L'histoire de
David et Madame Hansen est
toute simple. C'est l'histoire de deux êtres qui se croisent et qui vont vivre quelque chose d'unique, de très intense. A mesure que j'écris, je me rends compte à quel point la relation entre les
deux personnages est difficile à décrire. Tout commence par une simple procédure qui ne devait pas s'éterniser. Jusqu'à ce que David, intrigué par le comportement de sa patiente, se lie à elle de
façon profonde et souhaite en savoir plus sur le traumatisme qui la pousse à agir de la sorte. Alors qu'au début, il agit selon le protocole médical (restreignant sa vitesse de conduite, refusant
les cadeaux de Madame Hansen), David s'intéresse de plus en plus à sa patiente, à mesure qu'il la cotoie. Sa curiosité va le mener plus loin que prévu, plus tard que prévu, sur le chemin délicat
et douloureux d'un passé mystérieux.
Si le film met un peu de temps à démarrer, c'est bien le seul reproche qu'on peut lui faire. Dès que s'instaure la
relation entre les deux personnages, le film n'a cessé de me surprendre, de m'attendrir et de m'intriguer. Avec un rythme assez lent, le film tire sa force des dialogues et des acteurs. Les
personnages n'abondent pas et chacun d'entre eux est bien traité. Même les rôles secondaires sont soignés,
Victor Chambon et
Julie-Anne Roth apportant notamment de jolies touches d'humour inattendues, via des répliques et des situations que j'ai savourées. La femme de David est
un bijou d'écriture et
Alexandre Astier n'est pas tombé dans le cliché abruti de la dispute conjuguale irréversible que certains scénaristes
n'auraient pas hésité à intégrer. Bref, le scénario est un délice et le moment où le basculement opère dans la tête de David est presque jubilatoire, parce que le spectateur s'identifie à ce
personnage et souhaite également, avec lui, creuser un peu plus loin dans l'esprit torturé de Madame Hansen. Le fait que David décide de pousser les choses est un acte conforme au personnage, qui
montre visiblement un respect colossal pour sa patiente, un respect tellement fort qu'il ne peut pas simplement la ramener à l'hôpital puis rentrer chez lui. Le basculement se fait en douceur, le
film prend le temps de s'installer dans la première partie pour ensuite mieux monter en puissance jusqu'à l'apothéose finale. Mais ça ne signifie pas que la première partie du film est plate,
loin de là.
En choisissant
Isabelle Adjani pour tenir ce rôle,
Alexandre Astier n'aurait certainement pas pu faire de meilleur choix tant elle éblouit l'écran de son talent. Toutes les scènes dans la voiture sont des
perles au niveau de l'humour et des dialogues,
Adjani fait rire en même temps qu'elle intrigue, qu'elle émeut, et son personnage a une force
incroyable dès le départ. L'actrice est parfaite d'un bout à l'autre dans un rôle extravagant et difficile à tenir. Inutile de dire qu'avec le don d'écriture et le jeu d'acteur d'
Astier, le duo procure des scènes d'une drôlerie et d'une subtilité exceptionnelles. Lorsque le nombre de protagonistes double pour accueillir
Julie-Anne Roth et
Victor Chambon dans l'affaire, la qualité du film ne se désemplit
pas et l'arrivée de ces personnages permet au film de changer de décor. On sait alors que l'histoire va se complexifier et s'intensifier, tout en gardant les traces d'humour propres au
réalisateur. Quel ravissement, d'ailleurs, d'apercevoir par-ci par-là des airs (imperceptibles) de déjà-vu avec
Kaamelott, via la manière
qu'a
Alexandre Astier de s'exprimer, mais également par l'intermédiaire d'une mise en scène pas étrangère à ce qu'on connait déjà. Bien sûr,
on est très loin du Roi Arthur et des épisodes de la série, ce qui est à la fois troublant et savoureux parce qu'on n'y est pas habitués. Mais on reconnait quand même la patte du réalisateur,
notamment lors d'une scène entre David et Clémence au lit qui rappelle (dans la situation, dans les dialogues et dans la mise en scène) certains passages entre Arthur et Guenièvre. Cette façon
qu'a David de parler à sa femme est un régal, elle caractérise par ailleurs Alexandre Astier lui-même et c'est dans cette manière d'aborder un dialogue que réside le secret de sa réussite
humoristique. Mais le film est bien plus qu'un assemblage de dialogues amusants et dramatiques. Certaines scènes très poétiques et très intenses font du film une véritable réussite, comme en
témoigne l'une des dernières scènes dans la piscine (puis dans la voiture), frissonnante et magnifique que je ne dévoilerai évidemment pas ici. Toujours est-il que le dingue de belles bagnoles a
dû s'éclater.
Et c'est sans oublier l'excellente BO du film, très poétique et composée (bien sûr) par
A.Astier lui-même. Bref, voilà tout pour ce film qui signe pour
Alexandre Astier une belle entrée
dans le monde de la réalisation cinématographique.