Avec ce retour, Kyan Khojandi surprend dans tous les sens du terme : que ce soit au niveau du timing (incroyable que ce projet soit resté secret si longtemps !) comme de l'ambition, on est servis. Bref prend un virage à la Kaamelott avec une évolution du format bougrement intéressante, et surtout des idées audacieuses et surprenantes. Une vraie réussite.
Attention, ça spoile.
Les avis sur la série sont dithyrambiques, peut-être parfois un peu trop car je ne crierai pas au chef d'œuvre ultime comme certains ou certaines (Twittos notamment, est-on surpris ?), mais il faut bien saluer lorsqu'une création française sort du lot de la sorte avec une proposition aussi imprévue que singulière. Kyan Khojandi ne surprend pas totalement lorsqu'il développe des thèmes plus sérieux voire dramatiques, car tout spectateur attentif aura déjà perçu des indices flagrants dans la première saison. Bref saison 1 était en effet parcourue de moments malins ou nostalgiques qui en faisaient déjà une œuvre à part à l'époque. Ce qui surprend, c'est l'ampleur des moyens qui ont permis de passer d'une petite série bien fichue à quelque chose de quasi cinématographique parfois, avec des idées de mise en scène plutôt dingues pour un tel format, mais aussi des ambitions visuelles stupéfiantes. Inutile de parler comme tout le monde du passage en mode film de genre SF français dans l'épisode 3, je ne m'attendais pas à ce que Khojandi pousse le curseur de l'audace aussi loin.
Outre les talents de réalisation qui aboutissent parfois sur des idées géniales (par exemple : le contexte derrière une simple photo de mariage), j'ai adoré que Kyan Khojandi prenne son temps pour développer certains délires, quitte à y passer parfois plusieurs minutes entières. Le gars y va à fond et sans hésiter, c'est beau à voir. Là encore, il n'est pas original de ma part de citer le stage des tontons beaufs absolument délicieux, ou encore le reportage sur les tocs qui s'éternise mais passe parfaitement bien. L'humour, comme souvent avec l'acteur-réalisateur, est aussi raffiné que doux, et tombe juste à chaque fois.
Sur la forme narrative, le format de 35 minutes se prête parfaitement au ton de cette histoire tout en conservant l'âme d'origine de la série. Si de nombreux moments sont plus posés, plus développés (heureusement !), chaque épisode a tout de même droit à ses instants dynamiques qui rappellent le montage et la voix off du matériau de base. Tout s'alterne et s'enchaîne avec fluidité et c'est balaise : on ne ressent ni ennui, ni sensation de trahison de l'esprit original.
Qui plus est, le propos de la série est particulièrement passionnant, notamment dans le traitement du personnage principal "Je", qui est ici clairement mis en cause voire dénigré pour sa personnalité. Ce personnage est bien loin d'être parfait et on nous explique pourquoi il ne l'est pas, et comment il pourrait progresser. Toute la partie lors de laquelle il se remet en question sur son comportement avec Sarah est brillant, j'ai beaucoup aimé la place que prenait Alice David dans cette saison. De même, sa relation avec son frère, joué par Keyvan Khojandi, est écrite avec grande subtilité : la séquence où les deux frangins visitent leurs souvenirs pour expliquer à l'autre ce qu'ils ont ressenti / compris / interprété est probablement mon moment préféré de toute la série.
Bref, j'ai adoré Bref. Je vous la conseille si vous souhaitez passer un moment plein de subtilité, d'émotion et de rire (car oui, tout de même, la série reste très drôle).