Tout le monde m'a dit que c'était LE chef d'oeuvre de
Scorsese, LE rôle de
De
Niro et LE film culte des années 70. Bon, pour ma part, je ne suis d'accord qu'avec une seule des trois affirmations même si j'ai beaucoup aimé le film. Cependant, il m'a laissé
avec quelques impressions de longueur, notamment dans les dialogues qui, parfois, ne racontent absolument rien.
Ce n'est pas mon film préféré de
Scorsese, j'ai par exemple préféré
Shutter Island ou même
Aviator. C'est une question de goût mais j'ai trouvé ces deux
films plus captivants dans leur narration que
Taxi Driver qui n'en reste pas moins un excellent film.
Taxi Driver aborde un thème super intéressant, celui de la violence des quartiers de New York vue par un simple chauffeur de taxi, impuissant et un peu
lâche (au début) face à ce qu'il voit. Son évolution est assez bizarre, car elle se fait par à-coups. Pendant toute la première moitié du film,
Travis voit ce
qu'il se passe autour de lui et ne réagit pas. Ca ne l'empêche pas de cogiter et de se dire qu'il faudrait nettoyer toute cette "racaille" qui (selon lui) salit les trottoirs la nuit. Il ne se
prive d'ailleurs pas d'en faire part au futur président lorsqu'il le charge dans son taxi. Il cogite, on sent qu'il déprime, notamment lorsqu'il essaie de parler à l'un de ses collègues qui lui,
ne comprend pas tellement le mal-être de
Travis. Pour se sentir bien dans sa peau, il va alors devenir en quelque sorte un justicier en tentant de sauver une
gamine de 12 ans qui se prostitue et n'a pas le courage de tout plaquer. La gamine est d'ailleurs jouée par
Jodie Foster, absolument parfaite
dans ce rôle assez difficile. Cette relation entre
Travis et
Iris est géniale, passionnante, ça fait même un peu penser à
Léon. Mais voilà, je trouve que ce déclic de
Travis arrive trop tard dans le film. On a à peine le temps
d'en profiter que le film s'arrête, et c'est bien dommage. La chose qui m'a gêné, finalement, c'est le début du film avec la relation "amoureuse" entre
Travis
et
Betsy. Cette étape était-elle importance dans le processus d'évolution de
Travis ? Je n'en ai pas l'impression, ou
alors j'ai zappé quelque chose. Toute cette partie était amusante au début, et crédible, mais sans vraiment de sensibilité, je trouve. En fait je n'ai trouvé quasiment aucun intérêt à cette
idylle assez courte qui n'aboutit jamais. C'est vraiment un élément du film dont on se fiche totalement. Vu comme c'était parti, j'ai eu peur que tout le film se base principalement autour de ça,
et heureusement
Scorsese n'a pas fait cette erreur, parce que ça aurait pu être assez lourdingue. Donc je trouve excellent le fait de ne pas
avoir continué là-dessus, mais le problème qui se pose c'est : pourquoi avoir introduit ça ? A part montrer que
Travis est un peu taré lorsqu'il tente
d'assassiner le sénateur. Montrer que le personnage n'agit à ce moment que par l'intérmédiaire de
Betsy (adulant le futur président au début puis décidant de
le tuer, comme pour se venger). Personnellement, je n'ai pas accroché à cette histoire d'amour, d'autant que je trouve
Cibyll Shepherd assez
mauvaise dans ce film, fade. Je l'avais trouvé plutôt amusante dans la série
Clair de Lune avec
Bruce
Willis, mais là franchement, je n'accroche pas. Tout ce début de film est également accompagné d'une musique qui, je trouve, ne colle absolument pas à l'ambiance. Des airs au
saxophone qui font justement penser à
Clair de Lune dans le style. Ca ne correspond pas à l'atmosphère sombre et déjantée du film, où
j'aurais vu plutôt des compositions noires et plus déprimantes. Elles nous empêchent de nous intégrer totalement dans l'esprit de
Travis et c'est dommage.
Bref, tout ça pour dire que ce passage du film (qui dure quand même longtemps) fut pour moi l'objet de longueurs, même si je comprends que c'était plus ou moins nécessaire.
