Dans la catégorie des films aux jolis titres à rallonge se trouve, aux côtés de Eternal Sunshine of the Spotless Mind, l'un des quelques films réalisés par Paul Newman. The Effect of Gamma Rays on Man-in-the-Moon Marigolds est un drame sorti en 1972, qui raconte le quotidien difficile d'une mère dépressive et de ses deux filles.
De l'influence des rayons gamma sur le comportement des marguerites est un film naturaliste : l'image est froide, la représentation de la réalité est crue et sans artifices afin de montrer la pauvreté et les conditions difficiles dans lesquelles vivent les personnages. J'ai beaucoup aimé les thématiques abordées dans le film, notamment cette métaphore qui découle du titre. La fille cadette, Matilda, est une gamine intelligente et timide, elle mène un projet scientifique pour son école qui consiste à étudier l'effet produit par les rayons gamma sur les marguerites. Elle constate que certaines fleurs réagissent mal, voire meurent, tandis que d'autres évoluent positivement grâce à des mutations. Le parallèle avec cette petite famille est évident et intéressant : les deux filles sont exposées au comportement toxique de leur mère et chacune va évoluer différemment face à ces conditions de vie difficiles. Matilda, d'un côté, va réussir à s'en sortir et à gérer les sautes d'humeur de sa mère, tandis que Ruth va subir cette influence et vivre une existence stressante, absorbant le comportement de Beatrice comme une éponge.
Le casting est fabuleux, j'ai été bluffé par les trois actrices qui nous plongent dans cette misère sociale et affective. Joanne Woodward est exceptionnelle du début à la fin, son personnage est si toxique et embarrassant qu'elle place le spectateur lui-même dans une position de gêne et de froideur. De même, Nell Potts et Roberta Wallach sont parfaites, tout en subtilité. On ressent profondément le mal-être de chacune d'entre elles de deux manières différentes : Matilda garde tout à l'intérieur avec calme, tandis que Ruth explose. Beatrice, quant à elle, est dans un état d'insécurité permanent et on devine à quel point sa vie a dû être difficile pour en arriver à un tel niveau de cynisme et de névrose, ce qui la rend très humaine. Les relations mère-filles sont à la fois glaçantes et captivantes.
Quelques touches d'humour viennent agrémenter le film grâce à Nanny, mais il reste globalement très froid et ne laisse que peu de place à l'amusement. Au milieu de tout ça, le message est lumineux et plein d'espoir : la beauté et la force peuvent naître, surgir de n'importe où, même dans des conditions extrêmement défavorables. Le film, issu d'une pièce de théâtre de Paul Zindel, nous montre qu'il est possible d'éclore et de s'épanouir même lorsque ça semble impossible.
Bref, De l'influence des rayons gamma sur le comportement des marguerites fait partie de ces films qui nous plongent dans une ambiance particulière, et qu'il est difficile d'oublier. Mention à la séquence lors de laquelle Beatrice débarque à la remise de prix, un moment intense et magistralement interprété.