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Kaamelott - Deuxième Volet [partie 1] - Critique

Kaamelott - Deuxième Volet [partie 1] - Critique

      J'ai énormément de choses à dire sur la première partie de ce Deuxième Volet, que j'ai enfin pu voir hier sur grand écran. Verdict : c'est une plus grosse déception que le Premier Volet : le film a de gros défauts incontestables et toute cette histoire commence à avoir de moins en moins de sens... Cependant, j'ai passé un excellent moment et je n'ai pas vu le temps passer : Alexandre Astier a toujours de superbes idées, j'ai beaucoup ri et j'ai adoré l'ampleur visuelle. Il en a encore sous le capot, comme on dit.

 

Kaamelott - Deuxième Volet [partie 1] - Critique

Le scénario

 

      Un peu de contexte pour les lecteurs de cet article : je suis un immense fan des six livres (parfaits) de la série Kaamelott, avec une préférence pour les deux dernières saisons plus sombres et plus profondes. Le premier film, quant à lui, m'avait beaucoup plu, il répondait globalement à mes attentes malgré des soucis de montage. 

     Kaamelott - Premier Volet était parvenu à relancer l'intrigue avec un scénario bien construit, des arcs narratifs intéressants ou surprenants, parfois même avec une véritable puissance émotionnelle. Je me souviens encore de ce que j'ai ressenti lorsqu'Arthur et Guenièvre se sont rapprochés en haut de cette tour, c'était sublime. Malheureusement, des sursauts tels que celui-ci, le Deuxième Volet n'en contient aucun. Après une nuit de sommeil, en effet, je constate qu'aucune scène du film ne me donne particulièrement envie de le revoir.

     L'intrigue manque cruellement d'évolution, et c'est même assez frustrant lorsqu'on quitte ces 2h20 : ce film ne raconte rien, malheureusement. J'ai beau chercher, je n'ai aucune idée de ce qu'Alexandre Astier veut raconter avec cette trilogie au cinéma, et c'est problématique. La dépression d'Arthur, sa recherche de descendance ne sont pas au cœur des événements et on peine à connaître réellement l'objectif final de cette histoire : la recherche du Graal ? L'affrontement contre Lancelot ? On n'en a absolument aucune idée, car rien n'est annoncé. 

     Pire : le scénario fait du surplace et revient même en arrière, et c'est probablement le grand défaut de cette première partie. J'ai bien conscience qu'il existe une deuxième partie, mais je ne comprends pas le découpage de ce Deuxième Volet. La conclusion du film tombe comme un cheveu sur la soupe, comme si Astier avait coupé un film de 5 heures en plein milieu, sans rien conclure. C'est un sacré problème, car chaque film est censé être structuré, avec un début, un milieu et une fin.

     Harry Potter et les reliques de la mort est un superbe exemple de film découpé en deux parties : chacun des deux morceaux tient tout seul, avec des résolutions d'intrigues, un rythme maîtrisé, une tension dramatique, de l'émotion, un cliffhanger habile. Pour ce genre de diptyques, les arcs narratifs sont censés se terminer, avoir un sens, donner envie de voir la suite. Ici, ce n'est pas le cas : la moitié des intrigues secondaires n'a aucun intérêt. On n'apprend rien. On ne sait pas où ça va, ni comment ça y va.

     On peut toujours justifier à coups de "attendez ! il faut d'abord voir la partie 2 avant de juger !", mais ça ne change pas le résultat : le film en lui-même ne raconte rien, le scénario semble vide. Pire encore : Arthur n'est quasiment pas présent dans ce film, alors qu'il représentait le cœur de la série. Le roi replante l'épée puis disparaît, c'est un éternel recommencement et ça sent le réchauffé. Quand va-t-il se réveiller enfin, bordel ? Pour un roi censé être "bientôt de nouveau un héros", le temps se fait long.

 

Kaamelott - Deuxième Volet [partie 1] - Critique

Le montage

 

       Tout ceci nous mène à un autre problème de Kaamelott - Deuxième Volet : son montage chaotique. La temporalité, notamment, est assez catastrophique car le film contient de grosses incohérences qu'Astier ne peut plus faire passer pour des anachronismes ou des erreurs volontaires. Car désormais, Kaamelott a pris un ton sérieux et épique. La construction narrative est censée suivre. 

     En soi, cette ambition est à saluer, et c'est pour cette raison que j'ai envie d'être indulgent et positif avec cette épopée : Alexandre Astier propose un projet de fantasy et d'aventure avec de gros moyens, c'est une belle production très rare en France. Il faut encourager ce genre de projets, et c'est pour ça que je considère Kaamelott comme une réussite, malgré tous ses défauts. Astier s'est imposé un défi : c'est un pari difficile, et j'aime ce risque.

