En corps - de Cédric Klapisch

En corps - de Cédric Klapisch

      Je me suis enfin décidé à voir le nouveau Klapisch, étant donné que j'ai été subjugué par Deux moi récemment. Le film explore la reconstruction psychologique et physique d'une danseuse suite à une blessure qui remet en question sa carrière. Encore une fois, Klapisch m'a touché de manière inattendue grâce à ses personnages et à des instants virtuoses qui me sont longtemps restés en tête.

 

En corps - de Cédric Klapisch

      Le sujet (la danse) n'avait pas vocation à me bouleverser spécialement. Cependant, malgré les apparences, En corps n'est pas ce qu'on pourrait appeler un film "sur la danse" et c'est l'une de ses premières qualités. Elise aurait pu être une chanteuse ou même une boxeuse que ça n'aurait pas changé la puissance émotionnelle du récit. On se concentre sur Elise en tant que personne et non en tant que danseuse et, donc, l'art en lui-même passe au second plan. Au premier plan, En corps se focalise sur les relations humaines et, sur ce point, le film est particulièrement réussi.

 

En corps - de Cédric Klapisch

      Qu'il s'agisse de sa relation amoureuse comme de sa relation aux hommes en général, ou - de manière plus intimiste - de sa relation avec son père ou avec elle-même, le personnage d'Elise est fascinant et incarné par Marion Barbeau avec une grande subtilité : elle est clairement l'âme du film. Le travail de l'actrice est remarquable alors qu'elle tourne ici pour la toute première fois. Elle dégage à la fois beaucoup de force et de fragilité et cet équilibre est superbement dosé tout au long de l'intrigue.

 

     Qui plus est, elle est entourée de seconds rôles très efficaces qui apportent du corps à l'histoire. Pio Marmaï et Souheila Yacoub amènent un humour nécessaire, avec une belle énergie qui permet de ne pas s'ennuyer entre les errements psychologiques d'Elise. François Civil, qui semble prendre la place de Romain Duris comme muse de Klapisch, offre un personnage délicieusement gênant que j'ai adoré d'un bout à l'autre. La relation Elise - Yann m'a beaucoup fait rire grâce aux mimiques et lourdeurs du personnage de François Civil, tout en envoyant une pique aux hommes qui, croyant déceler chez les femmes un intérêt pour eux qui n'est pas réel, deviennent bien trop insistants. J'émets une réserve sur Muriel Robin, qui est une excellente humoriste mais ne n'a jamais convaincue dans le monde du cinéma. Une fois de plus, elle force beaucoup de traits chez son personnage, en appuyant ses regards trop fortement ou en exagérant des postures de manière théâtrale. 

 

En corps - de Cédric Klapisch

      C'est bien le seul hic que j'ai trouvé au film, cependant, car le personnage assez artificiel de Muriel Robin est très vite éclipsé par la relation fille-père qui constitue à mon goût le cœur du film, avec un Denis Podalydès éblouissant et criant de vérité, comme souvent. Son personnage donne lieu à de nombreux moments d'émotion. L'un d'eux, en particulier, résume la virtuosité de l'acteur et de Cédric Klapisch qui, en l'espace de 3 secondes et à l'aide de quelques images, sont parvenus à me faire couler une larme. De tels moments de grâce sont assez rares au cinéma et celui-ci tombe vraiment comme un coup de massue sur le spectateur. Je ne m'y attendais pas.

 

En corps - de Cédric Klapisch

      Pour finir, En corps bénéficie également d'autours qui renforcent son côté spirituel : une BO entêtante et des décors sublimes. J'ai été surpris par le choix de faire évoluer l'intrigue vers un quasi huis clos, puisque la résidence qui sert de cocon à Elise occupe une grande partie du film. Ceci apporte un côté réconfortant et chaleureux absolument parfait pour traiter l'évolution du personnage. Pour le spectateur, par ailleurs, c'est tout à fait reposant. Parfois, le film s'ouvre aussi sur l'extérieur et nous régale de vues sur l'océan, depuis des falaises bretonnes. Ces séquences illustrent à la perfection la renaissance d'Elise, qui inspire profondément afin de reprendre les rênes de sa vie. L'une des scènes est accompagnée d'une musique que j'écoute maintenant depuis près de deux semaines tant sa puissance m'a marqué, il s'agit de "Sunrise" d'Hofesh Shechter. Cette composition est magnifique.

 

      En bref, En corps m'a ravi. Même si j'ai eu peur, à un moment, que le film ne s'engouffre dans une critique du corps médical, Klapisch n'a pas fait cette erreur et m'a offert un vrai moment de sérénité. En corps est un film simple qui fait beaucoup de bien.

 

 

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