Alors attention, le début de cette critique laisse penser que je n'ai pas aimé le film. Mais
ce n'est absolument pas le cas ! A part ce début un peu faible, j'ai trouvé toute la suite absolument géniale. Et encore, à part cette
histoire avec
Betsy, le début contient pas mal de très bonnes scènes, notamment lorsqu'un type un peu taré et bizarre entre dans le taxi de
Travis (l'homme barbu joué par
Martin Scorsese lui-même, vraiment délirant) et lui déballe sa vie et ses projets de
meurtre. Mais dès que
Travis commence à changer d'état d'esprit, à acheter des flingues et à s'intéresser à
Iris, j'ai
vraiment adoré le film jusqu'à la fin. Le seul regret que j'ai eu était de me dire "
dommage que le film ne se soit pas davantage
consacré à cette partie". Le film devient subitement palpitant, avec des nombreuses scènes absolument géniales et cultes (c'est d'ailleurs ce que je reproche au début du film, qui
n'est pas très consistant en la matière). Beaucoup de passages excellents, comme l'achat des armes à feu, ou la discussion avec l'un des gardes du corps du sénateur, vraiment très drôle. De
manière générale, le personnage
Travis devient plus vivant, comparé au début. La scène "
Are you
talking to me ?" est tout simplement énorme, bien plus drôle dans son contexte que lorsque je l'avais vue sur Youtube. Et pourtant ça me faisait déjà marrer. Et puis bien sûr, la fin
du film est juste parfaite.
Scorsese se permet même de faire une petite critique des journaux et de la médiatisation de certains "héros",
Travis étant finalement célébré pour avoir buté plein de monde. Quand on voit le personnage, un peu cinglé sur les bords, il est difficile de l'appeler
"héros" puisqu'il a tout de l'anti-héros. Mais son acte est louable. La scène du carnage, où il fait enfin ce qu'il pensait être son devoir depuis le début, est un pur bijou, pourtant réalisée
avec très peu de moyens. On sent toute la métamorphose du personnage qui en a marre de rester dans son taxi les bras croisés et passe enfin à l'acte, sans hésiter à faire souffrir des gens
odieux. La présence de
Harvey Keitel est d'ailleurs notable, cet acteur que j'ai eu du mal à reconnaître au début est génial et très
délirant. Et puis le regard de
De Niro aux flics, avec son doigt dégoulinant de sang sur la tempe, est incroyable et rend la scène
jouissive.
J'en profite pour refaire une petit pub à If we don't, Rembember
Me.
De même, la toute fin du film est intéressante car elle soulève beaucoup de questions. On se demande si
Travis est mort, finalement. Car, alors que tout le film reste dans une cohérence parfaite depuis le début, il devient subitement assez curieux puisque
Travis est considéré comme un héros (même s'il a sauvé une jeune fille, il a quand même assassiné de sang-froid trois ou quatre personnes) et revient dans sa routine du
début du film, ou presque, puisqu'il a maintenant définitivement l'âme d'un justicier (en témoigne le coup d'oeil rapide dans son rétro juste avant le générique final). Certains penchent pour une
théorie qui me plaît beaucoup, à savoir que ces 5 dernières minutes seraient une vision de
Travis juste avant de mourir. Un aperçu de la vie idéale, où il
recroise
Betsy, prête à s'excuser. Bref, comme je disais, je ne trouve pas que
Taxi Driver soit le
meilleur film de
Scorsese à cause de ce début un peu faiblard. Par contre, là où je suis absolument d'accord, c'est sur
De Niro. Ce mec est grandiose d'un bout à l'autre. L'acteur nous fait là une interprétation de dingue, incarnant un homme déprimé qui n'arrive pas à
dormir et que la souffrance qu'il voit au quotidien va rendre un poil psychopathe.
Au final, j'ai beaucoup aimé mais j'ai trouvé que le début trainait trop en longueur par rapport à ce que le film veut nous faire passer.
Néanmoins, je suis content de l'avoir vu ne serait-ce que pour les prestations incroyables de Robert De Niro et Jodie Foster.