     Malgré tout, le réalisateur n'est pas au top de sa forme sur le montage : le film manque de rythme et il existe de nombreux passages à vide durant lesquels on s'emmerde poliment. Certaines sous-intrigues sont clairement de trop, comme la quête du dragon opalescent qui n'a strictement aucun intérêt : ni scénaristique, ni dramatique, ni émotionnel. Le film aurait pu être resserré en éliminant toutes ces séquences inutiles, car 1h45 voire 2h auraient amplement suffi, surtout pour ce qu'il y a à raconter. Je veux bien entendre que les réponses seront données dans la partie 2. Que les arcs seront conclus. Mais ça ne justifie pas de délaisser la partie 1 de la sorte. 

      Le temps est extrêmement mal géré. La plupart du temps, on ne comprend pas vraiment quand se passent les actions, ni sur quelle durée. Les incohérences s'accumulent, notamment concernant les dernières minutes du film, censées se passer sur plusieurs mois. En effet, s'il faut un mois 1/2 pour parcourir la mer jusqu'en Sicile, alors ça signifie que Karadoc et son équipe sont enfermés pendant 3 mois (le temps que Venec avertisse Arthur et que celui-ci prenne le bateau à son tour). Or, la dernière image du film ne donne pas cette impression, c'est très étrange. Autre exemple : le démon invoqué par Lancelot en pleine nuit semble provoquer la disparition de la Dame du Lac... en plein jour. Quelque chose cloche.

 

Kaamelott - Deuxième Volet [partie 1] - Critique

L'image

 

      Maintenant que j'ai parlé des principaux points négatifs, je vais m'attarder sur le positif. Car du positif, il y en a.

     Cette partie 1 est ambitieuse visuellement, et ça fait plaisir. Que ce soit au niveau des décors, des lieux de tournage (jusqu'en Islande, tout de même !), ou tout simplement de la photographie, Kaamelott - Deuxième Volet est beau, c'est indéniable. A plusieurs reprises, Astier nous propose des soleils couchants ou levants magnifiques, qui renforcent le sentiment d'aventure avec ces quêtes de chevaliers qui partent au petit matin pour découvrir le monde. De ce côté, c'est parfaitement réussi. 

     De même, on ne peut pas enlever au film la qualité de ses effets spéciaux, bien supérieure à celle du Premier Volet. Toutes les séquences avec Lancelot sont à couper le souffle, qu'il s'agisse de la silhouette fantomatique du Roi Ban, du démon qui a une sacrée gueule, ou même de l'araignée géante dans une scène plutôt mémorable. Rien à redire visuellement, donc.

 

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Les personnages

 

     Je termine avec mon ressenti sur la plupart des personnages de ce film, car ce sont eux et leurs dialogues qui font la grande force de Kaamelott. L'humour, par ailleurs, est assez discret dans ce film, mais il fait souvent mouche : j'ai ri plusieurs fois grâce au talent des nombreux comédiens. Ceux-ci apportent effectivement beaucoup au film, car leurs répliques cinglantes et bien délivrées nous ramènent aux grandes heures de la série. Entre prises de becs hilarantes, dialogues absurdes et monologues plus sérieux, le film nous régale. La nostalgie, elle aussi, est subtilement disséminée et toujours réussie (les deux jumelles qui rejoignent Guenièvre dans son lit, c'était magique). Un seul défaut peut-être : ça gueule trop, beaucoup trop.

     Quelques acteurs n'ont plus leur verve d'il y a 15 ans et ça donne parfois quelques scènes faiblardes. Roparzh, Guethenoc, Séli, Elias et Guenièvre m'ont particulièrement dérangés. Anne Girouard peine à retrouver son phrasé de la série, et la jolie douceur de Guenièvre dans le Premier Volet semble avoir été abandonnée. On a le sentiment que le personnage redevient la cruche des premières saisons, c'est dommage. Le Duc d'Aquitaine, lui aussi, est terriblement inutile et mal géré. J'adore Alain Chabat et son costume surprenant, mais le personnage n'a rien à voir avec celui qu'on connaissait. 

     Globalement, pourtant, Astier prouve qu'il sait toujours diriger ses comédiens. C'est un plaisir, d'ailleurs, de voir de nouvelles têtes comme Haroun, Bougheraba ou Thomas VDB, dont le style et le phrasé s'intègrent parfaitement à l'univers de Kaamelott. On peut également citer Conle le Fameux, interprété par Daniel Mesguich, un nouveau personnage que j'ai hâte de découvrir dans les films suivants. Il offre une dynamique intéressante en bouleversant le duo de druides, car Merlin et Elias commencent franchement à tourner en rond...

 

Kaamelott - Deuxième Volet [partie 1] - Critique

     Du côté des grands absents, la disparition de Franck Pitiot est assez triste. Le choix de l'acteur de ne pas reprendre le rôle de Perceval est assez incompréhensible, surtout s'il a pu lire le scénario : son personnage commençait de toute évidence à prendre une importance capitale dans l'intrigue. On sent, en effet, que la quête de Karadoc / la Dame du Lac sera centrale pour la suite, notamment pour la recherche du Graal.

