Voilà une phrase que je prononçais régulièrement il y a 10 ou 15 ans, et je réalise depuis quelques années seulement à quel point elle est débile. Déjà, c'est en France que le cinéma est né, avec notamment le cinématographe des frères Lumière en 1895. Sans tomber dans le chauvinisme, on peut affirmer que notre pays est le berceau du 7e art. Cependant, cet argument n'en est pas un et, si jamais vous faites aussi partie de cette catégorie de gens qui affirment que "le cinéma français, c'est d'la merde !", prenons un instant ensemble pour remettre en question cette phrase un peu trop facile.
Sous cette phrase se cache un sentiment qui a pris une place prépondérante en France, celui qui consiste à dire que le cinéma français se divise en deux catégories : les comédies populaires un peu merdiques, et les films d'auteurs chiants comme la mort. Il faut admettre que le cinéma français n'est pas aidé par les médias, ni par le box-office, qui mettent constamment en valeur des grosses productions comiques qu'on peut tout à fait qualifier de bouses à bien des égards, mais qui contentent une assez grande partie de la population. Il est assez logique que, si des films comme Camping ou Qu'est-ce qu'on a fait au bon dieu ont été d'énormes succès dans les salles françaises, il devient assez naturel de mettre constamment en avant des productions du même type. Au bout d'un moment, le spectateur lambda ne voit que ces films à l'affiche et n'entend parler que de ces films dans les médias. Il en conclut alors que le cinéma français, oui, c'est vraiment de la merde.
Je suis tombé dans ce travers moi-même lorsque j'étais jeune, à une époque où j'ignorais qu'il puisse exister des films français de qualité dans mes salles de cinéma favorites. J'avais vaguement entendu parler du cinéma français des années 60-70, de l'époque bénie de la Nouvelle Vague et des polars à la Jean-Pierre Melville, mais je n'osais pas m'y aventurer car je me fiais au préjugé classique : "la Nouvelle Vague, c'est chiant". Au fur et à mesure de mes découvertes, cependant, j'ai fini par me laisser tenter afin de forger mon propre avis, et je pense que c'est le visionnage de Vivre sa vie qui m'a complètement retourné le cerveau, qui a été le déclic. Mon article de l'époque (qui date de plus de 10 ans, putain ça passe vite...) parle de lui-même. Depuis ce jour, j'ai appris à découvrir de vieux films français, et je continue toujours cette exploration car de nombreux monuments du cinéma français manquent cruellement à ma culture.
Alors, d'accord, pourrait-on me dire, le cinéma français a eu sa belle époque. Mais aujourd'hui, que reste-t-il de tout cet héritage ? Encore une fois, je pense qu'il faut apprendre à ne pas se contenter de ce qu'on nous montre. Si on ne fait pas l'effort de rechercher, si on fait le strict minimum, alors on entend uniquement parler des films qui nous sont matraqués dans les grands médias... et c'est souvent de la merde, oui. C'est vrai, on a eu droit en 2022 à Qu'est-ce qu'on a tous fait au bon dieu, à Ducobu président, à Maison de retraite, Permis de construire, etc. Cependant, si on se penche vraiment sur ce que le cinéma français nous a proposé l'an dernier, on remarque rapidement que ces comédies populaires ne représentent qu'une infime partie de ce qui sort réellement en salles. Nous avons quand même, en France, des cinéastes comme Gaspar Noé, Leos Carax, Quentin Dupieux et j'en passe, mais aussi des films aux auteurs moins connus qui prouvent que le cinéma français est toujours bien présent. Ce n'est pas parce que Les blagues de Toto a accumulé 1 million d'entrées en 2020, contre 89000 pour Le dernier voyage, que le cinéma français est devenu de la merde. C'est juste que les stratégies marketing tendent systématiquement à favoriser les productions qui vont rapporter du fric, même si c'est de la bouillie.
Bref, aujourd'hui je n'ai plus de problème avec ça : j'aime le cinéma français, profondément. J'ai envie de mettre des claques au Sebmagic âgé de 20 ans qui aimait raconter que le cinéma français, c'est de la merde, alors qu'il n'avait jamais essayé de l'approfondir ou de le découvrir. Si on fait le tri, en fait, le cinéma français regorge de milliers de pépites depuis presque 130 ans.
Voici, pour conclure, un petit montage vidéo que j'ai réalisé hier afin de déclarer mon amour au cinéma français à travers 100 films, sur la musique Veridis Quo de Daft Punk.