Visions - de Yann Gozlan - Critique

Visions - de Yann Gozlan - Critique

       Presque deux ans après avoir découvert Boîte Noire, excellent thriller basé sur l'ouïe, j'attendais beaucoup de ce nouveau film de Yann Gozlan qui semblait basé sur la vue. Quelques heures plus tard, j'écris ici pour vous déconseiller de le voir. Visions est un thriller psychologique qui tombe dans tous les clichés possibles tout en s'embourbant dans un scénario qui n'a aucune cohérence. Mises à part quelques séquences particulièrement réussies, Visions n'offre rien de plus que la sauce habituelle de ce genre de thrillers, avec du faux mystère et un twist complètement bidon. Sans oublier le propos final absolument catastrophique.

 

      Attention, ça va spoiler sévère, mais on s'en fout puisque vous n'allez pas le voir.

Tags Critique analyse explication du film

Visions - de Yann Gozlan - Critique

       L'idée du film est la suivante : Estelle est pilote de ligne, elle vit avec son compagnon Guillaume, médecin. Soudain, une femme qu'elle a aimé 20 ans auparavant resurgit dans sa vie sans prévenir et va venir chambouler les émotions d'Estelle. Je vais expliquer rapidement (parce que je ne veux pas y passer une heure) tout ce qui m'a fait bondir dans Visions

 

       Le film partait plutôt bien, avec une scène assez gênante sur le personnage de Matthieu Kassovitz qui incite celui de Diane Kruger à respecter le planning sexuel du couple, afin de maximiser leurs chances d'avoir un enfant, malgré sa fatigue et sa réticence. Je me suis dit que les bases étaient posées et que le film allait avoir un discours intéressant sur la pression qui s'exerce sur les femmes, etc. L'intrigue se poursuit avec cette histoire d'amour de jeunesse retrouvé ; on apprend qu'Estelle et Ana étaient amantes il y a 20 ans et que leur relation avait été aussi intense qu'unique. A partir de là (donc 15 minutes), le film se met à déconner complètement puisqu'on va se retrouver avec deux personnages féminins qui sont des clichés ambulants du thriller psychologique. L'une va devenir folle, avoir des hallucinations et devenir paranoïaque, comme souvent lorsque le personnage principal d'un thriller est féminin. Diane Kruger joue le rôle à merveille mais on peut difficilement faire plus stéréotypé pour ce genre cinématographique. L'autre, jouée par Marie Nieto, est le cliché de la femme sexy au fort accent, impulsive et totalement libérée, qui vit sa vie au jour le jour et s'enfuit sans donner de nouvelles. Bref, on se retrouve avec deux personnages sans aucune profondeur puisqu'on les a déjà vus 100 fois ailleurs, et rien dans le scénario ne vient justifier particulièrement leur amour fou et incontrôlable.

 

      Clairement, les deux femmes ont du désir l'une pour l'autre et le réalisateur nous le montre bien grâce aux différentes scènes de sexe, mais à aucun moment on ne voit leur fameuse alchimie, ni leur amour inconditionnel et naturel qu'on nous vante pendant une bonne partie de leurs rencontres. Leur relation est terriblement plate, la faute notamment au personnage d'Ana qui s'avère de plus en plus antipathique et sans intérêt. Lorsque celle-ci disparaît mystérieusement, on s'en ficherait presque complètement. Mais admettons. D'accord, admettons qu'Ana soit l'amour de toute une vie, la rencontre magique et fusionnelle d'Estelle. Même si c'est montré maladroitement, admettons. Pourquoi alors, bordel, le film se conclut dans une sorte de soulagement lorsqu'Estelle découvre qu'Ana est morte, que son mari l'a aidée à cacher le corps, et qu'elle est finalement parvenue à tomber enceinte ? Ca n'a aucun sens et ça va à l'encontre de tout ce qui nous était présenté en début de film ! Je ne comprends pas et ça m'a agacé autant que frustré. 