    Malgré tout, Astier nous glisse quelques pistes concernant l'avenir de Perceval à travers des lettres très drôles. Le personnage est présent malgré son absence, c'est plutôt bien géré. Le fait qu'il rôde autour de l'épée et du rocher laisse entendre qu'il pourrait s'en emparer dans les prochains films. A condition, bien sûr, que Franck Pitiot daigne revenir dans le Troisième Volet... On peut raisonnablement y croire, car le film se tournera probablement dans 3-4 ans, que l'eau aura coulé sous les ponts et qu'Alexandre Astier aura eu tout le loisir d'écrire une jolie partition pour le comédien. 

 

Kaamelott - Deuxième Volet [partie 1] - Critique

     Bizarrement, c'est davantage l'absence d'Anouk Grinberg qui m'a chiffonné. La comédienne tenait son rôle d'Anna de Tintagel à la perfection. La belle-soeur d'Arthur était terrible, menaçante, effrayante, grâce au jeu froid et délicieusement agressif de Grinberg. Dans ce film, c'est Virginie Ledoyen qui reprend ce rôle, et la comparaison est douloureuse. J'ai beau adorer cette actrice, elle n'a pas du tout la même présence qu'Anouk Grinberg, d'autant qu'Alexandre Astier lui a choisi un costume complètement raté : Anna ressemble maintenant à une méchante de Disney, et non à une menace assassine. Cela n'empêche que toute la séquence en Orcanie est particulièrement drôle et excitante, je l'ai adorée. Clovis Cornillac et (surtout) Guillaume Gallienne sont merveilleux.

     Une autre belle réussite réside dans l'arc Karadoc / la Dame du Lac. Jean-Christophe Hembert et Audrey Fleurot sont toujours aussi parfaits. En dehors d'Alexandre Astier lui-même, ce sont eux qui parviennent le mieux à faire revivre leurs personnages de la série. La scène lors de laquelle la Dame du Lac retourne sur son plan astral et tente de prévenir Arthur, malgré les bugs, m'a énormément fait rire. Qui plus est, c'est encore un beau clin d'œil à Star Wars, saga à laquelle Astier rend régulièrement hommage à travers son œuvre. 

     Du côté des jeunes, c'est plus difficile. Toute l'équipe de la quête du dragon opalescent aurait dû, à mon goût, ne jamais exister. Je ne pense pas qu'il était nécessaire de se faire chier à aller tourner en Islande pour une intrigue aussi inutile. Pour ne rien arranger, on ne peut pas dire que la bande des quatre jeunes comédiens soit très efficace... Ils sont clairement de trop.

 

Kaamelott - Deuxième Volet [partie 1] - Critique

      Je terminerai cet article en parlant de Méléagant, dont l'évolution m'a franchement déçu. Dans la série, Méléagant était un personnage sombre, imprévisible et flippant, sa présence était énigmatique et terrifiante. Ici, tout le potentiel du personnage est gâché par des répliques qui ne font vraiment pas le poids : Méléagant est devenu un vieillard apeuré et banal, il a perdu toute son aura démoniaque. Grosse déception. Heureusement, Lancelot devient de plus en plus intéressant, j'ai hâte qu'il se serve de sa nouvelle arme.

 

     Bref, j'ai passé un excellent moment devant Kaamelott - Deuxième Volet [partie 1], mais si je veux être totalement honnête, c'est mon cœur de fan de la série qui parle. Kaamelott est un projet d'auteur passionnant à suivre, j'adore voir naître ce genre de productions audacieuses dans notre pays. Objectivement, cependant, le film a beaucoup trop de défauts pour être qualifié de "bon" : sous-intrigues inutiles, montage qui part dans tous les sens, personnages beaucoup trop nombreux, et surtout : une grande impression d'inachevé. Reste à voir ce que donnera la partie 2, c'est à ce moment qu'on pourra décider de la réussite (ou non) du scénario. Pour le moment, je reste assez dubitatif, mais intrigué.

 

 

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R
J’avais trouvé le premier volet, qui se tenait au moins scenaristiquement, très moyen. Plat visuellement pour ne pas dire moche, et plus drôle par ses sketchs que palpitant par son intrigue.<br /> Ça a l’air mieux géré ici niveau image, mais je pense malheureusement à lire ta critique que je vais faire l’impasse et attendre la sortie de la deuxième partie pour le rattraper.
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R
C’est vrai que ça commence à dater, il n’est pas surprenant qu’il ai changé, il me semble qu’il est devenu beaucoup plus apaisé. J'ai peur aussi qu’il ne se force à faire quelque chose de cinématographique et d’excessivement épique sans parvenir à le lier avec le ton de la saga.<br /> Une histoire plus mineure, mais plus existentielle aurait peut être été préférable, plus personnelle.<br /> Paradoxalement, il a été bien plus intéressant au cinéma quand il a abordé des univers différents, y compris ceux des autres (comme pour ses Astérix en animation), qu’avec son univers fétiche.
S
Oui, c'est en demi-teinte, je trouve que toute l'ambition dramatique des livres V et VI peine à revenir. A vrai dire, je me demande si Astier est encore dans cet état d'esprit, c'est très bizarre.