Bien sûr, le dénouement est prévisible, mais le film va bien au-delà d'une simple petite histoire romantique sans intérêt. Comme il est de coutume pour ce genre de films d'époque,
Pride and Prejudice traite avec justesse les moeurs anglaises du début du XIXe siècle, en particulier la question du statut social. Le film insiste sur l'importance des notions de "
rang", "
beauté" et "
richesse" de cette époque en nous montrant que ces trois notions étaient extrêmement liées, voire équivalentes. Une famille d'origine modeste était par exemple de rang inférieur à une famille riche. De même, le film met souvent le point sur la beauté des femmes, les moins appréciables devant se contenter de la moindre occasion de mariage qui leur tombait sous le nez, la "chance à saisir" sous peine de finir seule et mal vue. Car, pour avoir un statut social relativement élevé, les femmes n'avaient presque pas le choix : il fallait se marier avec quelqu'un de riche et respectable. Ainsi, tout le film tourne autour de l'argent et du mariage, plus particulièrement de l'importance de se marier sous peine de ne jamais pouvoir s'en sortir. Les 5 filles sont alors honteusement "classées" sur des critères évidemment superficiels comme la beauté et l'âge afin de déterminer laquelle d'entre elles pourra dénicher le meilleur parti. Un principe traduit par des répliques du genre (en gros) "
Vu ton apparence, j'espère bien que tu vas accepter sa demande de fiancailles parce que tu trouveras jamais mieux !", ou encore, de la part des hommes, par des choix du style "
Puisque Elizabeth ne veut pas de moi, je vais descendre d'un cran et me rabattre sur la suivante". C'est toujours sympa à entendre, non ? Et probablement très représentatif des mentalités de l'époque, je pense. Le film veut donc certainement dénoncer ce problème de l'époque qui n'était bien sûr qu'une simple banalité totalement logique pour eux (la mère qui pique un scandale parce que sa fille ne veut pas épouser un homme, en rappelant que c'est une aubaine et qu'elle n'aura pas mieux niveau rapport qualité/prix (je vulgarise mais c'est un peu l'idée)), et ainsi marquer la différence avec l'évolution qu'il y a eu pour arriver jusqu'à maintenant.

Le personnage principal du film,
Elizabeth Bennet, est une jeune femme assez loin de tous ces principes. Elle cherche l'amour, le vrai, et n'a que faire de l'argent (
a priori), du moment qu'elle est avec quelqu'un qui lui plait. Sa relation avec
Mr Darcy est donc assez intéressante, on sait comment ça va finir mais l'évolution des deux personnages est agréable à suivre. Le film porte bien son nom, puisqu'il est souvent question d'orgueil et de fierté chez
Mr Darcy, un homme qu'on ne parvient pas à cerner dès le départ, très en retrait, exigeant et même maladroitement impoli et goujat. Il ne sourit jamais, semble relativement hautain bien qu'il ne parle presque pas. Il refuse l'invitation de
Lizzie à danser, ce qui a bon goût de ne pas vraiment plaire à cette dernière. Puis les rumeurs vont bon train : la jeune femme apprend d'un certain
Mr Wickham que
Darcy a fait des choses pas très respectables, et c'est là qu'arrivent les
Préjugés. Chacun des deux personnages va devoir oublier sa propre fierté, son propre orgueil et passer outre ses préjugés afin que leur histoire d'amour puisse enfin aboutir. Très franchement, j'ai été passionné par cette histoire qui pourtant ne casse pas des briques (je parle là du scénario et pas des thèmes traités).

Et oui, parce que je n'ai pas encore donné mon avis sur ce film : je l'ai trouvé superbe. Même si l'univers semble peu attirant au premier regard (des histoires d'amour au XIXe, bon...), les sujets abordés sont quant à eux intéressants et surtout : les personnages sont (pour la plupart) loin de tous clichés. A part la mère qui ne souhaite qu'une chose : caser sa fille chez des riches, et les 2 plus jeunes filles,
Lydia et
Kitty, qui ne cessent pendant tout le film de ricaner comme des cruches en voyant un mâle et de s'exprimer de façon insupportable (ça fait vraiment bizarre de voir
Jena Malone dans ce rôle de tête à claques !), le reste des protagonistes est vraiment assez inattendu, même les personnages secondaires qui sont ici de vrais atouts. Tout le film tourne autour de
Lizzie (
Elizabeth)
Bennet (je n'ai pas compté le nombre de scènes où elle n'apparaît pas, mais elles sont très rares voire inexistantes), qui nous intrigue et nous touche. On suit ses pensées, ses avis, ses choix, avec intérêt, et bien sûr sa relation difficile avec
Mr Darcy. C'est un personnage qui semble se situer en dehors du moule de la société de l'époque. En effet, contrairement à sa soeur
Lydia, elle refuse tout d'abord de se marier avec
Mr Collins, un homme riche mais qui ne lui plaît pas du tout (on peut comprendre !). Non, elle ne cherche pas à avoir une situation confortable, elle veut simplement être avec quelqu'un qu'elle aime. Mais la concrétisation de cet amour avec
Darcy ne va pas se faire comme ça, puisqu'elle va tour à tour le détester et le rejeter avant de revenir vers lui. Peu importe le statut social de cet homme, elle ne finira pas avec lui tout pendant qu'elle ne sera pas convaincue de le vouloir. De même, elle semble ne pas se préoccuper du regard des autres, notamment lorsqu'elle s'amuse à choquer
Lady Catherine de Bourgh à table (elle ne fait pas de piano, ne sait pas dessiner, etc.) ou quand elle l'envoie carrément sur les roses avec une repartie bien placée. Le personnage est une femme assez simple, pleine de fraîcheur et de vie, souriante et avenante, mais sensible. Et on suit ses sentiments pendant deux heures sans jamais s'ennuyer. Que dire de
Keira Knightley ? C'est principalement pour elle que j'ai regardé ce film (je tiens à voir l'essentiel de sa filmographie) et sa nomination pour les Oscars a été plus que méritée. Quelle actrice, ça promet ! Toujours aussi expressive, pleine de talent, je pense qu'elle a les capacités pour aller très loin, en espérant qu'elle ne se cantonnera pas éternellement dans ce genre cinématographique où elle pourrait lasser.

