le film en beauté, et les brèves apparitions de Clint Eastwood, Mel Gibson ou le Gardien de la Crypte dans le miroir sont délirantes.
Par ailleurs, en dehors de ces caméos, les deux acteurs principaux sont fabuleux. Bill Pullman est assez drôle et, même s'il doit passer par diverses grimaces excessives pour confirmer le côté "jeune public", il est parfaitement touchant et sincère notamment dans la conclusion du film. Christina Ricci, quant à elle, est un vrai bonheur à suivre d'un bout à l'autre. L'actrice de 15 ans, qui brillait déjà dans le rôle de Mercredi Addams quelques années plus tôt, trouve en Kat un autre personnage taillé pour elle. Le reste du casting, quant à lui, est assez décevant lorsqu'on revoit Casper avec des yeux d'adulte, notamment les deux antagonistes "bêtes et méchants" qui sont là uniquement parce que cette recette fonctionne auprès des enfants depuis Les 101 dalmatiens ou encore (au hasard) Beethoven 1&2. Il est évident que sans la présence de ces deux débiles, Casper aurait gagné en crédibilité, ce qui n'en fait donc pas un ultime chef d'œuvre.
Fort heureusement, le film se concentre très peu sur les deux acolytes et leur superficielle quête du trésor, car la majorité de l'intrigue est centrée sur le lien qui unit Kat et Casper : le deuil. Elle, très attachée à une photo sous cadre de sa mère disparue, a terriblement peur que le temps lui fasse oublier ce visage. Lui, décédé depuis plusieurs années, a pratiquement tout oublié de sa vie avant la mort. Ce n'est que lorsque Kat lui recréera sa chambre d'enfant que les souvenirs de Casper remonteront, jusqu'au drame qui l'a condamné à errer dans le manoir. La plupart de ces scènes sont très touchantes et bien amenées, plus que la pseudo-romance que le film veut nous vendre dans les dernières minutes. Cependant, tous les thèmes traités dans Casper ont un sens et sont là pour appuyer des questionnements chez les enfants à travers l'importance de l'amitié et de la stabilité, la question de la vie après la mort et du deuil, ou encore une ode à la tolérance (ne pas se fier aux apparences).
Reparlons quand même de la conclusion du film. Elle est loin d'être parfaite, car il est difficile de comprendre ce choix de rendre Casper amoureux de Kat, mais elle l'est du point de vue de James, le père de Kat. En effet, les fantômes de la maison aident James à reparler une dernière fois à sa femme devenue ange, lui permettant ainsi de mettre un terme à cette "œuvre inachevée", de passer enfin à autre chose. L'émotion est au rendez-vous dans une scène d'une très grande beauté, où James Horner nous inonde de l'une de ses compositions musicales les plus magnifiques.
Des années plus tard, même sans avoir réécouté ces notes depuis 10 ans, je me souvenais avec précision du thème musical du film. La musique de James Horner est ici douce et nostalgique, appuyant sur des émotions qui augmentent proportionnellement à l'âge du spectateur. Je terminerai donc cet article sur ce qui me semble être la plus grande qualité de Casper : cette inoubliable mélodie au piano ci-dessous à partir de 1:05. J'en pleurerais. J'ai beau avoir 35 ans, lorsque ces notes résonnent dans ma tête, elles sont accompagnées du plus grand frisson qui soit. Ma fille, elle aussi, a adoré ça.