Parmi ces trois visionnages récents, tous sont intéressants à voir pour des raisons différentes. Deux d'entre eux, même, ont bien failli figurer dans la liste de mes coups de cœur.
Hatchi
La réputation d'Hatchi n'est plus à faire : c'est l'un des mélodrames les plus tire-larmes de ces 20 dernières années. Je savais exactement dans quoi je m'embarquais en découvrant cette mièvrerie de 90 minutes sur la relation touchante entre un chien et son maître - tirée bien sûr d'une histoire vraie. Tout est fait pour créer une chialade presque certaine, avec une musique bien dégoulinante au piano et un toutou choupi au regard bien triste. C'est un peu un Beethoven sans humour et répétitif. Peu de surprises pour moi, car je connaissais même la conclusion de cette histoire à l'avance. La seule question qui restait incertaine était de savoir si Hatchi allait me faire pleurer comme tout le monde.
Malheureusement, la réponse est non. C'est d'ailleurs précisément à cause de cette avalanche de bons sentiments et cette mise en scène gnangnan que j'ai été incapable de prendre les choses au sérieux. Tout y passe : les flashbacks appuyés, les zooms sur les yeux tristes du chien, les textes explicatifs juste avant le générique final... Le pompon : l'histoire est racontée par le petit-fils de Parker lors d'un exposé à l'école et le réalisateur Lasse Hallström ne se gêne pas pour nous montrer la voie : les gosses de la classe finissent en larmes devant cette incroyable histoire. C'est un peu comme si on était forcés de suivre.
Pour contraster avec toutes ces remarques négatives, je peux tout de même admettre que l'histoire est jolie et que Richard Gere est aussi doux que touchant à chaque instant. Ça m'a fait plaisir de découvrir l'acteur autrement que dans un rôle de gentleman beau gosse. Il est ici impeccable, tout en douceur.
Je vous conseille Hatchi ne serait-ce que pour savoir si vous allez lâcher votre larme. Pour ma part, l'atmosphère du film - et notamment cette affreuse BO - m'a laissé de marbre et je ne vois pas l'intérêt de porter ce récit sur une durée d'1h30. Un court-métrage ou un documentaire auraient suffi.
As bestas
Ce film hispano-français de Rodrigo Sorogoyen est sorti en 2022, mais il a fallu attendre sa diffusion à la TV il y a quelques semaines pour que je daigne enfin y jeter un œil. As bestas est un excellent film sur la volonté et sur la bataille pour défendre ses idées. On se demande à chaque instant si cette guerre de voisinage vaut bien le coup, mais il s'agit avant tout d'une question d'honneur et on entre très vite en empathie avec ce couple de fermiers qui subit le racisme et les coups bas au lieu d'obtenir la paix tant désirée. La tension monte progressivement jusqu'à un climax haletant. J'ai beaucoup aimé la deuxième partie après la rupture brutale, bien qu'un peu longue.
Pour ne rien gâcher, le film est porté par un casting solide. En tête d'affiche, Denis Ménochet et Marina Foïs offrent un jeu subtil, tout en demi-mesure et en colère contenue. Denis Ménochet est l'acteur parfait pour ces situations de non-dits et de tension nerveuse, son travail ici est remarquable. Quant aux acteurs secondaires, ils viennent soutenir le duo de manière parfois éclatante : Marie Colomb délivre notamment des répliques mémorables face à Marina Foïs. Luis Zahera et Diego Anido, pour leur part, sont inquiétants juste comme il faut.
Bref, As bestas est un excellent drame, je vous le conseille sans le placer parmi mes coups de cœur ; en effet, 2h15, c'est un poil étiré. Certains passages auraient mérités d'être resserrés.
Chaque soir à neuf heures
En 1967, soit six ans après Les Innocents, le cinéaste Jack Clayton retrouve la jeune actrice Pamela Franklin dans ce drame de famille extrêmement méconnu. Chaque soir à neuf heures, c'est l'histoire de sept enfants qui décident de cacher la mort de leur mère malade afin de continuer à vivre tous ensemble, évitant ainsi d'être séparés à l'orphelinat. Le film est une véritable pépite que je vous encourage à découvrir.
Pour le voir, en revanche, ce n'est pas simple : le film n'existe sur aucune plateforme et les rares DVD sont soit en zone 1, soit hors de prix, ou encore en Bluray importé d'Espagne (il est actuellement affiché au prix de 2000€ sur Amazon... bug ou délire ?). Pour toutes ces raisons, j'admets sans honte ne pas l'avoir découvert par des moyens tout à fait légaux - merci au fameux copain russe, toujours ok...
Chaque soir à neuf heures tient presque du huis clos, puisque l'essentiel de l'action se déroule dans la maison familiale où les sept enfants organisent leur quotidien et prennent des décisions cruciales pour survivre et ne pas éveiller les soupçons. Il faut surtout saluer les performances des jeunes acteurs, qui incarnent chacun une personnalité distincte avec un naturel déconcertant. Seuls quelques éléments empêchent le film de s'élever totalement, comme les étranges séances de spiritisme menées par Diana. Je n'ai pas compris pourquoi ses frères et sœurs faisaient aveuglément confiance en ses pouvoirs. M'enfin, il s'agit d'une poignée de scènes dans un film très maîtrisé.
Bref, Chaque soir à neuf heures mérite clairement de sortir de l’oubli. Je vous le conseille si vous en avez l'occasion.