Voici quatre films qui ont bien failli se retrouver dans mon top 500, pour diverses raisons. Je vous les conseille sans hésiter.
Alice au pays des merveilles (1903)
Ce film, réalisé par Cecil Hepworth et Percy Stow, est un court-métrage de 12 minutes qui a pour particularité d'être la toute première adaptation cinématographique de l'œuvre de Lewis Carroll. En 1903, seulement 8 ans après la naissance du cinéma, le film était alors le plus long film jamais réalisé en Angleterre et c'est aujourd'hui un morceau d'histoire très précieux. En effet, Alice au pays des merveilles est l'un de ces films au parcours extraordinaire, de ceux qui auraient dû disparaître pour toujours avant d'être miraculeusement retrouvés. Le cinéaste Cecil Hepworth ayant fait faillite en 1924, il avait fait fondre tous les négatifs de ses films pour en récolter l'argent, et c'est seulement en 1963 que le film a refait son apparition comme par magie dans le grenier poussiéreux d'un cinéma à Hove : une unique copie, oubliée ici, la seule qui existe à ce jour.
Les bandes étaient en très mauvais état, comme on peut le voir aujourd'hui sur la version restaurée par le British Film Institute en 2009. Sur les 12 minutes d'origine, il n'en reste plus que neuf, et bon nombre d'images ont été gravement endommagées. Pour autant, voir le film en 2025 sur Youtube est un miracle et c'est toujours émouvant de découvrir de telles œuvres, sauvées in extremis. D'autant qu'Alice au pays des merveilles est un sacré témoignage des essais et des idées des cinéastes de l'époque, avec quelques effets spéciaux comme l'apparition du Chat de Cheshire dans l'arbre ou encore le rapetissement / agrandissement d'Alice lorsqu'elle boit la potion. Je vous laisse l'apprécier ci-dessous :
La princesse aux huîtres (1919)
Je ne m'attendais pas à rire autant en découvrant ce film qui a fêté ses 100 ans il y a quelques années. La princesse aux huîtres dure 1h et raconte l'histoire de la fille du magnat des huîtres aux Etats-Unis, aussi capricieuse que son père est paresseux. La princesse, jalouse qu'une autre femme se soit mariée à un prince, pique une crise et ordonne à son père de lui trouver un mari sur-le-champ. Dans la précipitation, elle se trompe et épouse le valet d'un prince qu'elle visait. Le film est très drôle, absurde, avec un rythme étonnamment rapide voire frénétique pour l'époque, ce qui le rend particulièrement plaisant et dynamique à regarder. Ossi Oswalda est affreusement géniale dans le rôle d'une fille pourrie gâtée, tandis qu'Harry Liedtke est délicieux durant la dernière partie du film. Bref, une jolie perle d'Ernst Lubits à découvrir ci-dessous (activez les sous-titres pour comprendre les cartons).
Rebecca (1947)
Une jeune femme timide épouse un riche veuf, Maxim de Winter, et s'installe dans son manoir : Manderley. Là-bas, malheureusement, elle se heurte au souvenir de Mme de Winter, la première épouse décédée. Le premier film d'Alfred Hitchcock pour les USA est un classique, qui m'a surtout marqué pour son ambiance visuelle et sa photographie. Au début, j'étais presque hypnotisé par les décors majestueux et le travail sublime de la caméra, certains plans sont remarquables pour instaurer une atmosphère oppressante ou mystérieuse. Il est juste dommage que le film pêche un peu par son scénario très répétitif : entre la gouvernante qui semble tout droit sortie d'un film de vampires et le personnage principal qui a l'air totalement incapable d'agir ou d'affronter les choses, je me suis vite lassé. Joan Fontaine a beau être une excellente comédienne (et j'ai admiré son jeu à de multiples reprises), son personnage est si creux qu'elle n'a même pas de nom. La résolution de l'affaire, quant à elle, déçoit un peu et j'avoue que je m'attendais à mieux de la part du maître du suspense. Rebecca est tout de même sublime sous plein d'aspects et je vous encourage à le voir si ce n'est pas fait.
Gangs of New York (2003)
Celui-là a bien failli finir en coup de cœur. Une fois de plus, Gangs of New York prouve que je préfère largement l'ère DiCaprio que l'ère De Niro chez Martin Scorsese. Les deux premières heures sont magnifiques, à grands renforts de mouvements de caméra remarquables et d'une tripotée d'acteurs de haute volée. Franchement, il faut se lever tôt pour trouver un casting comparable ailleurs au cinéma, car ce n'est pas si fréquent de voir autant de têtes d'affiche se donner la réplique. Il faut évidemment citer Leonardo DiCaprio, parfait comme toujours, un Daniel Day-Lewis aussi fou qu'on l'imagine, mais également Cameron Diaz, que je n'attendais pas dans un tel rôle mais qui est époustouflante d'un bout à l'autre, John C. Reilly, Liam Neeson, Jim Broadbent, Henry Thomas (le petit Elliot d'E.T., visage sur lequel j'ai mis plusieurs longues minutes à remettre un nom), Brendan Gleeson (à jamais dans mon cœur), ou même Stephen Graham et Eddie Marsan. Martin Scorsese s'est même attribué un petit caméo en début de film, bref...
Gangs of New York est visuellement superbe, que ce soit au niveau de la réalisation que de la photographie, des décors reconstitués absolument incroyables (on s'y croirait). C'est un projet colossal, épique, nerveux, entre récit de vengeance et fresque historique. La musique, signée Howard Shore, alterne des ambiances irlandaises et des compositions qui rappellent le Seigneur des Anneaux (sur lequel Shore travaillait aussi à cette période). Le seul hic : je l'ai trouvé un peu trop long dans son dernier acte, qui aurait mérité d'être écourté d'une bonne demi-heure. Après deux heures de sensations, en effet, Scorsese m'a perdu et je me suis retrouvé en plein ennui lors de la guerre civile. J'ai également trouvé regrettable que Jenny (Cameron Diaz) passe à la trappe si vite alors que son personnage était à la fois mystérieuse et passionnante. C'est franchement dommage car l'ensemble est de haute facture et que les dernières secondes du film m'ont mis un coup de poing dans l'estomac : je ne m'attendais pas à ce timelapse mélancolique pour souligner le propos du cinéaste : les Etats-Unis se sont construits dans la violence, le racisme et le sang. Bref, Gangs of New York est immense même s'il vacille par moments. Je vous le conseille.