Parmi ces quatre films découverts récemment, un coup de cœur se dégage, et ce ne fut pas celui auquel je m'attendais. En effet, deux d'entre eux sont des déceptions inattendues.
3 Billboards (Martin McDonagh, 2017)
Three Billboards Outside Ebbing, Missouri est un drame signé Martin McDonagh, réalisateur dont on ne parle pas assez à mon goût. Depuis la sortie de Bons baisers de Bruges en 2008 (son premier film), le cinéma de McDonagh me passionne pour l'originalité de son style. Ici, Frances McDormand incarne une femme dont la fille a été assassinée quelques mois plus tôt. L'enquête piétinant, elle décide d'afficher trois messages sur d'immenses panneaux à l'entrée de la petite ville afin de faire réagir les autorités.
3 Billboards, certes, est assez loin d'atteindre le niveau de In Bruges (qui reste la véritable pépite de McDonagh), mais le film concentre tous les gimmicks du réalisateur : une musique à la fois douce et dramatique signée Cartel Burwell, la présence d'acteurs de petite taille souvent touchants, et plus généralement des protagonistes hauts en couleurs, complexes et blindés de problèmes personnels. Le casting est exceptionnel, même McDormand dont le jeu m'a paru ici supportable (c'est rare pour le signaler). Je retiendrai aussi Sam Rockwell, génial en flic alcoolique, et Woody Harrelson dont le personnage est à mon goût le plus poignant dans cette affaire.
Encore une fois, Martin McDonagh est parvenu à jongler habilement avec le thriller, la comédie noire et le drame, pour aboutir à un film relativement inclassable, comme l'était Bons baisers de Bruges. Il manque peut-être un peu de liant entre tous les personnages, on s'égare parfois sur des chemins qui n'ont pas spécialement d'intérêt (l'ex-mari et sa nouvelle compagne).
Cinq pièces faciles (Bob Rafelson, 1970)
Je me demande si Jack Nicholson me décevra un jour. L'acteur a toujours figuré parmi mes chouchous et il confirme encore ce statut dans Cinq pièces faciles, où sa présence justifie à elle seule cette pastille "coup de cœur". L'acteur y incarne un type un peu paumé dans sa vie, qui ne cesse de fuir le monde. Il est accompagné de Karen Black, génialement irritante dans ce genre de road-movie psychologique dont l'atmosphère - contemplative et existentielle - me hante depuis déjà quelques jours.
La performance de Nicholson est magistrale : Bobby est un homme incapable de s'engager, qui ne parvient à trouver sa place nulle part, pas même dans sa propre famille. Le personnage est ambigu et pas nécessairement attachant, mais la mélancolie qui traverse le regard de l'acteur est saisissante. Chaque "pièce" (morceau de musique / acte du film) révèle un aspect du mal-être existentiel de Bobby, jusqu’à une scène finale qui m'a laissé bouche bée. Le dernier plan du film, sans musique, est une petite merveille qui me restera longtemps en tête pour sa triste sobriété.
L'armée des ombres (Jean-Pierre Melville, 1969)
Après avoir découvert et adoré Le cercle rouge il y a quelques semaines, je me suis attaqué à un autre film de Melville que beaucoup considèrent comme son plus important : L'armée des ombres. Malheureusement, je suis resté totalement à l'écart de cette intrigue malgré le talent indéniable des acteurs, mais surtout du cinéaste pour imposer des cadres magnifiques et des silences pesants dont je raffole. J'admets ne pas avoir réellement compris toute l'ampleur des enjeux. Autant Le cercle rouge était clair sur ses situations et ses personnages, autant j'ai eu du mal à y voir clair dans L'armée des ombres. Ainsi, l'atmosphère grise et austère, qui m'avait fasciné dans le premier, ne m'a pas aidé à être captivé par le second. Résultat : j'ai trouvé tout ça extrêmement long, et même certaines scènes superflues. C'est dommage, car la mise en scène est magnifique et soignée.
Gilda (Charles Vidor, 1946)
C'est, je crois, ma première rencontre avec Rita Hayworth, et quel plaisir de découvrir cette actrice ! Elle m'a marqué dès sa première apparition, son personnage est intrigant, avec du caractère. Il est dommage qu'elle soit au service d'une intrigue confuse qui tire sur la longueur... Heureusement, l'ambiance du film noir et le magnétisme de l'actrice sauvent l'ensemble, car Gilda ne brille pas vraiment pour son scénario ni pour la complexité des relations entre les personnages. Pas étonnant que l'image associée à ce film soit celle, superficielle, de "l'icône de cinéma", car il est difficile d'y trouver un autre intérêt.