Il est très rare de voir des films qui sortent autant de l'ordinaire, et nous gardent 2h30 constamment captivés et émerveillés. Je ne
regrette pas de l'avoir vu car il contient tout ce que j'aime au cinéma.
Ce film est une oeuvre d'art, vraiment de l'art pur, que ce soit au niveau esthétique comme métaphysique. Le film traite un sujet très simple
(celui du choix et de ses conséquences) mais de manière très compliquée et très dense.
Mr Nobody regorge de trouvailles absolument
magnifiques, à commencer par le début et cette histoire d'Ange de l'Oubli. Beaucoup de films traitent de la vie après la mort, mais c'est la première fois que j'en vois un s'attarder sur une
possible vie avant la naissance. Même au niveau philosophique, ce thème est passionnant et remet en question l'être humain en tant qu'individu, qu'âme : sans mon corps, qui suis-je ? D'où je
viens ? Pourquoi est-ce à moi qu'a été attribué ce corps ?
Deuxièmement, le film s'accorde le droit de traiter le thème du choix de façon sublime en nous montrant à peu près toutes les options que Nemo
Nobody peut envisager dans sa vie, notamment ce fameux dilemme (horrible) qui est à l'origine de tout ce bordel : doit-il rester avec son père ou partir avec sa mère ? De cet unique choix
découlent de nombreuses possibilités et Nemo les visualise toutes. En effet, l'Ange de l'Oubli a oublié de lui faire oublier sa vie avant-naissance, du coup il connait exactement son avenir. Mais
ce qui est fort et novateur (encore une fois), c'est qu'ici la notion de "vision de l'avenir" n'implique absolument pas l'idée du Destin et de "chemin tracé". Nemo est simplement capable de
savoir quelles conséquences vont avoir ses choix afin de faire systématiquement celui qui lui paraît être le meilleur.
A part ça, le film traite également du Big Bang et d'un éventuel Big Crunch, qui serait l'effet inverse de l'expansion de l'univers. Une théorie
sur notre univers développe en effet l'idée qu'à un certain stade, notre univers va arrêter de grandir pour faire machine arrière. Mais "l'espace" comme on l'appelle, porte mal son nom.
Effectivement, le film rappelle que selon la théorie des cordes, notre univers possèderait 9 dimensions (voire 10 ou 11 selon les versions), et qu'elles pourraient n'être pas toutes spatiales. On
pourrait imaginer deux dimensions temporelles, ou plus. Bref, je ne vais pas expliquer ce que dit déjà le film de façon géniale, toujours est-il que je suis fan de cette thématique, et que de
voir un tel film y faire allusion est jubilatoire.
Qui plus est,
Mr Nobody n'est pas seulement un scénario, c'est aussi un esthétisme impressionnant.
Rarement j'ai vu de si belles images, accompagnées d'une BO des plus savoureuses. La mise en scène/la réalisation de
Jaco van Dormael est du pur génie ! Le film regorge de
trouvailles somptueuses, de petites merveilles visuelles. Quasiment chaque plan nous subjugue avec un nouvel effet, tous aussi intelligents et bien foutus les uns que les autres. C'est carrément
de la folie d'en arriver là, je trouve, car toutes les scènes sont des bijoux d'inventivité et d'idées lumineuses. Le montage du film est très particulier et ne fait que rendre compliqué un
scénario simple, et c'est fort. La beauté des plans, des mouvements de caméra, les plans fixes sur les yeux, les transitions de dingue, tout est sublime et je dois dire que
Mr Nobody est pour moi l'exemple type du film "artistique". Les effets de flou, les ralentis, et un tas de procédés visuels assez novateurs qui nous en
mettent plein la vue, ça sort de l'ordinaire.
Et encore, ce n'est pas tout, car il y a aussi le casting ! Des acteurs qui sont tous absolument hallucinants.
Diane
Kruger est fidèle à elle-même, toujours aussi ravissante et poignante quand il le faut, de même pour
Sarah Polley que je ne
connaissais pas. L'élément du casting qui m'a le plus estomaqué est
Tony Regbo qui joue le rôle de Nemo à 15 ans (d'ailleurs le casting n'a
pas été fait à la légère, tant les ressemblances des acteurs jeunes/adultes sont incroyables). Il est très impressionnant, ultra crédible, tout comme
Juno
Temple à qui il donne la réplique.
Rhys Ifans est également excellent, mais bien sûr comment ne pas parler de
Jared Leto ? Ce mec me fascine à chaque fois, avec son regard de taré et sa capacité à nous happer avec lui au coeur de l'intrigue. Et puis le maquillage
pour lui faire paraître 118 ans est un sacré travail de malade, chapeau.
Pour finir, j'ai envie de dire qu'avec tout ça, le film est un sacré bordel pas facile à comprendre, mais un bordel fichtrement magnifique, qui se regarde
avec émerveillement à chaque seconde, tout en restant constamment dans la subtilité et la sensibilité. Le film prend son temps tout en nous captivant, s'arrêtant souvent sur les émotions des
personnages, sur leurs regards, tout ça avec une photographie de fou. Même le dénouement, après réflexion, est tout en beauté et n'est pas si mauvais que ça, au contraire. Bref, j'ai franchement
adoré et je ne comprends pas comment on peut descendre ce film : un pur bijou du cinéma, domaine pour lequel le surnom "septième art" prend ici toute sa valeur.
Tiens tiens, ça rappelle pas un autre film avec le même acteur ?