Un condamné à mort s'est échappé - de Robert Bresson - Critique

Un condamné à mort s'est échappé - de Robert Bresson - Critique

     Robert Bresson, voilà un nom que j'entends depuis longtemps et qui m'a toujours donné envie. Hier soir, j'ai enfin pu découvrir le réalisateur français avec Un condamné à mort s'est échappé, film de 1956 qui raconte l'histoire de Fontaine, un homme condamné à mort par les allemands en 1943, et enfermé au fort de Montluc en attendant son exécution. Déterminé à en sortir, Fontaine va mettre en œuvre un plan, à partir des maigres ressources dont il dispose, pour organiser son évasion. Un chef d'œuvre.

 

     Attention : je vais spoiler de nombreux éléments du film, je vous conseille de le voir sans rien connaître à l'avance. Le film est notamment disponible sur Arte.tv.

 

Un condamné à mort s'est échappé - de Robert Bresson - Critique

      J'ai été saisi par l'atmosphère silencieuse du début à la fin : Un condamné à mort s'est échappé m'a happé pour ne plus me lâcher. Le scénario (surtout avec un titre pareil) est d'une simplicité redoutable, ça va droit au but et il n'y a aucune fioriture. Durant plus d'1h30, on est témoins, de A à Z, des actes et des idées du protagoniste pour mettre en place sa potentielle évasion. L'ambiance, froide et presque sans dialogues, est un délice. La voix off est ici essentielle (et il est rare que j'écrive cette phrase), car on se retrouve comme plongés dans les pensées du jeune homme : ses doutes, son espoir, sa peur. Le grain de l'image est sublime et les plans sont souvent intelligents, avec des gros plans sur les mains du prisonnier ou sur les objets qu'il récupère comme il le peut pour confectionner des cordes, un couteau ou des crochets. Ça parait simple, comme ça, mais l'écriture du film est remarquable : le spectateur est maintenu en haleine d'un bout à l'autre de ce récit, par ailleurs adapté de l'autobiographie d'André Devigny, le résistant dont est issue cette incroyable histoire.

 

Un condamné à mort s'est échappé - de Robert Bresson - Critique
Un condamné à mort s'est échappé - de Robert Bresson - Critique

      J'ai adoré le fait que chaque scène soit utile et palpitante, car je me suis impliqué dans chaque étape de l'entreprise du jeune homme. L'absence de musique nous immerge encore plus dans cette cellule : c'est comme si on y était, redoutant qu'un garde entende le craquement de la planche de bois ou découvre la petite cuillère dissimulée dans le drap. Tout est millimétré et précis, jusqu'au jeu des acteurs extrêmement sobres, notamment François Leterrier sur qui repose 95% du récit. Le comédien était totalement inconnu et amateur à l'époque, il a ensuite bifurqué vers la réalisation et n'est finalement connu en tant qu'acteur que pour ce rôle. 

 

Un condamné à mort s'est échappé - de Robert Bresson - Critique

      La dernière partie du film (l'évasion en elle-même), est pleine de tension et d'enjeux dramatiques, comme la longue hésitation de Fontaine pour tuer un garde allemand : seul moyen pour lui de mener son plan à bien. Toute l'évasion est captivante et, cerise sur le gâteau, la surprise est finalement dans la non-surprise : on passe 20 minutes à craindre une erreur qui n'arrivera finalement pas. La fin du film, par ailleurs, m'a donné un immense sourire. Les deux hommes se sont échappés, rideau final. Pas besoin d'en rajouter, le film a tenu sa promesse. 

 

      Bref, Un condamné à mort s'est échappé fait partie des plus beaux films d'évasion que j'ai pu voir. Contrairement aux Evadés de Darabont, je trouve que le spoil dans le titre est ici justifié et intéressant : on ne cesse de se demander s'il se révèlera faux et ça entretient un sacré suspense.

 

 

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Z
Tu peux te jeter sans crainte sur Pickpocket, Au Hasard Balthazar, Mouchette, Journal d'un Cure de Campagne... Malheureusement pour moi tu as commence par son meilleur (meme si de plus en plus j'entends cela dit de son Quatre Nuits d'un Reveur - que j'ai vu qu'une fois en VHS avant qu'il ne soit restaura et qui m'avait poliment ennuye).<br /> Et si tu as aime Un condamne... Il faut absolument que tu vois Escape From Alcatraz de Don Siegel ainsi que Le Trou de Jacques Becker, deux des meilleurs films de prison de tous les temps. Le Trou est totalement dans la continuation formelle du film de Bresson.
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S
Merci pour les conseils ! J'ai entendu parler de Le Trou, oui, je le tenterai. Et le Siegel aussi !
R
Un film palpitant, mais très austère. C'est le réalisateur préféré de ceux qui détestent les acteurs qui cabotinent.<br /> Son bouquin "notes sur le cinématographe" est assez passionnant, pour ce qu'il révèle sur la façon dont il voit le cinéma. Une manière de voir qui a largement influencé le cinéma français et mondial.
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S
Je note ta référence, merci ! Hâte de voir quelques autres de ses films, effectivement ça ne cabotine pas dans celui-là haha