Partie 1/4 : Les pistolets en plastique
16h25. A peine Les pistolets en plastique fut-il terminé que je suis sorti du cinéma, toujours le sourire aux lèvres, et que j'en ai fait le tour pour y entrer à nouveau : c'était déjà l'heure de ma deuxième séance. Pour Le moine et le fusil, signé Pawo Choyning Dorji, nous restons dans la comédie mais elle est beaucoup plus douce, car il s'agit ici de l'histoire politique du Bhoutan. Ce film, qui a bien failli se retrouver en compétition pour l'Oscar du meilleur film étranger, fut une agréable surprise, même si le propos étonne un peu.
Le moine et le fusil revient sur l'année 2006, lorsque le roi du Bhoutan (intrigant pays régi par le Bonheur National Brut) a décidé de renoncer à la monarchie absolue pour mettre en place une forme de démocratie, avec élections. Dans le même temps, le Bhoutan devenait également l'un des derniers pays au monde à mettre en place Internet et la télévision, bouleversant considérablement les habitudes des habitants en terme de modernité. Ces profonds changements dans une société qui semblait tout avoir pour être heureuse donnent lieu, dans le film, à de nombreux conflits entre les individus.
Plutôt amusant, Le moine et le fusil nécessite une certaine ouverture d'esprit ou, disons, une capacité à se mettre à la place de ces personnes, afin de comprendre pourquoi de nombreuses d'entre elles refusent catégoriquement l'idée de la démocratie. C'est à mon goût l'un des défauts du film qui, malgré tout le contexte, ne fait pas beaucoup d'efforts pour donner la part belle à ces élections. En effet, malgré sa fin plus optimiste, Le moine et le fusil passe 1h30 à nous expliquer que ces habitants étaient les plus heureux du monde avant de voir leurs vies déchirées par ce choix qui leur est donné. La vision de la démocratie y est assez négative, puisqu'on insiste beaucoup sur les effets conflictuels de toute bataille d'idées, mais jamais on ne s'interroge vraiment sur le bien-fondé de laisser ces personnes décider du sort de leur pays. Le moine et le fusil insiste donc beaucoup sur les problèmes que cela pose, sans vraiment évoquer la nouvelle liberté que cela offrira à l'avenir.
Alors, certes, c'est un occidental habitué au principe de la démocratie qui écrit cet article, et j'en suis parfaitement conscient. J'ai d'ailleurs adoré être chamboulé de la sorte, car j'ai fini par me poser des questions moi-même : est-ce que, vraiment, ces gens préféraient ne rien avoir à décider ? Est-ce la clé du bonheur ? J'ai malgré tout été gêné que les bienfaits de la démocratie soient uniquement imaginés à travers un petit texte avant le générique final... Il n'empêche que Le moine et le fusil est très plaisant à suivre et que le dénouement (avec la révélation du pourquoi ce moine désire tant un fusil) est géniale et surprenante. Un beau film sur un pays en plein bouleversement.