Sorti en 1962, L'homme qui tua Liberty Valance est un western au casting 5 étoiles dont le scénario m'a étonné. Loin des westerns cowboy contre cowboy, en effet, le film de John Ford présente des situations et des personnages très variés tout en évitant les clichés du genre. La richesse du scénario est assez remarquable et je vous le conseille d'urgence si vous ne l'avez jamais vu.
La grande force de L'homme qui tua Liberty Valance est sans doute cette réunion d'acteurs légendaires. Chacun, à sa manière, apporte une chose différente au récit. Premièrement, nous avons Stoddard, un jeune homme idéaliste et pacifiste magistralement incarné par James Stewart, qu'on trouve ici dans un rôle similaire à celui qu'il avait dans Mr Smith au Sénat en 1939. Ce type de personnage n'est pas si fréquent dans le western classique : ses valeurs de sincérité et de non-violence lui permettent d'emporter l'adhésion du spectateur. Face à lui, Lee Marvin est impérial en brute épaisse, sadique et imprévisible, accompagné notamment de Lee Van Cleef dans un second rôle discret. John Wayne, quant à lui, est nuancé et épatant en intermédiaire, à la fois désabusé par la loi du plus fort, qu'il estime inévitable, et intrigué par les progrès que Stoddard pourrait apporter à cette communauté. On ajoute à ça des grands noms comme Woody Strode, Edmond O'Brien, Andy Devine, John Carradine (recordman, ou presque, de la carrière cinématographique la plus prolifique), sans oublier bien sûr le côté pétillant et déterminé de Vera Miles, excellente d'un bout à l'autre : elle incarne quant à elle l'envie que le monde change.
Tout ce beau monde se croise et fait des étincelles, car les différentes personnalités des protagonistes donnent lieu à une multitude de relations différentes : entre amitié, rivalité, affrontement, médiation, domination. L'ensemble est servi par d'excellents dialogues et un scénario en béton, mais également par la mise en scène de John Ford. Le réalisateur troque ses paysages en Technicolor contre du noir et blanc et des espaces plus confinés. Il nous offre un film plus crépusculaire, voire testamentaire étant donné qu'il s'agit de l'une de ses dernières œuvres. L'homme qui tua Liberty Valance, en effet, parle de la fin d'un monde : celui des colts et de la loi du plus fort, qui laissent place à une société plus juste, plus cultivée et encadrée par des institutions. Il parle aussi de la manière dont l'Histoire est écrite, et relatée pour donner naissance à des mythes. Le titre, en effet, ne spoile pas autant que je l'aurais cru (et en écrivant cette phrase, je spoile un peu le film... ou pas).
Bref, j'ai adoré L'homme qui tua Liberty Valance, et j'ignore pourquoi je m'en étais fait une telle montagne. Un chef d'œuvre qui rejoint évidemment mon top 500.