Avec seulement le synopsis et le début du film, je me suis dit que ça allait être relativement moyen voire carrément primaire, car le DVD
nous présente ça plus ou moins de la façon suivante : "
des grosses bagnoles, des belles pépées et de l'action". Alors
qu'il est loin de se limiter à ça. Donc au premier abord, j'étais un peu sceptique. Mais bon, comme c'est
Tarantino je me suis lancé sans
hésitation parce que c'est quand même un génie. Et bien sûr je n'ai pas regretté !

Tout le début du film est sympathique mais sans
plus. On a droit à quelques bonnes conversations, le problème c'est que les doublages ne sont pas excellents et qu'on n'entendait presque pas ce que les filles disaient dans la voiture en
direction du
Jingle Julia, bar où se retrouvent donc 4 jeunes femmes et un homme balafré au visage, relativement sympathique et mystérieux. De très
bonnes scènes dans cette première partie du film, avec notamment une conversation entre
Stuntman Mike (le génial
Kurt
Russell) et
Arlene (
Vanessa Ferlito) assez mémorable, mais surtout le retournement de
situation auquel je ne m'attendais pas du tout et qui fait du bien, car il lance le film à une vitesse fulgurante. Ce principe de l'ex-cascadeur à la voiture qui "protège de la mort" est tout
bonnement excellent, et le personnage joué par
Kurt Russell est dément, amusant et complètement timbré. Un psychopathe autour duquel tout le
film est centré, même si on ne le voit pas constamment à l'écran (les images s'attardent plus sur les deux groupes de filles). C'est bien simple, je n'aimais pas
Kurt Russell plus que ça avant de voir ce film (ses apparitions ne m'ont jamais dérangé ni fait sauter de joie), mais dans
Boulevard de la Mort il est exceptionnel. On ne peut pas s'ennuyer avec un personnage aussi charismatique, aussi bien travaillé et aussi agréable à
suivre à chaque apparition. En fait (ça n'a peut-être été que mon cas mais) j'attendais tout le temps que le personnage apparaisse, car les conversations entre filles m'ont un peu soulé car je
les ai trouvées assez longues et pas nécéssairement passionnantes (à part deux ou trois actrices, elles ne sont pas toutes marquantes ni très intriguantes). Pas contre, quand le taré ramène sa
tronche et son sourire dément, ça fait plaisir. Mon sentiment face à ce film est passé du "
bof" au "
WOW" à partir du moment où on se rend compte que
Kurt Russell n'est pas vraiment
le gentil petit gars malheureux qui ne boit pas d'alcool. Ceci par le biais d'une des meilleures scènes du film (ma préférée je pense), lorsque
Stuntman Mike
"raccompagne" l'une des filles chez elle et lui demande "
à gauche ou à droite ?". J'ai eu un sursaut d'adrénaline lorsque
la personnalité du personnage principal se révèle et que l'histoire se finit en hécatombe. Une première poursuite stimulante et bien foutue, avec notamment la vision d'une même scène sous 4
points de vue différents (procédé également utilisé dans
Jackie Brown) avant de boucler l'affaire et de se retrouver "14 mois plus tard".

Bref, la suite du film est un pur régal, car on sait à présent ce que
recherche ce fou et comment ça va probablement se terminer. Sauf que pas de bol, notre bonhomme tombe sur des cascadeuses professionnelles qui ne sont pas prêtes de se laisser faire. Je m'arrête
là pour les spoilers mais je n'ai qu'une chose à dire : cette deuxième partie est une tuerie. On a une course-poursuite totalement dingue filmée avec un certain réalisme, et surtout une évolution
du personnage de
Stuntman Mike qui finit presque par nous faire pitié. Suis-je le seul à avoir parfois eu le sentiment d'être devant
Duel de
Spielberg ? De la tension, des plans sur les rétroviseurs, bref que du bon. J'ai entendu
des personnes dire que le film était assez répétitif car il nous montrait deux fois la même chose, mais ce n'est pas ce que j'ai ressenti. Au contraire, les deux parties diffèrent (outre leur
dénouement) du fait qu'on ne connait la réelle personnalité de
Stuntman qu'à la fin de la première histoire. Peut-être aussi ai-je eu la chance de n'être pas
allé lire de synopsis détaillé avant de lancer le DVD, d'où ma surprise. Bref, en plus de
Kurt Russell on a évidemment de nombreuses
actrices, qui sont toutes en moyenne plus charismatiques que la plupart des rôles féminins qu'ont se coltine au cinéma de nos jours.
Rosario
Dawson est un ravissement, cette actrice me bluffe à chaque fois, capable de jouer des rôles totalement opposés (comparons
Sin
City à
Sept Vies, c'est hallucinant). Elle a du talent et ce film nous le montre bien. Sinon je peux bien sûr citer
Zoe Bell,
Vanessa Ferlito ou
Tracie
Thoms qui sont parfaites.

Pour finir, je ne peux (encore) pas m'empêcher de parler d'un film de
Tarantino sans placer les mots "
jaune", "
coffre",
"
pieds" et "
style". C'est encore un réel plaisir de découvrir le style du réalisateur d'un bout à
l'autre, avec des artifices parfois inattendus ou amusants qui se démarquent des films habituels. Exemple : toute la première partie de l'intrigue est filmée façon "vieux film", avec les défauts
de l'image, ce qui donne une ambiance assez sympa. Autre chose : le film passe subitement en noir et blanc après la fin de la première trame, sans qu'on sache pourquoi, et personnellement je
raffole de ce genre de changements qui me font délirer. Surtout lorsqu'au moment exact où on entend une canette tomber dans un distributeur, la couleur de l'image revient subitement comme si elle
ne "fonctionnait" pas avant. Parfaitement inutile au bon déroulement de l'histoire (
non ?) mais terriblement génial,
d'autant que les couleurs sont bien pimpantes, avec du jaune (toujours du jaune !) du rouge, bref ! Pour continuer dans le "style", le film nous offre des plans sublimes, souvent tournés de façon
magistrale. En témoigne cet énorme plan-séquence porté sur les 4 filles qui discutent autour d'une table, la caméra tournant lentement autour d'elles. C'est un détail qui fait penser au début de
Reservoir Dogs où une bonne panoplie de personnages discutent tranquillement autour d'une table ronde (à la différence que la conversation
était plus passionnante dans
RD, mais bon). Enfin, il y a également de nombreux détails et thèmes propres à
Tarantino, comme cette obsession des pieds (je crois qu'on n'a jamais vu autant de pieds dans un film !), ou encore la fameuse scène du coffre de
bagnole, filmée depuis l'intérieur avec deux ou trois personnages en contre-plongée. C'est une scène qui apparait dans la quasi-totalité des films de
Tarantino (elle manque à l'appel seulement dans
Inglourious Basterds, si je ne m'abuse (à
vérifier)). Pour finir, on a encore droit à un générique tout en jaune, puissant, avec une musique d'enfer. D'ailleurs, toute la BO de ce film est mortelle, comme d'habitude.
Un film à voir donc, même si les préjugés sont de la partie, car on ne s'ennuie pas. Le scénario dépasse de loin les films d'action banals,
avec un
Kurt Russell terriblement efficace qui nous fait frissonner à chaque réplique et une mise en scène irréprochable. Quelques longueurs
cependant, notamment concernant certaines conversations pas toujours prenantes (rien que pour ceci, ce n'est clairement pas l'un des meilleurs
Tarantino), mais on oublie vite.