Quant au fameux
Mr Darcy, interprété par
Matthew Macfadyen, c'est un homme sensible, timide, mais on ne le sait qu'à la fin. Il semble arrogant mais c'est en fait quelqu'un de mal à l'aise avec les personnes qu'il ne connait pas, très réservé mais mal perçu. Notamment lors de la scène du bal (très bien filmée par ailleurs, lorsqu'il danse avec
Lizzie et qu'ils s'échangent des paroles au rythme des allers-retours), où on sent qu'il a du mal à trouver un sujet de conversation intéressant. Ce personnage est dur à cerner mais n'en reste pas moins touchant (il sourit une unique fois pendant tout le film et j'ai failli sursauter).
Elizabeth est un facteur important de sa vie, elle lui permet d'évoluer et de changer de point de vue sur certaines choses. Au début, on apprend que
Mr Darcy est très exigeant en matière de femmes, qu'il cherche une compagne qui soit douée dans tous les domaines de l'art, mais finira par tomber dans les bras de
Lizzie qui n'a pourtant pas une culture élargie. Ce qui fait le charme du couple, c'est toute cette retenue des personnages qui contiennent constamment leurs sentiments, leurs émotions et ont du mal à communiquer. Beaucoup de retenue, peu d'extériorisation, c'est agréable à voir. L'acteur en lui-même n'est pas terriblement exceptionnel, mais c'est le fait que son personnage soit inexpressif et froid qui donne cette impression et rend le personnage plus original, disons.

Pour entrer dans les personnages secondaires, je peux également parler de
Mr Bingley, joué par
Simon Woods. Ce personnage est également loin de tous clichés, avec son air un peu benêt (et pas
Bennet, haha j'attendais de la sortir celle-là !), son éternel sourire et son côté un peu naïf. Légèrement manipulé par sa soeur, il va néanmoins finir par revenir vers
Jane, l'aînée
Bennet, et c'est également un couple mignon qui finit bien (même s'il est secondaire). Toujours agréable, tout comme
Jane, ce personnage m'a plu et apporte son petit lot d'humour. On peut citer aussi
Mr Collins, joué par
Tom Hollander, qui est un élément fort de l'intrigue. C'est en ça que se démarque
Orgueil et Préjugés je trouve, c'est dans les personnages secondaires qui sont très bien travaillés et tout aussi intéressants que les autres (c'est souvent à cause des personnages secondaires que les films deviennent ennuyeux, mais là ce n'est pas du tout le cas).

Pour finir avec ceux-ci, il y a bien évidemment
Mr Bennet, le père des 5 filles, campé par
Donald Sutherland. Lui aussi est loin du stéréotype du père strict et exigeant qui donne des ordres et régit sa petite famille. Il est au contraire effacé, donne toujours son avis quand il le faut et soutenant sa fille
Elizabeth avec raison même si elle tourne le dos aux moeurs de l'époque. Tout ce qu'il souhaite, c'est le bonheur de ses filles et rien d'autre. C'est certainement avec
Lizzie qu'il est le plus proche, comme en témoigne la scène finale vraiment touchante : la discussion entre père et fille et le bonheur ressenti par chacun des deux personnages. On éprouve de la joie à voir
Elizabeth si heureuse, et de l'émotion à voir le même sentiment sur le visage de son père, avec un sacré sourire attendrissant. Je dis que c'est la scène finale du film, mais il y a eu également une scène rajoutée à la fin, dans la version américaine, celle du baiser entre
Elizabeth et
Darcy qui n'avait effectivement jamais eu lieu pendant les deux heures du film (encore un excellent point, lorsque le cliché du baiser sous le soleil levant a été soigneusement évité). Un ajout qui ne sert pour ainsi dire à rien, mais qui n'est pas non plus ridicule, loin de là.
Pour conclure cet article, je parlerai des décors et de la BO du film. Certaines prises de vue sont vraiment sublimes, avec des jeux d'éclairage particulièrement réussis, et les paysages sont magnifiques. Les décors et les costumes sont grandioses, avec un grand souci du détail. Quant aux musiques, la plupart sont effectuées au piano et accompagnent harmonieusement les images. Une belle bande son, pas lourde, pas répétitive et soignée, qui donne une ambiance très poétique à ce film.
Voilà, j'ai donc beaucoup apprécié ce film à costumes de
Joe Wright, vraiment intéressant et évitant plusieurs clichés. J'ai passé un très bon moment mais bien sûr, il faut aimer les films du genre pour s'y aventurer. Par contre il ne m'a pas donné envie de lire le livre de
Jane Austen (j'aime ce genre dans le cinéma, mais pas du tout dans la littérature).