 

      Qui plus est (et merde je vais vraiment écrire là-dessus pendant une heure), on comprend en fin de film que c'est Estelle qui a tué Ana et que c'est Guillaume qui s'est chargé de faire disparaître son corps. Et qu'a-t-il trouvé comme brillante idée, pour que sa femme n'ait pas à vivre avec toute cette culpabilité ? La droguer. Mais oui, parfaitement. La droguer sans son accord, avec un puissant médicament qui a pour effet de faire perdre la mémoire, et qui explique pourquoi Estelle devient tarée et hallucine pendant tout le film. Lors du dénouement, Estelle va tout comprendre, retrouver la mémoire et sourire à Guillaume parce qu'il est quand même gentil d'avoir pris soin d'elle comme ça. Tout est NORMAL. 

 

Visions - de Yann Gozlan - Critique

      Je continue sur les incohérences ridicules même si j'enfonce des portes ouvertes, mais le film regorge de choses qui n'ont aucun sens. Il y a une séquence magnifique (pour le coup, je suis premier degré) dans une boîte de nuit, assez épileptique, avec une incroyable transition. Le personnage de Diane Kruger sort de la boîte de nuit à la recherche désespérée d'Ana, et se retrouve dans un avion. On comprend qu'elle sort d'une hallucination et qu'elle doit remplacer son collègue aux manettes de l'avion. J'ai trouvé la scène géniale car, pour une fois, le contraste entre le rêve et la réalité ne s'est pas fait par un brusque réveil du personnage. Oui, parce qu'on en a marre des personnages qui rêvent et qui se réveillent brutalement à bout de souffle, tout droit assis dans leur lit. Ca n'arrive jamais à personne ça, m'enfin bref. La transition est donc plutôt jolie est inattendue, mais il y a un problème. Le problème, c'est que toute la séquence qui suit est un incroyable non-sens. Estelle se retrouve à piloter l'avion et on leur annonce qu'un autre avion se dirige droit vers eux. Tout calmement, la tour de contrôle suggère qu'Estelle dévie la trajectoire de l'engin de quelques degrés afin d'éviter un crash imminent (elle a environ 20 secondes pour agir). Inutile de commenter à quel point cette scène est d'une stupidité affligeante.

 

Visions - de Yann Gozlan - Critique

       Je pourrais aussi parler du groupe de motards qu'Estelle croise à chaque fois qu'elle se gare pour aller voir Ana. Le film, par sa mise en scène et la musique mystérieuse, nous montre que ce groupe est menaçant pour Estelle et qu'ils trafiquent quelque chose de louche. On le sent, que ces personnes vont avoir un rôle capital dans la résolution de l'enquête. C'est une évidence. Et pourtant, non. Pendant les 45 dernières minutes, on ne les voit plus, ils disparaissent purement et simplement de l'intrigue sans qu'on nous explique pourquoi on avait tant insisté sur eux en première partie. C'est complètement con. Je passe aussi sur le fait qu'Estelle reçoive un message vocal d'Ana lorsque celle-ci est traînée morte dans un sac poubelle sur la plage, ce qui ne peut être expliqué par aucune loi de la physique (actuellement découverte). 

 

      Pour finir, je voudrais parler de la thématique du film qui est censée être la vision. Visions s'ouvre sur un générique à l'ancienne avec des yeux en gros plan (on repassera pour l'originalité) et on veut nous faire croire dès le départ que ce sens aura une importance capitale dans l'intrigue. Or, mise à part cette histoire de trou dans la fissure du mur (qui finalement aura un intérêt assez mineur), ainsi que les rêves prémonitoires d'Estelle pendant une bonne partie du film, le thème de l'œil et de la vue est placé au cœur de l'intrigue de façon tarabiscotée. Je ne comprends pas particulièrement ce choix, et le film m'a simplement donné envie de revoir un film comme Amer ou L'étrange couleur des larmes de ton corps, qui plaçaient tous les sens au centre d'une trame troublante et perturbante. Contrairement à ce Visions totalement surfait.

 

     Je m'arrête là, mais je vous déconseille évidemment le visionnage de Visions.

 

 

 

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